E.6. Course temporelle du traitement de stimuli langagiers

L’étude de la chronométrie des processus cognitifs liés à la lecture est un travail délicat, puisque de nombreux traitements, très variés et hautement spécialisés, opèrent en parallèle. Comme le soulignent Sereno & Rayner, le temps de fixation d’un mot au cours de la lecture, avant qu’il n’y ait saccade, est en moyenne de 250 ms (Sereno and Rayner, 2000). Ainsi, la perception visuelle d’un mot, ainsi que la majorité des traitements qui lui sont associés (phonologiques, sémantiques…) doivent être réalisés en 200 ms environ (Posner et al., 1999; Sereno and Rayner, 2000). Seulement, la conception classique concernant la temporalité de la reconnaissance de mots est que les 200 premières millisecondes après présentation du stimulus ne sont destinées qu’aux traitements sensoriels et perceptifs dans les aires corticales modalité-spécifiques, aires uniquement sensibles aux caractéristiques physiques des stimuli (luminosité, contraste, complexité spatiale…) (Proverbio et al., 2004; Proverbio and Zani, 2003). Il semble malgré tout de plus en plus évident que ce genre de stimuli peut être reconnu et catégorisé dans les 150 premières millisecondes, et que des influences ‘top-down’ de haut niveau peuvent intervenir, et se coupler aux effets purement sensoriels de type ‘bottom-up’.

Nous allons passer en revue les composantes typiques des Potentiels Evoqués (PE) et de la MEG, et leurs fonctions associées : Il existe deux composantes sensorielles dont la distribution topographique varie en fonction de la modalité sensorielle (distribution temporale en modalité auditive, occipitale en modalité visuelle) : la P1 et la N170 32 . D’autres composantes reflétant des traitements de haut niveau sont régulièrement étudiées, dont les principales sont la P300 pour les effets attentionnels, la N400 pour les effets sémantiques et la P600 pour les traitements syntaxiques. Nous ne nous intéresserons, pour cette présentation de l’état de l’art en électrophysiologie, qu’aux données sur la reconnaissance visuelle de mots, l’exclusivité de nos travaux en Potentiels Evoqués ayant été réalisée en modalité visuelle.

Notes
32.

Nous donnerons le nom des ondes selon la terminologie de l’EEG (N ou P), sachant que les mêmes ondes peuvent être obtenues en MEG, désignées alors avec la lettre ‘M’.