B. Affaiblissement du lien religieux

Ce second aspect est au croisement de dimension sociale de la sécularisation et de son retentissement dans la vie des individus. C’est à travers ce prisme que la sécularisation du religieux est la plus immédiatement visible et sensible. Elle se traduit par des phénomènes connus : baisse de la pratique religieuse, vieillissement des assemblées, chute du nombre des clercs et une certaine perte de la valeur intégrative des grandes fêtes chrétiennes. C’est par ces indicateurs que l’on peut mesurer la perte d’influence des Eglises.

Cet affaiblissement du lien religieux se traduit aussi par le fossé entre les normes sociales et de comportements prescrits par l’Eglise et les conduites des fidèles que cela soit dans la pratique d’une spiritualité personnelle, dans l’amplification d’une inculture religieuse que dans la conscience elle-même. Non seulement les réponses religieuses sont jugées désuètes mais les principes éthiques et moraux que l’Eglise défend sont en contradiction avec les réalités sociales, sanitaires et culturelles.

La famille a traditionnellement joué un rôle important comme lieu et cadre d’imposition des valeurs. Les mutations structurelles de la cellule familiale rendent ce rôle problématique. Cette famille devenue plurielle, séparée, recomposée, fragilisée dans son avenir se voit chargée de requêtes accrues. La demande de catéchèse exprime souvent une demande de suppléance éducative notamment de transmission des valeurs (à mettre en rapport avec les thèmes de la vie et ville assurancielles et de la déresponsabilisation des populations). Le fils ne succédant plus au père, l’ordre des successions s’en trouve bouleversé. Dans ce contexte, l’instruction religieuse est une demande traduisant un vœu parental, d’inscrire les enfants dans une filiation et un aveu d’incertitude sur le message à transmettre. Ce vœu est d’autant plus fort si les parents si les parents sont habités d’un doute profond vis-à-vis d’eux mêmes. Incertains de leur foi, confrontés avec les remises en question de la vie adulte, en situation d’incapacité de transmettre des valeurs et ne reconnaissant aucun organisme social capable de les suppléer, ils attendent de la catéchèse qu’elle opère cette transmission. Derrière une demande complexe se cache peut-être un vœu de généalogie.

Hormis la famille, toute une socialisation religieuse s’effectuait au travers de la culture paroissiale. Elle marquait l’espace par ses monuments et ses emblèmes comme elle scandait le temps par le rythme de ses offices et de ses fêtes. L’acculturation religieuse se tissait par une toute une ritualité. La catéchèse ordonnait les fragments d’un discours qui circulait avant, résonnait ailleurs et s’expérimentait socialement 16  . La fin de la civilisation dite paroissiale a reporté sur l’enseignement catéchétique la charge d’une socialisation religieuse, qui n’a ni autre appui, ni autre lieu d’effectuation.

Notes
16.

ROUTHIER G in « l’Eglise disséminée » p 47