0.1 Parcs nationaux : de la conservation au tourisme

Il est apparu opportun de s’interroger dans une première partie sur la conservation de la nature aboutissant au développement touristique. L’histoire de la conservation de l’environnement et du tourisme est une source d’information considérable et de première importance pour la compréhension du changement dans la perception 3 de la nature (Foster, 1973 ; Kenya, 1980 ; 1985 ; Runte, 1987 ; WCED, 1987 ; Kiss, 1990 ; KWS, 1990 ; 1994 ; Olindo, 1990 ; Wood, 1992 ; WTO, 1993 ; Brandon, 1996 ; Smith, 1996 ; Weaver, 1998 ; Karanja, 2002). Dès lors, la bibliographie existante montre qu’un tel changement est le produit d’une filiation historique, culturelle et sociale. Cette étude se propose donc d'associer les notions de conservation, de nature et de tourisme.

L’explosion touristique depuis 1950 est un des faits marquants de l’histoire contemporaine. Son évolution dans le temps et dans l’espace, fait apparaître son intérêt économique, socioculturel, politique et académique. Il nous semble donc important d’analyser les éléments porteurs de cette évolution, notamment les mutations dans les transports, sachant que le développement touristique a toujours été lié aux progrès techniques des moyens de déplacement (Smith & Turner, 1973 ; Kadt, 1979 ; Barnier, 1983 ; Kiss, 1990 ; OMT, 1993a ; Vellas, 1996 ; Deprest, 1997 ; Michel, 1998). Petit à petit le tourisme est devenu un phénomène de masse, accessible à tous, à des degrés divers, mais pendant longtemps la politique de ce type de tourisme n’a pas été assez évolutive. Avec un développement massif et non contrôlé, il a généré des effets négatifs dans tous les domaines : socio-économique et environnemental (Kadt, 1979 ; Mathieson & Wall, 1982). Mais cette vision alarmiste du phénomène touristique mérite d’être corrigée compte tenu du fait qu’il offre une possibilité d’évolution à l’échelle internationale vers un tourisme durable. Ce travail, toutefois, insiste sur la complexité de ce concept : est-il réaliste, est-il performant, est-il mesurable ? Cependant, comme le souligne Stankey et al. (1985) le développement touristique induira toujours des modifications dans la communauté d’accueil et/ou dans l’environnement.

L’organisation spatiale du tourisme est présentée à divers niveaux géographiques ainsi que les flux et reflux de cette organisation selon les rythmes de transformation du tourisme international. Cela rend nécessaire l’analyse du tourisme comme système international. De ce fait, l’évolution touristique doit être étudiée à travers les dynamiques d’acteurs et leur interaction (action et rétroaction de sous-systèmes touristiques). Ce dynamisme se concrétise dans la complémentarité organisationnelle et l’interdépendance entre acteurs, partageant la responsabilité de la gestion et de la planification des flux de touristes. Ce système est alors influencé par les dynamiques contemporaines : nouveaux entrants, concentration et intégration verticale et/ou horizontale des activités, mondialisation et nouvelles technologies. Tous ces changements ont généré des attitudes et des perceptions différentes de l’environnement chez ‘les acteurs touristiques’ 4 . En conséquence, leurs demandes concernant le développement touristique ont également changé. L’objet de la deuxième partie de cette étude est donc d’identifier les groupes d’acteurs touristiques dans la région d’Amboseli selon leurs caracteristiques divers.

Notes
3.

Le dictionnaire Robert définit la perception comme l'acte par lequel l'esprit prend conscience des objets à partir des sensations. La perception (l’acte de percevoir) ne peut être réduite aux propriétés physiques et chimiques des stimuli qui peuvent agir sur nos appareils sensoriels en négligeant l’ensemble des données qui sont relatives à l’introspection et qui leur sont associées. Autrement dit, l’identité et la connaissance d’un élément environnemental résultent de l’application d’un point de vue culturel qui donne de la pertinence à la façon dont l’objet est connu (cf. Stafford, 1985; Reau-Chevaleyre, 2003).

4.

Pour raisons de contraintes temporelles et ressources financières, on a ciblé seulement les trois catégories d’acteurs touristiques : la communauté locale, l’administration du PNA et les touristes. Ce choix n’a pas la prétention d’être exhaustive puisqu’il faudrait, sans doute y ajouter des autres acteurs locaux, (inter)régionaux et (inter)nationaux (cf. chapitre V). Néanmoins, comme Kaiser (1974: 26) l’observe, « research itself is never the reality. It is only a reflection/simplification of the same… »