Effets "Top-down" et "Bottom-up" influençant le stade de traitement des lettres d’une séquence linguistique.

L’onde N1 – reflétant le stade de traitement des lettres d’une séquence – est dépendante (1) du temps de présentation des séquences, de la position du regard dans la séquence et du soutien de l’attention. Elle est aussi dépendante (2) de la pré-activation du lexique mental, mais uniquement pour des temps de présentation suffisamment élevés, et une position optimale du regard dans la séquence. De plus, elle est influencée par la pré-activation du lexique mental, lorsque l’attention sélective est portée sur la catégorie linguistique des mots, uniquement s’il y a eu amorçage du traitement lexical et de la mémoire de travail.

(1) L’évènement N1 est retardé et moins ample si le temps d’exposition des stimuli linguistiques est augmenté. Dans un autre contexte expérimental, il est aussi retardé et moins ample lorsque les stimuli sont vus passivement, sans traitement volontaire. Dans les deux cas, le traitement est moins ‘coûteux’, que ce soit parce qu’il est facilité par un temps d’exposition plus long ou que ce soit parce qu’il n’implique aucune attention de la part du sujet.

Bien que fortement dépendant des facteurs temporels et attentionnels, ce traitement est tout de même automatique. En effet, sans aucun soutien d’attention de la part du sujet, le traitement des lettres de la séquence est tout de même réalisé.

(2) La pré-activation du lexique mental peut influencer la reconnaissance visuelle d’un mot isolé dès le stade de traitement des lettres du mot. Mais il faut noter encore l’importance des conditions expérimentales : cet effet "Top-down" facilitateur semble ne pouvoir être significatif qu’avec des temps de présentation des mots suffisamment longs (effet observé pour 66 ms de temps de présentation, pas pour 50 ms), et que pour une position optimale du regard dans le mot (proche du centre du mot). Les effets "Top-down" lexicaux facilitateurs permettent alors de renverser les effets "Bottom-up" de position de regard : une lettre en position centrale d’une séquence est difficilement identifiable si l’on ne tient compte que des effets "Bottom-up" de position de regard. L’ajout d’effets "Top-down" lexicaux rend, à l’inverse, cette position la plus favorable à l’identification de lettre.

Dans d’autres conditions expérimentales, nous avons observé que cet effet facilitateur n’était significatif qu’avec amorçage préalable du traitement lexical en mémoire de travail (du fait du traitement antérieur et du stockage en mémoire de travail d’une autre séquence de lettres).

Ces observations particulières peuvent expliquer pourquoi les effets lexicaux sont observés dans les différentes études publiées dans la littérature aussi bien 150 ms après stimulation (Proverbio et al., 2004; Sereno et al., 1998), que uniquement 500 ms après (Polich and Donchin, 1988).

Par ailleurs, nous observons dans l’étude des effets "Top-down" lexicaux que l’onde N1 est significativement plus ample lorsque les sujets voient des mots plutôt que des non-mots. Ainsi, l’influence "Top-down" du lexique mental faciliterait le traitement des lettres d’un mot, mais pas celles d’un non-mot. A l’inverse, dans l’étude sur les effets "Top-down" attentionnels, l’effet facilitateur de la pré-activation du lexique mental influence de la même manière le traitement des lettres d’un mot ou d’un pseudo-mot. Il semble donc que les effets "Top-down" lexicaux facilitent le traitement d’un mot, ou d’une séquence linguistique orthographiquement proche d’un mot. Ceci confirme l’idée que l’onde N1 reflète un traitement pré-lexical, permettant de différencier les mots des non-mots(Cornelissen et al., 2003; Salmelin et al., 1996), mais pas les mots des pseudo-mots proches orthographiquement (Fiebach et al., 2002; Pammer et al., 2004; Simon et al., 2004).