E.1.a. Les Potentiels Evoqués

La technique des Potentiels Evoqués, utilisée dans le domaine cognitif depuis une trentaine d'années, est employée pour déchiffrer la chronométrie des processus de traitement du langage (Näätänen, 1987; Segalowitz and Chevalier, 1998). Cette technique est basée sur un enregistrement de l’ElectroEncéphaloGramme (EEG), mis au point en 1929 par Hans Berger. Les potentiels évoqués (PE) ou Event-Related Potentials (ERPs) sont des fluctuations électriques (de l’ordre du microvolt) recueillies à la surface du scalp, et résultant de l'activité électrique neurale sous-jacente (Guerit, 1998). Ils peuvent être définis comme les modifications de l'activité électrique cérébrale consécutives à l'application d'une stimulation. La moyenne des mesures lors d'essais successifs permet d'extraire la réponse évoquée par une stimulation en s'affranchissant de l'activité électrique spontanée indépendante de la stimulation (bruit physiologique).

La technique consiste en un enregistrement de l'EEG qui reflète les variations de potentiels de membrane des cellules pyramidales du cortex. Les signaux obtenus sont une succession de différentes composantes (ou ondes) désignées par leur polarité (N = négative et P = positive) suivie d'un nombre qualifiant ou bien leur ordre d'apparition (1, 2...) ou bien leur latence moyenne – en millisecondes – chez les sujets "normaux" (180, 300...) (voir la figure 1.11). Selon le type de stimulation, ces composantes peuvent varier en latence 27 et en amplitude. L'analyse de ces différentes caractéristiques permet l'étude dynamique du fonctionnement cognitif. Il faut cependant noter que ces composantes sont observées à la surface du scalp. Compte tenu de la diffusion des courants dans la boîte crânienne, il n'y a pas nécessairement de correspondance entre un maximum de potentiel en surface et l'activité du cortex sous-jacent.

Figure 1.11 : Amplitude des différences de potentiels enregistrées, au cours du temps, à la surface du scalp. Représentation des principaux évènements (P1, N1, P2, N2, P3) des PE visuels, pour 4 électrodes médianes (Fpz, Fz, Cz, Pz). Les potentiels négatifs sont orientés vers le haut (Segalowitz and Chevalier, 1998).
Figure 1.11 : Amplitude des différences de potentiels enregistrées, au cours du temps, à la surface du scalp. Représentation des principaux évènements (P1, N1, P2, N2, P3) des PE visuels, pour 4 électrodes médianes (Fpz, Fz, Cz, Pz). Les potentiels négatifs sont orientés vers le haut (Segalowitz and Chevalier, 1998).

L’enregistrement des variations de potentiel électrique se fait au moyen de 32, 64 ou 128 électrodes (capteurs), réparties sur un bonnet selon le système conventionnel 10-20. L’équipement d’enregistrement étant constitué d’un bonnet d’électrodes, il est relativement peu coûteux et donc très répandu. La technique des Potentiels Evoqués étant utilisée dans les études que nous présenterons par la suite, nous la présenterons de manière plus détaillée dans le chapitre 3.

Notes
27.

Contrairement à ce que semble indiquer le terme, et contrairement à son utilisation en électrophysiologie cellulaire, la latence ne désigne pas le délai d’apparition du phénomène mais celui de son maximum (valeur temporelle au maximum d’amplitude du pic)