III.. Paroisses nouvelles, bassins de vie : une difficile superposition

Sans faire acte de divination, il est probable que le bilan en cours d’élaboration va certainement reconduire à certaines modifications territoriales et fonctionnelles. Les regroupements ne semblent pas avoir été réalisés et en tout cas vécus avec le même enthousiasme et la même adéquation territoriale. Si une paroisse comme Bienheureux Antoine Chevrier illustre à merveille ce concept missionnaire, d’autres montrent des regroupements non adaptés comme Sainte Blandine. Une troisième, Saint Vincent de Paul mérite que l’on s’y attarde de part son héritage et sa réalité sociologique.

L’ensemble composé des anciennes paroisses de Villars, la Terrasse et St Priest donne une image de dynamisme. Les raisons sont multiples. Comme le soulignait le curé en charge de cet ensemble, JM.Guillemot, le « terrain a déjà été travaillé ». Villars et La Terrasse formaient un ancien secteur et le caractère « espace de transit » de la Terrasse a limité la guerre des clochers que nous avons constatés ailleurs. Nous sommes en présence d’une paroisse nouvelle très dynamique, portée à bout de bras par la Communauté de l’Emmanuel où est développée avec force, une vie communautaire autour de fêtes paroissiales régulières. L’équipe pastorale est à l’écoute des demandes et propose des réponses adaptées. L’aumônerie scolaire est le fer de lance de cette paroisse nouvelle modèle.

A l’inverse une paroisse comme Sainte Blandine apparaît comme le contre exemple parfait, l’illustration de l’incapacité et l’impossibilité d’adapter l’Eglise à la géographie religieuse et sociale actuelle. Composée de trois ensembles assez autonomes, elle demeurait cependant celle où le travail de recomposition allait être le plus difficile. Terrenoire et Saint Jean Bonnefonds demeurent des communes, pour ne pas dire des villages. Malgré sa fusion avec Saint Etienne, Terrenoire reste une limite ou une entrée de ville dans l’imaginaire collectif et les habitants sont peu enclins à se déplacer en centre ville ou en périphérie. C’est un ensemble opposant un centre où la vie est celle d’un quelconque village et une couronne périphérique de résidences pavillonnaires. Chaque relais tend à sauvegarder au maximum son identité paroissiale. Dernière réalité alarmante pour l’équipe pastorale et les instances diocésaines, la pratique y est très faible, 4% (population de 28OOO habs) et en constant recul.

Les autres paroisses nouvelles de l’agglomération stéphanoise ont des situations moins contrastées et composent un vaste ensemble où la recomposition est vécue de manière globalement positive. Cependant, il paraissait intéressant de compléter notre étude par l’analyse de la paroisse nouvelle St Vincent de Paul.

Composé des deux ensembles de Montreynaud et le Soleil, elle ressemble à une « Tour de Babel ». Les caractéristiques sociologiques et urbaines conditionnent la réussite de la recomposition bien plus que la religiosité. Cette vaste paroisse, à l’image sociale très négative, est une mosaïque de communautés qui elles ont adoptées depuis fort longtemps un fonctionnement religieux et social communautaire.

Les communautés Polonaise (liée au passé minier et industriel de la région stéphanoise) et Vietnamienne ( boat people et la présence d’un frère mariste, Trân Công Lao)) y sont présentes et possèdent leurs lieux de réunions et fonctionnent de manière autonomes. L’équipe pastorale tente de relever le défi auquel le père Riffard, en charge de cette paroisse est confronté et formulait de la sorte : « celui de vivre ensemble avec des cultures différentes et pour notre Eglise, de l’ouverture à ceux qui sont les plus petits et les plus pauvres pour qu’ils soient chez eux ». C’est une pastorale de partage, de contact qui est mise en œuvre et l’accent est mis sur une attention sociale bien plus qu’une attention aux taux de pratiques ou de déplacements des populations. L’Eglise compense les carences des institutions civiles et publiques aux travers de différentes associations comme Anticyclone (lieu d’échange, de soutien aux populations étrangères de l’agglomération) et CABA (collectif accueil budget alimentation) qui agit en proposant aux familles en difficulté un pacte social : échange de produits alimentaires aux coûts moins élevés en échange d’un montage de projet d’insertion et d’un suivi assidu de réunions d’informations et d’animations citoyennes.

Ces observations mériteront d’être comparées à celles que ne manqueront pas de faire les instances diocésaines lors du bilan de la recomposition paroissiale conduite sur le diocèse de Saint Etienne. Quoi qu’il en soit, les remodelages territoriaux qui s’en suivront, seront d’ordre structurels, poussant certainement vers certaines nouvelles fédérations. L’objectif majeur ne nous a pas semblé être une simple adaptation des territoires à la démographie du clergé mais bien une manière de vivre l’Eglise dans le contexte de la modernité par une dynamique de reconquête missionnaire.