Neuropathologie et sciences cognitives

La psychopathologie cognitive est un domaine de recherche interdisciplinaire qui se propose d’utiliser les concepts et les méthodes de la psychologie cognitive et plus généralement des sciences cognitives, pour étudier les dysfonctionnements de la cognition qui accompagnent les troubles mentaux.Grâce à une meilleure connaissance de ces dysfonctionnements cognitifs, la psychopathologie cognitive a pour objet de mieux comprendre les états psychopathologiques ainsi que leurs soubassements cérébraux. Elle doit aussi contribuer au progrès des connaissances sur le fonctionnement cognitif normal (langage, mémoire, fonctions exécutives, perception, attention), notamment dans ses relations avec la conscience, l'émotion, le contrôle de l'action, la personnalité, et la communication interpersonnelle et, enfin, de développer de nouvelles méthodes thérapeutiques. Elle est apparue dans les années 1980, et n’est donc entrée que récemment dans les sciences cognitives (voir, par exemple : Frith, 1992 ; Van der Linden, Danion, & Agniel, 2000). Ce retard est probablement dû à deux facteurs. Le premier est que la psychanalyse a longtemps été le cadre dominant unique d’analyse des maladies mentales. De plus les symptômes sont la résultante de nombreuses variables (d'ordre biologique, social, psychologique), qu’il est difficile de définir et d’identifier clairement. Ils s’expriment également dans des proportions variables d’un patient à l’autre et interagissent entre eux, ce qui ne facilite pas la compréhension des symptômes, et donc leur étude. Le second facteur est que les dysfonctionnements cérébraux responsables de certaines pathologies restent encore mal identifiés. Cependant, l’analyse des pathologies mentales peut nous éclairer sur le fonctionnement cognitif normal. Dans un premier temps, les méthodes de la psychologie cognitive permettent la mise en évidence de déficits spécifiques qui, à leur tour, peuvent être corrélés avec des dysfonctionnements d’ensembles neuronaux déterminés. Toutefois expliquer des symptômes psychiatriques directement par une anomalie d’une région cérébrale, d’un neuromédiateur ou même d’un gène particulier est, pour le moment, très risqué. Il faut en effet toujours veiller ne pas amalgamer des niveaux d’observation trop éloignés les uns des autres. En définitive, la tâche du chercheur est donc de déterminer si les altérations cognitives qu'il décrit sont primaires ou secondaires à la pathologie, si les symptômes découlent de déficits cognitifs ou si les déficits cognitifs observés sont la conséquence de pathologies psychiatriques.

En résumé, la psychopathologie cognitive se fonde sur une meilleure connaissance des dysfonctionnements et a pour ambition de mieux comprendre les troubles mentaux en tant que tels afin de mieux les soigner. En spécifiant de nouveaux paradigmes pour les sciences cognitives, elle prétend contribuer au progrès des connaissances relatives au fonctionnement cognitif normal, dans ses relations avec les aspects les plus complexes de l’activité psychique que sont la conscience, la mémoire, l’affectivité et le contrôle de l’action.