II…lieu de vie, lieu de socialisation

L’espace et le temps forment pour chaque individu un binôme qui le marque profondément. Les territoires s’organisent en cercles concentriques et sont les lieux de références de l’identité. La chambre, les pièces d’une maison ou d’un appartement, le quartier, la ville, le pays…. Tous ces territoires marquent les déplacements, les relations, le développement personnel et collectif de chaque individu. Mais ils sont aménagés – en quelque sorte- par l’empreinte et l’identité de celui-ci. Pour chacun, le territoire est aussi une représentation que l’individu se fait des évènements importants de son existence, où se côtoient l’instant et la durée. C’est grâce à ce subtil jeu de relations entre les espaces et les temps que les individus se socialisent, deviennent des être capables d’actions et de relations.

« Nous ne sommes plus dans une société rurale marquée par l’ordre éternel des champs, nous sommes dans un monde où un seul aspect est permanent : le changement » affirmait un prêtre dans un entretien. On en arrive à une composition très personnelle de ses territoires et de ses réseaux. Pour tenter de suivre et d’améliorer – dans l’absolu- les comportements individuels et les conduites collectives, l’Eglise aménage les structures de l’espace et du temps : « Les évolutions démographiques et les changements de forme de pratique religieuse poussent à redéfinir des territoires où les communautés chrétiennes soient à la fois vivantes, dynamiques et missionnaires », poursuivait le même prêtre. Aujourd’hui, les repères d’espace et de durée ne sont plus les mêmes pour tous. Il n’y a plus de groupes homogènes partageant ces repères. Ceux ci se diluent, les liens sociaux se délitent et dans l’aménagement du territoire tout comme dans le découpage des nouvelles communautés chrétiennes, ce sont autant de défis à relever.

Dès lors, une interrogation émerge : comment l’Eglise peut arriver à articuler ces dimensions d’espace et de temps dans la pastorale ? Le constat de la situation se résume en quatre points essentiels :

Ces constatations offrent plus de pertinence aux interrogations proposées au début de cette partie. Tout d’abord, qui a le pouvoir de définir le territoire pertinent qui doit servir de base à la réorganisation pastorale et sur quels critères ? La réponse est clairement l’évêque et son équipe qui à travers les orientations diocésaines ou un synode, promulgue la création des paroisses nouvelles Ces « relations locales » nouvelles et clairement identifiées, sont-elles le lieu de reconnaissance sociale, d’appartenance par l’activité, le lieu d’enracinement par l’habitat, le lieu où s’exerce la solidarité entre des individus et des groupes ? Selon les choix de critères, les territoires ne sont pas les mêmes

Comment dans la réorganisation pastorale – en ce qui nous concerne- tenir compte des trois fonctions principales de l’Eglise : l’annonce de l’évangile, la sacramentalisation et la solidarité entre les communautés et les individus ? Dans l’approche du territoire pertinent, et sans prétendre tout régenter, comment articuler des synergies entre une pastorale de vie locale, la paroisse et une pastorale plus fonctionnelle, de réseaux ( communautés, mouvement, regroupements…), avec une prise en compte des nouvelles mobilités et la pluralité de celles-ci. Tout changement des conduites collectives et des mentalités prend du temps et génère des tensions, voire des conflits. La question étant : comment impulser une dynamique territoriale qui ne fasse pas l’impasse sur ces conflits et prenne le temps des concertations ?