1.2.2.3. L’attribution

L’attribution dépend du besoin d’éviter le déséquilibre cognitif décrit précédemment. Le processus d’attribution « consiste à émettre un jugement, à inférer ‘quelque chose’, une intuition, une qualité, un sentiment sur son état ou sur l’état d’un autre individu à partir d’un objet, d’une disposition spatiale, d’un geste, d’une humeur » (Moscovici S. (1972), cité par Deschamps dans Vallerand et Thill, 1993 : 437). Les processus d’attribution représentent pour l’individu un moyen d’assurer un contrôle sur son environnement, de maîtriser la réalité en s’en forgeant une connaissance relativement stable. L’attribution est alors le processus par lequel « l’homme appréhende la réalité, peut la prédire et la maîtriser » (Heider F. (1958), cité par Deschamps dans Vallerand et Thill, 1993 : 438). Les raisons que l’on cherche pour expliquer un comportement, un échec ou une réussite sont appelés « attributions causales » par les psychologues sociaux. L’attribution d’évènements passés conditionne les forces qui détermineront les comportements subséquents (Legrain, 2003 : 71).

On distingue l’hétéro-attribution de l’auto-attribution, ou de causalité externe et de causalité interne. La dernière est davantage liée à des situations où un résultat est obtenu dans des actes effectués par choix. Dans le cas de l’attribution d’un succès, elle amène la personne à se sentir compétente et à renforcer son sentiment d’efficacité. Mais dans le cas de l’attribution d’un échec à un manque d’intelligence, elle risque de diminuer dramatiquement le SEP des apprenants. L’autre, la causalité externe, est davantage utilisée pour justifier l’issue d’un événement apparaissant comme négatif (Legrain, 2003 : 71). Mais dans le cas de l’attribution répétée d’un échec au hasard, élément externe incontrôlable, les efforts seront de moins en moins perçus comme un moyen de contrôle sur les résultats. On retrouvera alors le phénomène de la résignation apprise (Legrain, 2003 : 72).

On distingue ensuite les attributions à des causes stables ou incontrôlables sur lesquelles l’apprenant aura peu de chance d’agir des attributions à des causes instables donc modifiables ou contrôlables. Selon Weiner, les attributions à des variables incontrôlables telles que les capacités naturelles découragent les apprenants faiblement autorégulés de poursuivre leurs efforts d'apprentissage. Au contraire, comme le signale B. J. Zimmerman, l'attribution d'un échec à des variables instables et contrôlables (c'est à dire susceptibles d'être modifiées), comme le choix des stratégies ou le manque d'efforts, étayent les efforts d'apprentissage ultérieurs (Zimmerman dans Carré, 2002 : 80-81).

Il semble donc plus motivant d’attribuer une réussite ou un échec à un élément interne contrôlable et instable, tel que les efforts, le fait que l’objectif fixé était inadéquat ou l’utilisation d’une stratégie inadéquate. Cette hypothèse a été confirmée par l’expérience du pédagogue C. Dweck. Ce dernier a formé deux groupes dans une école, le premier n’étant confronté qu’à des exercices qu’ils réussissent et le deuxième, à 20 % d’exercices trop difficiles pour eux et recevant des encouragements et des invocations de causes maîtrisables. Cette expérience a démontré que la réussite est essentielle, mais qu’elle n’est pas tout : il est aussi très important de savoir persévérer suite à un échec et ce savoir-faire est lié aux attributions causales (Legrain, 2003 : 73).Les attributions causales constitueraient ainsi une force d’origine cognitive susceptible de déterminer des comportements postérieurs à une action.