Les systèmes de télécommunication

Historique en lien avec les phénomènes étudiés

Les langages sifflés sont, avec les langages tambourinés, les plus anciens systèmes de communication sonore véhiculant le langage à distance. A cet égard, ce sont les ancêtres de nos systèmes modernes de télécommunication: ils préfigurent l'invention de la télégraphie acoustique, du morse et du téléphone qu’ils ont inspirés comme en témoignent un certain nombre d’inventions intermédiaires :

-La trompette ou « Tube Stentorophonica » de Sir Samuel Morland (1626-1696) permettant au roi d’Angleterre d’entendre des nouvelles à 1,5 miles anglais

-Les cloches des villages dont les sonneries qui étaient parfois très précises

-Certains instruments parleurs relatés dans les archives Dudley : « Un groupe d’inventeurs parmi lesquels on trouve Kircher (1601-1680), Scheventer (1636) et les deux frères Bernouilli, ont essayé de transmettre des nouvelles sur de longues distances en utilisant des instruments de musique, chaque note représentant une lettre. Un des frères Bernoulli inventa un instrument, composé de cinq cloches qui permettait aux principales lettres de l’alphabet d’être transmises » (extrait des archives Dudley reproduit par Gold et Morgan, 2000).

Le point commun important entre les langues sifflées et les systèmes technologiques développés en télégraphie acoustique tient au fait qu’une certaine pratique d’écoute est nécessaire pour atteindre un taux d’intelligibilité élevé (acoustique très différente de la voix habituelle). Cependant, avec de l’entraînement, les performances d’intelligibilité obtenues sont très bonnes comme en témoignent de nombreux témoignages sur le morse par exemple (Warren et Warren, 1970 ; Sapir, 1921)

La différence essentielle entre des systèmes artificiels comme ceux que nous avons cités et des systèmes naturels comme les instruments parleurs d’Afrique ou d’Asie ou comme les langues sifflées tient au fait que les premiers, lorsqu’ils s’appuient sur la langue le font par l’intermédiaire de la langue écrite décomposée en un alphabet alors que les systèmes naturels imitent les spécificités sonores de la voix en exploitant le champ de possibilités d’un autre mode de production acoustique. Dugast le remarquait en 1955 à propos du langage tambouriné ou sifflé des Banen du Cameroun : « Il n’a rien de commun avec notre signalisation morse, qui transmet les phonèmes de langues écrites. Les langues africaines, à l’origine parlées seulement, attachent une importance très grande aux tons des différentes syllabes des mots » (Dugast 1976, p.708). De même l’explorateur anglais Lindt remarqua dans un court traité sur les tambours africains : « Puisqu’ils n’ont pas de langage écrit, ils sont incapables de diviser les mots en lettres. Le tom-tom (sic) ne traduit donc pas lettre par lettre » (Lindt cité dans un extrait des archives Dudley reproduit par Gold et Morgan, 2000).