12.2 Conséquences de l’utilisation touristique du PNA

L’arrivée de touristes en nombre grandissant impose assez vite des aménagements destinés à les accueillir et à les sécuriser.

La dégradation la plus préoccupante pour l’administration du PNA est due à la circulation automobile. Le trafic automobile amène des pollutions multiples, la plus grave liée aux gaz d’échappement induit des perturbations diverses dans la vie animale et oblige parfois des animaux à changer de lieu de vie. Oiseaux, hérissons, tortues, mais aussi animaux de taille plus importante comme les gnous ou les zèbres sont écrasés ; certains parmis ces derniers peuvent même causer des accidents graves. En général on doit dire que toute circulation de touristes entraîne systématiquement des perturbations et des dégradations des milieux.

L’incendie est un autre problème important dans les parcs kenyans en général. Le problème du feu est en liaison avec les visiteurs que l’on rend responsables des incendies, d’autant plus que la surcharge humaine du milieu coïncide avec les périodes de chaleur. Le feu est à mettre depuis toujours au nombre des fléaux du PNA à cause de l’aridité propre à certains secteurs. En 1985, par exemple, deux incendies importants avaient brûlé une dizaine d’hectares du parc. Dans le premier cas, on accusa les fumeurs mais dans le second c’était les Maasaïs qui avaient incendié la lande pour la régénérer. Face à ce problème, l’administration du PNA pratique un débroussaillage systématique à proximité des routes et sentiers les plus fréquentés et pose des panneaux demandant aux fumeurs (touristes ou/et non-touristes) de « prendre plus de précautions ». En demandant à chacun de prendre ses responsabilités face à ce problème, l’occurrence des incendies a diminué (KWS, 1997).

Dans la région d’Amboseli, il existe aussi des dégradations liées aux équipements d'accueil soit « lourds » soit « légers » (cf. tableau 4.2). D'une façon générale, le KWS dispose maintenant des moyens techniques suffisamment sophistiqués pour réduire au minimum l'impact de structures d'hébergement: c'est, avant tout, une question de moyens financiers mais c'est aussi affaire de volonté de la part des gestionnaires des parcs et de bonne volonté des politiques. La taille des structures d'accueil, par exemple, est un paramètre important: la présence de grosses structures d’hébergement touristique est source de très nombreuses perturbations. Elle entraîne de fortes fréquentations touristiques qu'il est très malaisé, voire impossible de contrôler. En conséquence, l’administration du PNA est actuellement contre la construction des hôtels dans le parc. Selon le Senior Warden :

‘« Ces terrains des hôtels ont perdu leurs caractéristiques originelles : l’espace naturel a fait place à un terrain aménagé, organisé et qui ressemble à un village miniature… C’est un espace construit, une sorte de ville organisée… des sortes de quartiers séparés avec leurs occupants différents, leurs éclairages, leurs panneaux de signalisation… La région d’Ol Tukai est fortement touchée par ces modifications » (cf. figure 4.3).’

Autrement dit, les administrateurs souhaiteraient ne voir se multiplier que les activités touristiques « douces » qui, ne nécessitant pas d’équipements « lourds », peuvent s’intégrer dans les milieux naturels avec un minimum d’impact. Les équipements légers permettent des hébergements le plus souvent saisonniers: camping et caravaning (cf. table 4.2 & figure 4.3). Les terrains de camping se sont dotés d'équipements divers: toilettes, bungalows, tables pour pique-nique, prises d'électricité, restaurant, mini-supermarchés. Selon Richez « ...‘dans la mesure où les densités d'accueil ne sont pas élevées et où nombre de précautions sont prises, ce type d'hébergement peut parfaitement s'intégrer dans les milieux naturels...’ » (1992: 136). Toutefois, les campeurs ne sont pas toujours très respectueux de la nature et sont à l'origine de dégradations mineures diverses qui s'ajoutent à celles qui viennent d'être évoquées. Récolte du bois pour le feu de camp, papiers gras et boîtes de conserve abandonnés, ouverture d'espaces au sein de bosquets pour mieux dissimuler les tentes sont quelques exemples des comportements non-respecteux du milieu environnant. D'une façon générale, l'installation de bâtiments d'accueil dans le PNA pose toutes sortes de problèmes qui nécessitent des traitements particuliers et une grande attention de la part de l’administration du parc.

Les activités liées à l’observation des animaux peuvent aussi perturber la vie animale. De telles perturbations dépendent des types d’équipements d’observation. Plus ils sont sophistiqués et plus elles sont réduites. Des jumelles puissantes, par exemple, maintiennent les touristes éloignés. Elles dépendent aussi du nombre et des connaissances des touristes et des réactions des animaux à l’observation: certains s’accommodent bien de la présence humaine (par exemple les girafes), d’autres pas (par exemple les guépards). De toute évidence, l’observation rapprochée est particulièrement perturbatrice en période de reproduction (pour les animaux comme les lions) et en période de nidification (les oeufs abandonnés par les parents se refroidissent ou peuvent être la proie des prédateurs).

Le nourrissage des animaux par les touristes présente une autre forme de perturbation. Tout d’abord, certains animaux (singe, gorille, chimpanzé, hyène) prennent l’habitude de ne plus s’éloigner des lieux touristiques qui constituent leur garde-manger. Ensuite, les déchets et ordures de tous ordres, bouchons, capsules métalliques, plastiques... laissés par les touristes peuvent être avalés par les animaux et provoquer des blessures graves. En outre, des espèces animales anthropogènes s'installent rapidement dans les lieux les plus régulièrement fréquentés: le rat, l’écureuil, le moineau.

Toutes les remarques précédentes dans cette section ont bien montré que des dégradations et des perturbations dans le PNA sont étroitement dépendantes de la fréquentation touristique excessive et irrespectueuse. Autrement dit, le parc connaît des problèmes environnementaux parce qu’il y a trop de touristes ; ainsi, s’il y a trop de touristes, c’est qu’il existe une limite au-delà de laquelle les problèmes apparaissent. C’est donc le dépassement de cette limite qui induit le déclin de la destination accusé par une baisse de fréquentation touristique (Deprest, 1997). Par conséquent, il est essentiel d’arriver à fixer des seuils et à proposer des capacités de charge touristique.