1.2 comment la téléphonie peut-elle aider à susciter le développement ?

Avant d’esquisser une théorie des relations positives qui pourraient exister entre la téléphonie et le développement, une définition de ce concept tant convoité qu’est le Développement nous paraît important.

Notre définition du Développement tiendra compte de trois paramètres :

  1. une dimension économique
  2. une dimension sociale
  3. une dimension culturelle

La dimension économique ici tient compte de l’amélioration « concrète » de la vie des individus : alimentation, habitat, santé, éducation. Elle passe par l’augmentation des quantités de biens produits, le PNB par habitant, la part prédominante prise par le secteur de l’emploi dans la population active et dans les exportations et par l’augmentation des revenus. La croissance économique est de ce point de vue une condition nécessaire du Développement.

Constatant que le modèle de développement universellement imposé aujourd’hui est un mécanisme d’exclusion et que nos sociétés paient très cher d’avoir « mis l’économie aux commandes», à ces facteurs essentiellement économiques s’ajoutent d’autres considérations. La dimension sociale mérite donc d’être prise en compte. Ignacy SACHS 101 écrivait dans Le courrier de l’UNESCO « tout développement digne de ce nom doit poursuivre comme objectif la justice sociale (…) l’économique doit être subordonné à un projet social démocratiquement élaboré».

Pour définir le développement il importe aussi de tenir compte des inégalités sociales et spatiales, de l’importance de l’analphabétisme, de la faiblesse des équipements sanitaires, technologique, de la nécessité de prendre en compte l’aspect « formation ».

S’agissant du troisième et dernier aspect à savoir la dimension culturelle ; celle-ci mérite d’être prise en compte dans les projets de développement.

Car il y va de l’enrichissement des identités culturelles à l’élargissement de la participation à la vie culturelle en passant par l’extension de la coopération culturelle internationale.

Se demander si la téléphonie peut contribuer au développement c’est chercher à mettre en lumière sa contribution au développement. Cette question mérite donc d’être étendue à l’ensemble des (TIC) dont la téléphonie mobile n'est qu'une composante.

Nous reformulons donc notre question comme suit : quelle contribution peuvent apporter les NTIC en faveur du développement escompté par les pays du Sud ?

La pertinence de cette question repose aussi sur le fait que le lien entre les NTIC et le développement a été porté dans toutes les instances internationales depuis 1995 par les chefs d’États africains en tête desquels se trouvent Nelson Mandela, et Alpha Omar Konaré du Mali.

Le président Mandela, lors de la cérémonie d’ouverture de « Télécommunications 1995 » à l’UIT à Genève mettait l’accent sur la nécessité de réduire l’écart entre « nantis et démunis » et exhortait la communauté internationale à inscrire les questions relatives aux télécommunications dans le débat public général sur les politiques de développement. Dans toutes les instances internationales, dans tous les discours, dans la plupart des journaux et médias est proclamée la nécessité pour les pays du Sud de se connecter aux grands réseaux mondialisés.

Imprégnés de ce discours visant à promouvoir les réseaux, les NTIC constituent donc un véritable enjeu pour les pays du Sud. Certainement parce que le développement de la Société de l’Information dans le contexte actuel de mondialisation implique pour l’ensemble des nations une réelle interactivité. Les pays du Sud éprouvent donc le besoin de s’aligner, semble t-il pour bénéficier des retombées de la « Société de l’Information».

Les pays d’Afrique subsaharienne désirent notamment s’investir dans la mise en place d’une infrastructure solide, quand bien même, comme le montre la réalité de tous les jours, ils se trouvent confrontés à une nouvelle et dangereuse forme de pauvreté 102  : la pauvreté de l’information. Celle-ci peut encore davantage élargir le fossé déjà trop grand entre le Nord et le Sud.

La nécessité de s’interroger sur la contribution des NTIC au développement est si impérieuse que, chacun peut s’en rendre compte 103 , l’investissement technologique est à la fois complexe, coûteux, délicat et risqué. Mais vue la nécessité de s'ouvrir au monde, cet investissement devient presque un passage obligé pour tous les États. Particulièrement pour ceux dits "en développement". Cette nécessité de développer les réseaux est davantage nourrie par les prédictions des experts pour qui la « Société » de l'Information serait pleine de promesses.

Notes
101.

Économiste américain, spécialiste du Développement. Site : www.unesco.org, Sachs, I. 1997.

102.

Cf. Jean-Pierre Bangemann, La Société de l’Information, Rapport Communauté Européenne, 1994, cité par Henri Paul Ziza, Thèse de Doctorat, Bordeaux 3, septembre 2002.

103.

Voir sur ce point, Moïse Modandi, Mémoire de DEA, Lyon 3, 2001.