En France par exemple, la notion de « pays », apparue récemment, a parasité le débat national sur l’aménagement et le développement du territoire. Il participe ainsi d’une action institutionnelle qui procède précisément par invention de nouveaux formats ou de nouveaux périmètres territoriaux. Sur le plan municipal, le double impératif de rationalité gestionnaire d’espaces pluri communaux et d’exercice de la citoyenneté dans des instances de proximité conduit à combiner la promotion d’institutions, de structures de coopération intercommunale, avec un processus de fragmentation infra communale qui répond à la stratégie d’équipes municipales désireuses d’adapter leurs interventions aux demandes de segments spatialement et socialement différenciées, dans le cadre de nouveaux quartiers, en quelque sorte 58 .
Les décideurs publics et les responsables catholiques semblent ainsi opérer, dans leurs sphères d’action respectives : des redécoupages au sein du territoire national ou infranational sur la base d’une évaluation de l’efficience différentielle des unités territoriales. Ils ne procèdent pas de manière volontariste et brutale continues mais par des corrections successives, des ajustements, réagencements, de modifications ou de simples recompositions d’éléments déjà en place. Si la décentralisation est une nouvelle manière « d’être l’Etat », dictée par de nouvelles dynamiques sociales et politiques et mettant en œuvre de nouvelles modalités de la régulation sociale, la transformation de l’architecture organisationnelle de l’Eglise, prenant elle, en compte, l’état actuel des ressources religieuses et la capacité de mobilisation des fidèles, est une façon « d’être l’Eglise ». Le renforcement du diocèse et la réémergence de la paroisse en sont les traductions majeures.
A l’échelle nationale, l’étude de la lente mise en place des lois de décentralisation, dites lois Deferre, actualisées par le gouvernement en place actuellement, montre que la recomposition des missions de l’Etat ne se fait plus au départ de Paris mais des territoires 59 .
La nouveauté tient que dans une structuration globale qui n’est plus verticale mais pas horizontale pour autant ; où la ligne est moins pertinente que le cercle, les frontières moins nettes que les chevauchements et enfin la diversité plus marquée que l’unité, c’est l’incertitude qui prévaut. Cette même incertitude difficile à gérer, nécessite de produire des politiques « constitutives » et non plus réglementaires, ce qui trouble les institutions.
ION J & MICOUD A, 1980, p83-96, in « La commune entre l’Etat et le quartier- quelques notes sur l’évolution des types de légitimation de la pratique municipale » Espaces et sociétés n° 34-35, juillet - décembre
DURAN P & THOENIG JC, 1996, « L’Etat et la gestion publique territoriale » Revue Française de science politique. N°46