II. Pèlerinages, structuration sociale et territoriale

Dans une approche géographique et sociale de l’étude des pèlerinages, il est nécessaire de souligner les diverses formes de groupes sociaux mobilisés, de cerner en quoi cette religiosité, concourt à l’organisation ou à la structuration de la vie sociale et religieuse, à quelles échelles. Mais là aussi, les modalités de pèlerinages sont nombreuses, cette religiosité est plurielle. Certaines manifestations s’adressent à l’ensemble de la population catholique, d’autres relèvent de mouvements catégoriels. Mais, pour de simples raisons de « logistiques », les sanctuaires les plus rassembleurs accueillent des groupes et des catégories qui se succèdent sans forcément se rencontrer. L’architecture de cette organisation a été éclairée et il semble possible d’opposer cinq strates pèlerines ou nous retrouvons des populations du diocèse de Saint Etienne :

En posant l’hypothèse que le pèlerinage, quel qu’il soit, est une manifestation sociale –religieuse, hors de l’espace de référence de la communauté paroissiale ou de l’espace vécu –local, hors des temps de l’activité et de la liturgie ordinaire, on se doit d’examiner les caractéristiques de la démarche des individus, des groupes et collectivités, des communautés mobilisées. Cela revient à articuler la thématique pèlerine avec l’individualisation des pratiques religieuses et par conséquent, la production de modalités territoriales pour les satisfaire. Les études conduites sur les comportements pèlerins à Saint Etienne, permettent d’en dégager trois :

Comme pour n’importe quel travail de terrain, on aimerait se référer à des enquêtes où l’on puisse quantifier et donc différencier la nature des fréquentations des sanctuaires. Elles ne sont pas très nombreuses pour les pèlerinages catholiques, peut-être pour éviter de montrer une foule foncièrement partagée entre les curieux, les touristes et les pèlerins.

Le pèlerinage apparaît bel et bien comme une expérience individuelle, une transformation. Toutefois, l’éminence du caractère collectif ne peut être occultée. La reconnaissance n’est pas celle d’un individu mais d’un groupe venant de tel endroit, envoyé d’une telle paroisse, relevant de tel mouvement. Tout cela pour dire qu’en réalité, la distinction entre pèlerinage individuel et mouvements de groupes est difficile à effectuer.

A partir de ces quelques indications, il est possible d’identifier trois formes principales de groupes sociaux participant aux pèlerinages. Tout d’abord les communautés catholique et hiérarchique : paroisses, secteurs paroissiaux, diocèses. Les communautés « classiques » de l’Eglise se retrouvent et se renforcent au travers du prisme de l’expérience commune qu’est le pèlerinage. Puis, se mobilisent les communautés d’Eglise plus partielles, plus électives (groupes, mouvements, fraternités…) qui ne peuvent, à l’occasion de ce cheminement commun, que renforcer leur singularité vis-à-vis des autres et leur cohésion interne. Enfin, des mouvements d’essence plus laïque, de catégories, d’anciennes corporations qui trouvent dans cette expérience, une ou plusieurs dimensions de cohésion.