9.7 Conservation de l’environnement - ressources financières : quel rapport ?

La politique de conservation de l’environnement au Kenya nécessite non seulement du matériel performant utilisé par des personnels motivés, mais aussi des moyens financiers importants permettant de mettre en œuvre une politique choisie. Les ressources financières du PNA ont plusieurs origines, mais l’essentiel du financement provient de l’Etat, par l’intermédiaire du KWS. Cependant, il est clair que ledit organisme a des moyens financiers insuffisants pour une gestion efficace du PNA. En conséquence beaucoup d’équipements de parc sont dans un état déplorable (cf. aussi section 5.2.2.1). On devrait rappeler aux financiers des opérations du PNA que le tourisme est une activité évolutive qui intègre facilement les nouveaux moyens de transport, les nouveaux équipements, les nouvelles destinations : la destination qui ne peut s’adapter est rapidement hors circuits touristiques. Ainsi est condamné un parc qui présente des équipements vétustes et une surexploitation qui interdit à l’aire protégée de rentabiliser ses investissements et de les orienter vers le long terme.

En ce qui concerne l’information touristique, on remarque dans le PNA la mise en place d’une politique d’éducation à l’environnement et d’information pédagogique. Le parc mise sur les activités culturelles et de découvertes avec 6 sentiers de découvertes, 3 sentiers éducatifs d’interprétation et 4 tables d’orientations. Toutefois, le ‘centre d’information’ 134 et l’écomusée n’attirent et ne retiennent pas suffisamment les touristes. Le musée a été visité seulement par 1 396 sur 59 000 visiteurs du PNA en 2001 et 1 852 sur 44 900 en 2002, soit respectivement 2% et 4% des touristes totaux au cours de ces deux années (cf. aussi tableau 3.1). Non seulement peu de touristes sont intéressés par ce type d’activité culturelle au sein du PNA, mais on remarque une similitude avec des sites payants dans les autres parcs nationaux où il existe une certaine désaffection de la part des visiteurs. Le prix d’entrée de ces animations (en moyenne 5 dollars américains) peut constituer un frein à la fréquentation. De plus ces structures qui manquent de moyens innovateurs de communication, ne correspondent (peut-être) plus à la demande et à la mode actuelle. Avec ses moyens modestes et limités, tant au niveau financier qu’au niveau du personnel technique, il présente  des échantillons de plantes séchées du PNA et une carte géographique montrant des oiseaux et des animaux (sauvages) les plus « représentatifs » du parc, placés selon leur localisation sur la site. Malgré tous ces efforts, on doit constater que sa technique d’exposition est peu innovatrice et son contenu informatique est obsolète. En conséquence, ce centre d’éducation et d’information touristique est dans un état médiocre, voire lamentable, qui peut nourrir quelques doutes sur leur exactitude. In fine, ces structures ne sont, sans nul doute, pas encore prêtes à accueillir le tourisme du XXIème siècle auquel ils s’adressent, et ne répondent pas à ses exigences. Or, il est vrai que beaucoup de destinations touristiques de pays en développement sont mal armées pour répondre aux nouvelles exigences du marché international du tourisme fortement versatile.

En bref, il y a une valorisation économique et symbolique des aires protégées, au Kenya, qui engendre de nouveaux processus de territorialisation. Le PNA, par exemple, devient le terrain de jeux privilégié des citadins, en permettant d’associer le tourisme et l’environnement. Le parc est de plus en plus un espace d’aventures et d’émerveillement pour le citadin, qui y recherche aussi parfois une certaine valorisation sociale liée au développement du « paraître », ce qui accentue encore plus d’importance au parc. Cette attitude est caractéristique d’écocentrisme (cf. chapitre VIII).

On a vu que le PNA, troisième parc national récepteur en termes d’arrivées de touristes (tableau 4.1), a de capacité à créer de la valeur ajoutée, d’exploiter ou de valoriser 135 son patrimoine et d’y ajouter en permanence de nouvelles sources de production. Il s’agirait donc pour l’administration du PNA de cultiver sa spécifité, son identité mais également de diversifier son offre pour répondre à la versatilité de la demande et de veiller au maintien de la qualité et à l’amélioration de la notion de service. Une autre manière d’augmenter les chiffres d’affaires est de multiplier les achats des touristes existants, d’augmenter leur fréquence d’achat ou encore d’en séduire d’autres. En ce qui concerne la dernière proposition, les touristes existants peuvent être les meilleurs marketers : un touriste satisfait sera porteur d’un message positif à l’égard de la destination visitée. En revanche, si ce même touriste n’a pas atteint son objectif, à savoir, le sentiment d’avoir passé de bonnes vacances, et de s’être reconstruit dans un univers conforme à ses attentes, il sera l’émetteur d’un message négatif dont la portée peut être désastreuse. A court terme les responsables du PNA pourraient cibler les excursionnistes car ils semblent avoir des exigences moins coûteuses que les autres catégories de touristes. Bien qu’ils laissent peu de retombées économiques dans une destination, la multiplication de courts séjours donne du poids aux entreprises qui fournissent des loisirs de proximité ou qui permettent de voyager rapidement et sûrement. Or, la fréquentation des « ressources touristiques » par d’autres usagers que les touristes, au sens traditionnel, joue un rôle parfois important dans leur maintien ou leur développement. De ce point de vue des parcs nationaux, tels Nairobi ou Lac Nakuru, peuplés et disposant d’un large réservoir de citadins intéressés, sont une fois de plus privilégiés.

Notes
134.

Le centre d’information joue le rôle de « vitrine du PNA », et il peut renseigner et orienter les touristes sur l’espace du parc.

135.

Valoriser, et donc ajouter de la valeur ajoutée, de la marge, à the chain of value apparaît un premier point de réflexion et demande une connaissance forte et une grande dose d’innovation et de créativité, voire d’opportunisme (cf. Hazebroucq, 1999).