6. Limites de la recherche

Si « aucun travail ne s’accomplit dans la solitude 59  », il est cependant important de faire remarquer que la coopération entre ceux qui peuvent faire office de personnes-ressources et le chercheur n’est pas toujours gagné d’office.

Or, il n’en demeure pas moins que ce facteur est fort handicapant, et compte parmi les limites dont peut faire l’objet ce travail. Cela dit, en dépit de notre curiosité à vouloir lever le voile sur ce qui est désormais convenu d’appeler « le phénomène du portable en Afrique », nous restons, disons les choses telles quelles sont, sur notre faim. Notre élan a été freiné par plusieurs facteurs dont voici les plus significatifs.

Des contraintes extérieures : elles sont aussi nombreuses que variées. Il y va de l’absence de documentation (données statistiques) sur le terrain au Gabon, à la méfiance en vers les chercheurs. Pour les responsables des maisons opératrices de téléphonie mobile, toutes les informations sont «stratégiques» et ne peuvent être mises à la disposition des « personnes étrangères au service. » «Nous sommes dans un contexte de concurrence, et nos concurrents peuvent profiter de toute ouverture de notre part pour nous évincer» nous dira un directeur technique chez Libertis 60 . Pour enquêter au Centre hospitalier de Libreville, (le plus grand du Gabon) afin de se rendre compte de l’usage du téléphone portable par les médecins urgentistes, à quelles complications n’avons-nous pas été confrontés ? Des demandes d’autorisation à adresser au directeur général de l’institution aux refus de coopérer de certains médecins, rien ne s’est fait de façon naturelle. Cet hermétisme ne concourt pas, l'on s'en doute, à assouvir la soif des pèlerins du savoir.

Hormis les travaux d’Annie Chéneau-Loquay que nous avons cités plus haut, une poignée de travaux (thèses et mémoires) d’étudiants gabonais et quelques bribes de compte rendu sur Internet, un quasi désert bibliographique dans le domaine des NTIC en Afrique et au Gabon est à faire remarquer.

Les NTIC et la discipline à laquelle elles peuvent être affiliées (les Sciences de l’Information et de la Communication (SIC)) ne sont d'ailleurs pas encore inscrites dans le registre des disciplines enseignées dans les universités gabonaises. Manque d’intérêt ? Retard du ministère de tutelle dans l’actualisation des programmes et des disciplines à enseigner ? Il ne nous appartient pas de répondre à ces questions. Mais il n’y a pas que cela. Au Gabon, comme dans bon nombre de pays du continent africain, le partage d’informations officielles relève du secret, nous le verrons plus loin.

Sur ce point, et sur bien d'autre, un changement rapide des mentalités est à souhaiter pour le rayonnement scientifique du continent.

Notes
59.

Op. Cit., Michel Beaud, l’Art de la thèse, page 5. (Comment préparer et rédiger une thèse de doctorat), Ed. La découverte, octobre 2001.

60.

Rencontré le vendredi 20 août 2004 à Libreville dans son bureau du 3e étage.