La première clôture

L’impuissance du langage à tout dire apparaît dans les deux clôtures et est ici souligné par l’instance narrative qui signale l’inadéquation du langage au sens, “it was beyond words now” (p. 389).

Le décentrement de Charles se fait également par la chute du regard, qui est le regard du voyeur comme nous l’avons constaté dans le premier chapitre : “Something in Charles faltered. His eyes fell.” (p. 389). Ainsi chute, dans l’homophonie “I/eye”, la position subjective de maîtrise que Charles tentait d’imposer. Dans le silence qui s’ensuit ce qui surgit est lalangue sous forme de l’enfant, l’infans, au prénom inhabituel de Lalage, dont Charles nous dit l’origine et la signification : “It is Greek. From Lalageo, to babble like a brook.” (p. 392). Le terme “babble” en anglais évoque le bruit du ruisseau mais également le babil, la langue privée de sens de l’enfant. Le langage articulé est en échec et nous ramène à une langue plus proche de la jouissance.

La chute du regard de Sarah signale l’absence d’intention, de maîtrise de sa part. :

‘(…) then her eyes came to rest on Charles’s feet. She could not look him in the eyes. (p. 392)’

Lorsqu’elle lève les yeux son regard est dépouillé, “unbearably naked” (p. 393) et le lien entre les deux protagonistes se fait dans l’absence de parole et sans vision possessive, “in this blind silence” (p. 393). L’aveuglement marque la castration symbolique qui s’opère. A la question de Charles qui s’interroge sur son incapacité à comprendre, Sarah elle ne profère aucune parole qui puisse faire lien de dialogue mais fait un geste de dénégation :

‘‘Shall I ever understand your parables ?’
The head against his breast shakes with a mute vehemence. (p. 393)’

Ainsi cette clôture, loin d’apporter une fusion qui réduit l’énigme de Sarah, la laisse sans réponse. Le geste de dénégation qui signale la non-conjonction se double du geste de l’enfant qui apporte un bémol à cette fin qui semble trop parfaite :

‘And Lalage, as if brought by the merciful silence to reflect on the aesthetics of music and having reflected, to bang her rag doll against his bent cheek, reminds her father – high time indeed – that a thousand violins cloy very rapidly without percussion. (p. 393)’

Le verbe “cloy” en anglais qui signifie rassasier étymologiquement signifie « obstruer » et laisse entendre que quelque chose de la lalangue ne permet pas que la béance soit entièrement obscurcie.