1.1.1. Le langage

Les troubles du langage ont été les premiers symptômes cliniques décrits dans la schizophrénie (Bleuler, 1911 ; Kraepelin, 1919) et sont depuis extrêmement étudiés. Ils sont considérés par certains auteurs comme fondamentaux de l’étiologie de la maladie (Crow, 1997) et font partie des nombreux symptômes permettant de diagnostiquer la maladie dans le DSM-IV. Chez les patients schizophrènes, on trouve des déficits dans la perception des mots, dans la compréhension de phrases et dans le traitement sémantique et syntaxique (pour une revue : Condray, Steinhauer, van Kammen, & Kasparek, 2002 ; DeLisi, 2001 ; Minzenberg et al., 2002). Leurs facultés à communiquer et à produire des inférences pragmatiques, sont également atteintes (Corcoran & Frith, 2003 ; Linscott, 2005 ; Manochiopinig, Sheard, & Reed, 1992 ; Tényi, Herold, Szili, & Trixler, 2002). Les schizophrènes présentent aussi des difficultés à comprendre l’humour, le sarcasme, les métaphores, les questions indirectes, et ils ont également du mal à interpréter la prosodie (pour une revue : Mitchell & Crow, 2005) mais ils présentent aussi des difficultés dans la production langagière et leur discours est souvent désorganisé (Kerns & Berenbaum, 2002). De plus, des déficits de production ont été observés chez des enfants qui ont développé plus tard la schizophrénie (Cannon et al., 2002) et des anomalies dans la compréhension du langage ont également été détectées dans la famille des schizophrènes. Crow (1995) a montré que des individus diagnostiqués schizophrènes à l'âge adulte ont eu des difficultés de lecture (reconnaissance du mot) identifiées pendant l'enfance (7 ans). En revanche, le dysfonctionnement expressif du langage (production de la parole) pendant l'enfance n'a pas été associé à la schizophrénie à l'âge adulte. Ces résultats d’études longitudinales montrent que des déficits de la compréhension peuvent prédire un diagnostic de schizophrénie à l'âge adulte et impliquent un processus développemental de cette fonction cognitive. De plus, le nombre de dyslexies et déficits de lecture apparaissant chez les enfants des patients schizophrènes (Fish, 1987) va dans le sens de cette hypothèse neuro-développementale.