8.4 Conclusion

Ces résultats suggèrent que les acteurs touristiques dans la région d'Amboseli sont composés de deux groupes divergents. Un groupe écocentrique semble préférer des actions gestionnaires qui exigent la modification de l’environnement pour le développement touristique et par extension pour les besoins des touristes. L’autre groupe d’acteurs touristiques, les anthropocentriques, semble favoriser l’utilisation de l’environnement et des ressources naturelles pour le développement local et en fait pour les besoins de la communauté locale (cf. la question du chapitre formulé dans la section 8.0). Cette divergence d’intérêt sur l’environnement pourrait être une source de malentendus entre les touristes (écocentriques) et les membres de la communauté locale (anthropocentriques). Cela est dû au fait que ces deux groupes d’acteurs ont des perceptions tout à fait différentes de l’environnement, dérivées de leur culture, leur éducation, leur civilisation et cætera. Il ressort de cette observation que l’initiative purement exogène ne conduira pas à des gros bénéfices au niveau local et donne l’illusion d’un développement. En même temps l’initiative purement endogène manquera d’adéquation avec les besoins des touristes et alors sa rentabilité économique sera médiocre. Une combinaison des deux approches portées par les locaux, fournira les clés d’un développement durable de l’activité touristique. On doit donc dire qu’un tel initiative hybride est la meilleure démarche, dans un partenariat loyal qui doit lier les intérêts des résidants locaux, des touristes, des responsables d’aire protégée entre d’autres acteurs.

D’ailleurs, il y a une différence dans la manière dont les touristes et les résidents de communautés locales considèrent le tourisme par rapport à l’environnement. Tandis que les touristes semblent regarder le tourisme comme réponse à l’environnement, les habitants ruraux le regardent comme une option économique (Dunn, 1980; Pearce, 1985). Les touristes considèrent l’environnement comme une chose qui doit être protégée pour de futurs touristes, alors que les habitants le regardent comme une ressource qui peut être exploitée pour encourager le tourisme comme source de revenu. Autrement dit, alors que les communautés d’accueil regardent le tourisme comme un moyen de lutter contre certaines des inégalités provoquées par les mauvaises communications et un manque d’opportunités, les touristes voient cette pénurie comme le produit touristique lui-même. Pour les touristes, les zones les plus « sauvages » sont les mieux à même d’offrir les conditions d’accueil propres à une aire protégée digne de ce nom. Aux responsables du développement touristique cependant, ces perspectives apparemment contradictoires peuvent apparaître comme des liens permettant de présenter un produit touristique qui encourage le développement local et en même temps assurer aux touristes de safari l’exotisme qu’ils recherchent. La segmentation des acteurs touristiques apportera donc des éléments d’analyse plus objectifs. Elle aidera à mieux identifier les points noirs qu’on ne veut pas toujours admettre ou les particularités locales d’ordre sociologique dont les acteurs n’ont pas toujours conscience.

Ce chapitre a également constaté que la majorité des adminstrateurs ont des attitudes écocentriques envers l’environnement semblables à celles des touristes. Ceci peut être expliqué par le fait qu’ils viennent de la même école de pensée selon laquelle l’environnement devrait être conservé à tout prix. En outre, les administrateurs appliquent les mêmes politiques environnementales que celles conçues par les colonialistes au profit des citadins - des touristes. Ce constat semble expliquer pourquoi dans la plupart des cas les adminstrateurs sont en conflit avec les habitants locaux sur les questions environnementales. A cet effet donc il semble peu probable que les responsables du PNA agiront en tant qu’« arbitre impartial » dans l’utilisation des ressources naturelles en quelque sorte bénéfiques à la communauté locale et aux touristes. Un telle utilisation doit permettre de mieux réaliser la coexistence, et même la symbiose, du monde rural et du monde urbain représenté par les touristes. Comme Murphy (1985) et Weaver (1998) le disent, cela ne peut se faire harmonieusement que si la communauté locale est étroitement associée aux décisions 123 qui engagent son avenir. Une politique d’aménagement active et participative pourrait sauver cette coopération des offensives qu’elle subit de toutes parts en justifiant son utilité et en faisant miroiter ses atouts aux yeux des collectivités locales. Ainsi le PNA ne serait plus un parc retranché impossible à défendre mais un des éléments du développement et de la qualité de la vie qui contribue à renforcer l’image de marque de la région d’Amboseli. De toute façon ce n’est qu’à ces conditions, au moins, que le tourisme pourra s’intégrer réellement au milieu qui l’accueille et ne pas s’y incruster en parasite (cf. aussi section 13.2.4.2). Enfin, le présent chapitre a souligné une liaison intrinsèque entre des conceptions du tourisme, de la communauté locale/d’accueil et de l’environnement. Ainsi, on peut conclure que toute option de développement touristique devrait avoir une incidence effective sur l’amélioration :

Notes
123.

Ces décisions sont nombreuses et essentielles. Tant au plan du développement local, de la conservation de l’environnement que de la psychologie locale.