11.2.2 Diversification des produits touristiques

Le touriste d’aujourd’hui soutient son droit de choisir entre les éléments de composition de ses vacances. On peut déjà proposer un scénario selon lequel un touriste averti pourra, après avoir choisi une destination touristique grâce aux information sur le web, rechercher le moyen de transport et le mode d’hébergement, faire les réservations nécessaires et effectuer les paiements correspondants, fabriquant ainsi lui-même un produit touristique : auto-organisation (cf. section 9.5.3). En général le web fournit d’information sur les deux côtés du tourisme : offre et demande. Sur le côté offre, il permet de diffuser facilement et adapter en continu un catalogue, de réagir très vite aux aléas de la conjoncture. En même temps, sur le côté demande, le web permet de comparer facilement l’offre disponible sur le marché, par la quantité et la variété des informations qu’il apporte. Il y a donc deux fonctions d’information pour le touriste :

En conséquant, l’individu peut concevoir lui-même l’articulation des différents biens et services qui entreront dans la composition de son produit touristique. Le produit ainsi devient « ouvert », c’est-à-dire l’objet de combinatoires multiples de type génétique. L’innovation de produit qui fonde la diversification des activités touristiques s’effectue par recombinaison en ajoutant ou en supprimant des caractéristiques, en combinant les caractéristiques de deux ou plusieurs produits, ou en autonomisant certaines caractéristiques. Par ce jeu, le produit va réussir à s’adapter aux exigences du touriste puisqu’il acquiert un caractère unique et individualisé. Il convient de souligner que son produit peut être évolutif. C’est-à-dire qu’il est rarement pré-défini et qu’il connaîtra durant toute la période de temps consacré à son élaboration et à sa consommation des modifications, que ce soit par l’ajout ou par la suppression d’éléments ou d’événements qui n’étaient pas initialement prévus. Bref, quand les marchés électroniques se développent, des mutations fondamentales se produisent : les touristes par exemple disposent d’une offre plus vaste et diversifiée.

L’évolution d’internet met à disposition instantanément l’ensemble des possibles sur l’ensemble des marchés associés au tourisme, et permet de combiner efficacement liberté individuelle et massification de l’activité touristique. En conséquence, le touriste veut être « indépendant » et « autonome ». Il n’a pas trop envie de suivre, et ne veut pas être obligé de visiter. Pendant ses vacances, il veut être « un oiseau libre » et « faire ce qu’il veut, quand il veut ». A cet égard, le touriste est un individu autonome qui peut trouver son plaisir dans une variété illimitée de pratiques. En conséquence, il est plus flexible, imprévisible et difficile à satisfaire. Ceci signifie que des offres touristiques d’une destination devraient être si étendues/larges que le touriste trouvera assez d’options pour sentir que son droit est satisfait. En fait le nouveau touriste est un client-roi 141 , blasé et sceptique qui y regarde à deux fois avant d’acheter, qui fait le tour du marché avant de se décider pour le moins cher, qui veut tout et tout de suite. De plus, nous avons émis dans la section 9.4 l’idée que pour aborder les attentes des touristes, il est préférable de réfléchir en termes de « segments » touristiques plutôt qu’en les restraitant ensemble. Une telle manière de concevoir les individus comme des acteurs touristiques (cf. sections 8.2, 9.4 & 10.3.5) qui, tout en suivant des règles et des normes en vigueur, sont capables d’avoir une certaine marge d’autonomie pour conduire des actions qui aient un sens à leurs yeux, est proche des conceptions développées par les théoriciens du développement local (Arnstein, 1969 ; Krippendorf, 1977 ; Murphy, 1985 ; Davis, et al., 1988 ; Kiss, 1990 ; Brandon & Wells, 1992 ; Getz, 1993 ; Cuvelier, 1998 ; Hall & Page, 1999). Cette dynamique, qui est de nature à bouleverser tous les équilibres installés, est celle que devra intégrer et porter le tourisme à venir.

Notes
141.

La nécessité de gestion de la qualité est conditionnée par le niveau de dominance du client. Ce niveau est particulièrement élevé lorsque le client peut imposer ses exigences au prestataire des services ; il faible quand le fournisseur de services peut imposer ses exigences. Ce deuxième cas se présente souvent quand le prestataire de services dispose de connaissances et/ou de compétences spécifiques ou quand il a le pouvoir de placer le client dans une position de dépendance : par exemple, lors d’un séjour dans un hôpital. En dehors de ces situations d’exception, le touriste n’est pas dans une position de dépendance et le rapport de force en sa faveur ne cesse d’augmenter du fait de l’existence d’offres alternatives et de son niveau de connaissance (cf. aussi sections 5.2.4, 5.3 & 11.1).