B. Dyslexie et effets "Top-down" lexicaux

B.1. Introduction

L’expérience basée sur le paradigme de Reicher-Wheeler – présentée au chapitre 4 – nous a permis de définir la course temporelle des effets "Top-down" lexicaux au cours d’une tâche d’identification de lettres, ainsi que leur dépendance au facteur de temps de présentation des items : l’évènement électrophysiologique P1 est indépendant du contexte lexical et du temps de présentation (TP) des stimuli. Les effets lexicaux ont leur première incidence sur le tracé électrophysiologique au niveau de la N1, qui est plus ample en contexte ‘Mot’ que ‘Non-mot’, uniquement pour un TP de 66 ms. Cet effet "Top-down" facilitateur influençant l’amplitude moyenne de la N1 est majeur lorsque la lettre à identifier est au centre du mot, plutôt qu’aux extrémités.

Deux autres résultats importants ont été obtenus : il semble qu’un traitement lexical ait lieu, dans le contexte ‘Mot’ pour les deux TP, bien que la tâche soit explicitement d’identifier une lettre cible sans lire la totalité de la séquence de lettres. Enfin, le temps de catégorisation des stimuli est influencé par la lexicalité (les non-mots sont catégorisés plus vite que les mots) et par le TP (la catégorisation des deux types de stimuli est plus rapide pour un TP plus long).

En se basant sur les résultats obtenus dans cette étude par les sujets normo-lecteurs, ainsi que sur les connaissances publiées antérieurement sur ‘électrophysiologie et dyslexie’ (voir chapitre 1 ; paragraphe E.7), nous avons pu émettre un certain nombre d’hypothèses quant aux résultats attendus chez des sujets dyslexiques réalisant la même étude : les rares études publiées sur le ‘Word Superiority Effect’ testé chez des sujets dyslexiques révèlent qu’aucun WSE n’est observé dans les données comportementales des dyslexiques (Chase and Tallal, 1990; Grainger et al., 2003) 48 . Nous nous attendons donc à n’observer aucun WSE sur les résultats comportementaux des sujets dyslexiques.

De plus, nous supposons que l’absence de WSE dans les données comportementales reflète un déficit dans les effets "Top-down" lexicaux facilitateurs. Nous supposons donc qu’aucun effet de lexicalité ne sera observé sur l’amplitude de la N1 chez les sujets dyslexiques.

Notes
48.

Ces deux études révèlent qu’aucun WSE n’est observé dans des populations d’enfants dyslexiques. Nous ne pouvons pas réellement comparer ces résultats à notre étude réalisée chez des sujets dyslexiques adultes. Pourtant, nous utiliserons ces observations comme bases de nos hypothèses puisque aucune étude sur le WSE chez des sujets dyslexiques adultes n’a été publiée à ce jour, à notre connaissance.