1.3.4. Les influences du SEP

Le SEP intervient dans le modèle EIV (expectation, instrumentalité, valence) de Vromm (voir p.16) et plus particulièrement dans l’expectation ; les résultats que les individus anticipent dépendent de leur jugement de leur capacité à effectuer une performance dans une situation donnée (Bandura, 1986 : 392). En outre, le SEP influe, à travers ce que l’individu se juge capable de faire ou non, sur le choix des objectifs et des actions, la dépense d’efforts, la persistance, le type de pensée (positive versus négative) et les réactions émotionnelles face aux obstacles et finalement, sur les performances. Les résultats de la méta-analyse effectuée par Sadri et Robertson confirment ces corrélations (François dans Carré, 2002 : 37). De plus, François rapporte que la méta-analyse de Multon, Brown et Lent indique que le SEP explique environ 14% de la variance des performances académiques des apprenants. Il indique en outre que le niveau de SEP par rapport à certaines activités académiques est en rapport positif avec le choix des activités ainsi qu’avec la quantité d’efforts et la persistance dans ces activités (Zimmerman dans Carré 2002 : 46).

Les recherches sur les effets du SEP sont résumés par Bandura comme suit : les personnes qui ont un faible SEP dans un domaine particulier évitent les tâches difficiles. Elles ont des niveaux faibles d’aspiration et une faible implication par rapport aux buts qu’elles ont choisis. Elles diminuent leurs efforts et abandonnent rapidement face aux difficultés. Elles attribuent leurs échecs à une déficience d’aptitude. Au contraire, un SEP élevé augmente les accomplissements. Les personnes qui ont un SEP élevé considèrent les difficultés comme des paris à réussir plutôt que comme des menaces à éviter. Cela renforce leur intérêt intrinsèque et leur implication dans les activités. Ces personnes se fixent des buts stimulants et maintiennent leurs efforts face aux difficultés ; elles attribuent leurs échecs à des efforts insuffisants ou à un manque de connaissances ou de savoir-faire qui peut être acquis (Bandura, 2003 : 66).

Dans l’ensemble théorique que représente la théorie sociale cognitive, les croyances relatives à l’efficacité personnelle sont considérées comme régulant le fonctionnement humain selon quatre ensembles principaux de processus qui opèrent conjointement : le cognitif, le motivationnel, l’affectif et le sélectif.

Le cognitif : Le SEP, lui-même constituant une cognition, intervient dans les processus cognitifs au niveau des standards ou références personnelles qui permettront d’estimer dans quelle mesure un but est atteint. SEP et standards personnels se déterminent réciproquement : la satisfaction pour avoir respecté ou dépassé un standard personnel alimente le SEP ; en retour, un SEP élevé favorise la fixation de standards exigeants. Le SEP intervient donc au niveau de la pensée anticipatrice (Bandura, 2003 : 181).

L’affectif : Le SEP intervient au niveau du type de pensée et des réactions émotionnelles des individus, c’est à dire au niveau des états d’humeur qui influencent la manière dont les évènements sont interprétés, organisés cognitivement et remémorés (Bandura, 2003 : 242). Ceux qui se jugent inefficaces ont tendance à se laisser envahir par des sentiments négatifs, ce qui a pour effet de diminuer l’efficacité perçue et d’empêcher l’utilisation de leurs compétences. Au contraire, l’humeur positive augmente l’efficacité perçue, ce qui facilite la régulation des états affectifs 14   (Bandura, 1986 : 394 et Bandura, 2003 : 242).

La sélection : Enfin, le SEP peut avoir un effet au niveau des choix des types d’activité et des objectifs que fait l’individu (François, dans Carré, 2002 : 40). En général, les individus ont tendance à éviter les tâches et les situations pour lesquelles ils ne pensent pas avoir les capacités nécessaires, et ils choisissent celles dans lesquelles ils pensent avoir les capacités suffisantes pour faire face 15 (Bandura, 1986 : 393). 

Le motivationnel : Le SEP constitue une des forces qui déterminent les trois principales caractéristiques de la motivation : la sélection, l’activation et la direction soutenue du comportement vers certains buts (Bandura, 2003 : 346). Il intervient par la pensée anticipatrice qui précède l’action et se façonne par la pensée rétrospective pour intervenir à nouveau dans la pensée anticipatrice … (Bandura, 2003 : 189). A travers les réactions auto-évaluatives, l’efficacité perçue à atteindre un but et l’ajustement des critères personnels, le SEP contribue à déterminer la quantité d’effort que les individus fournissent face à des obstacles, un SEP élevé favorisant la persévérance face aux difficultés 16  (Bandura, 1986: 394). Comme l’illustre le schéma suivant, A. Bandura résume l’action des forces d’origine cognitives dont le SEP constitue le vecteur le plus puissant (Bandura, 2003 : 58) par leur intervention au niveau de la pensée anticipatrice et de la pensée auto-réflexive.

Résumé schématique de la manière dont la motivation cognitive agit sur le comportement
Résumé schématique de la manière dont la motivation cognitive agit sur le comportement Inspiréde la “représentation schématique de la motivation cognitive basée sur les buts, les attentes et les attributions causales,” d’après Bandura, 1997 Self-Efficacy ; the Exercise of Control. New York : Freeman, p.123, utiliée par François dans Carré, 2002 : 39.

La théorie sociocognitive pose ainsi que les représentations que se forment les personnes sur leur capacité potentielle à réussir ou à faire face à des situations influencent sensiblement leurs comportements (Bandura, 2003 : 19). Ces représentations constituent des forces d’origine cognitive qui agissent à travers la pensée anticipatrice et se développent par la pensée et les réactions rétrospectives.

B. J. Zimmerman a identifié trois phases d’autorégulation qui découlent de la théorie d’ A. Bandura : la phase d’anticipation, la phase d’action et la phase d’autoréflexion.

Notes
14.

Notre traduction.

15.

Notre traduction.

16.

Notre traduction

17.

Inspiréde la “représentation schématique de la motivation cognitive basée sur les buts, les attentes et les attributions causales,” d’après Bandura, 1997 Self-Efficacy ; the Exercise of Control. New York : Freeman, p.123, utiliée par François dans Carré, 2002 : 39.