Il convient maintenant de délimiter une approche de la motivation à même d’être appliquée à notre contexte d’apprentissage et au sein de laquelle nous étudierons la manière dont elle naît, se développe et agit sur les comportements.
On peut distinguer plusieurs niveaux d’analyse dans l’étude de la motivation ; ces niveaux correspondent aux différentes approches selon lesquelles on peut étudier un phénomène. R. J. Vallerand et E. E. Thill (dans Vallerand, 1993 : 34) distinguent trois niveaux d’analyse : le niveau biologique, le niveau de l’organisme et le niveau social.
Il ne paraît pas pertinent de nous pencher sur les forces d’origine physiologique qui ne sauraient être suffisantes pour rendre compte des comportements d’apprentissage ; nous laisserons donc de côté l’approche biologique et nous nous tournerons vers le niveau de l’organisme et les approches qui s’intéressent aux forces d’origine psychologique de la motivation.
L’approche béhavioriste (ou comportementaliste) met l’accent sur les stimuli extérieurs et néglige ainsi d’étudier les forces internes à la personne,. L’approche psychodynamique (de la psychanalyse) met l’accent sur les forces inscrites dans l’inconscient des personnes (Vallerand et Thill dans Vallerand, 1993 : 13 et 37). Cette approche stipulant que les déterminants de la motivation relèvent de l’inconscient ne semble pas pertinente à développer dans le cadre des comportements d’apprentissage.
En revanche, l’approche humaniste semble pouvoir nous intéresser davantage. Elle assume que le comportement humain serait motivé par un besoin persistant qu’éprouverait chacun de sentir qu’il est compétent et qu’il est l’origine de ses propres actions (Vallerand et Thill dans Vallerand, 1993 : 38).
Cette approche entretient des relations étroites avec l’approche cognitive dont le postulat sous-jacent est que l’individu a une curiosité et un besoin de développement naturels, une motivation inhérente (postulat partagé avec l’approche humaniste). Ainsi, l’objet principal des théories cognitives n’est pas d’étudier ce qui motive l’individu, mais comment il gère sa motivation inhérente 6 (Dörnyei (a), 2001: 20).
Ces théories assument que le déterminant premier de la motivation se situe à l’intérieur du champ de conscience de la personne ou de ses cognitions, et que la plus grande partde la motivation humaine est d’origine cognitive. Les chercheurs qui se situent dans des perspectives cognitives, sociales et humanistes estiment que les cognitions peuvent être accessibles à la conscience et qu’elles jouent un rôle important dans le comportement humain (Vallerand et Thill dans Vallerand, 1993 : 37 et 23-24).
Parmi les fonctions cognitives de l’organisme, cette approche se concentre principalement sur les représentations conscientes qui sont dans notre esprit (informations, idées, connaissances, opinions, croyances, etc. sur nous-même, sur notre propre comportement, sur notre environnement social ou sur notre environnement physique) (Vallerand et Thill, 1993 : 402). Les comportements humains, et plus particulièrement, les comportements d’apprentissage seraient déterminés par des représentations qui guident ces comportements, les sélectionnent en fonction des possibilités d’atteindre des buts et leur confèrent une certaine cohérence. Dans cette perspective, l’étude de la motivation s’est concentrée sur le rôle des différents types de cognitions, tels que les attentes, les attributions et l’inconsistance (Vallerand et Thill dans Vallerand, 1993 : 37).
Ainsi, selon le dictionnaire de le psychologie, on qualifie de cognitives les motivations qui sont à l’origine des activités dans lesquelles le mécanisme de traitement de l’information a une place prépondérante. Ainsi, l’approche cognitive est particulièrement appropriée pour traiter des activités d’acquisition de connaissance et des activités qui mettent en pratique des connaissances et des croyances personnelles (Bloch and Co., 1997 : 795).
R. J. Vallerand et E. E. Thill soulignent qu’il existe une relation étroite entre les théories cognitives et sociales car c’est très souvent l’interprétation cognitive du comportement d’autrui qui influence le comportement. Le niveau social d’analyse de la motivation porte sur les influences sociales sur le comportement, le déclenchement, la direction, l’intensité et la persistance des comportements (Fenouillet (a), 2003 : 28). On parle ainsi de théorie sociales cognitives (Vallerand et Thill dans Vallerand, 1993 : 39). Ces théories prennent en compte à la fois les forces d’origine interne et externes à l’individu.
Si d’une façon générale, il semble que les théories sociales cognitives présentent des fondements solides applicables à l’apprentissage, P. H. François souligne plus spécifiquement que ces théories sont d’une grande utilité pour appréhender les phénomènes motivationnels relatifs à la formation dans la mesure où elles rendent compte de phénomènes (tels que la manière dont les cognitions et plus particulièrement, les représentations des individus influencent leur rapport au savoir) tout à fait centraux dans les situations d’apprentissage (François dans Carré, 2002 : 45). En outre, la notion et les pratiques d’autodirection se sont développées parallèlement aux théories sociales cognitives et nous trouvons ainsi des applications des théories sociales cognitives à l’autodirection. Ce sont donc celles que nous retiendrons pour étayer notre réflexion sur les forces qui déterminent le comportement d’apprentissage. Dans cette perspective nous passerons en revue les différentes manières dont les principales théories sociales cognitives abordent la motivation afin de faire état de la question, avant de nous arrêter sur la théorie d’A. Bandura qui constitue le développement le plus récent de ces théories.
Notre traduction.