I. Le territoire, un espace à géométrie variable…

Thème et champ d’étude de la géographie par excellence, le territoire reste indéfinissable 71 . En effet, il n’est pas défini par un contenu unique, par une seule forme d’expression. Il associe représentation et connaissance, il est protéiforme. C’est le fruit des imaginations et des appropriations collectives. L’ Eglise et les communautés paroissiales le façonnent dans le sens où « l’espace devient un territoire quand le groupe le délimite, en fait son lieu de référence, de reproduction, de vie 72  ». Le territoire n’est donc pas figé, en perpétuelle construction. Il naît des activités et des représentations sociales, s’étend, se distend, s’invente au quotidien par les pratiques qui s’y exercent. Le même territoire revêt différentes appellations et l’Eglise n’en est qu’un acteur, parmi d’autres. Se juxtaposent donc le territoire des géographes, des sociologues, de la pastorale religieuse, de l’économie, de la politique, tous sur un même espace mais qui s’identifient et se différencient. Chacune de ces conception du territoire est propre aux champs d’études, aux méthodes et concepts de ces sciences et permettent une analyse plus fine d’une réalité en étant croisées. Par exemple, les caractéristiques démographiques et économiques participent à l’organisation et la définition sociologique du territoire.

Ainsi, dans le domaine religieux, la faible démographie des zones rurales induit une pastorale renouvelée et la concentration de populations dans l’urbain empêche de penser de manière uniforme l’organisation de l’Eglise (opposition centre périphérie, urbain, périurbain).

Le territoire n’est donc en aucun cas uniforme. L’institution religieuse a la tâche de refléter un territoire marqué par l’unité de l’Eglise catholique mais aussi par la diversité –locale et globale- des expériences de foi des hommes et des femmes qui la composent. Alors, fort de ce principe, comment aujourd’hui l’Eglise peut-elle et doit-elle dans la recomposition des paroisses prendre en compte ces nouvelles données ? Telle a pu être une des interrogations majeures à laquelle furent confrontés les acteurs de cette recomposition à Saint Etienne. Mais ces interrogations ne sauraient se limiter au domaine purement religieux et les dépassent. L’Eglise catholique doit donc prendre en compte toutes les caractéristiques de la société moderne et les mettre en lien direct avec son activité : comment les paroisses nouvelles peuvent-elles intégrer l’accroissement des déplacements des populations ? Et plus généralement, quelles places leurs accordés dans l’organisation pastorale ? Comme la mobilité est présentée comme le trait majeur des comportements sociaux, faut-il baser toute recomposition sur ce phénomène ou n’en faire qu’une dimension ?
Dans le processus généralisé de « zapping paroissial » ou de « bricolage du religieux », par quels outils favoriser l’insertion pastorale ? Le but étant de faire de ces fluidités déclinées à l’infini, des atouts futurs pour une forte lisibilité et viabilité de l’Eglise.

Réinventer le principe de proximité qu’est une structure d’Eglise nécessite des outils et des analyses extérieurs. Des critères tels que les zones de chalandises, bassins d’emplois, morphologie urbaine, typologie des quartiers, indicateurs statistiques, peuvent apparaître comme de bons indicateurs des micros sociétés locales composants la mosaïque sociale d’une agglomération comme Saint Etienne.

Notes
71.

Se reporter aux nombreux travaux sur ce thème et notamment ceux réunis par Roger BRUNET dans la collection « Mappemonde », aux éditions Belin.

72.

LARAMEE A, 1995 p 60 Communication, territoire et identité : un ancien regard sur les NTIC, in « Sciences de la société » n°35 mai, p 55-69