8.1.3 Pour une coopération transversale Sud/Sud

L’une des solutions qui restent au continent africain pour pallier son déficit technologique demeure la coopération entre pays du Sud. La coopération entre les pays peut se faire par le biais de l’intégration économique 399 .

L’un des objectifs de ce mouvement d’association étant la suppression de toutes les barrières qui entravent les transactions économiques entre ces différents pays. Ce qui permettrait de faciliter la libre circulation des personnes, des biens et des capitaux. L’intérêt de la coopération économique pour les pays africains est de faciliter les échanges compte tenu de l’étroitesse ou l’exiguïté du marché des biens et des services.

C’est un moyen d’intégration économique qui permet d’assurer une autosuffisance et une croissance économique, qui est à la base de tout développement. Á cela on pourrait ajouter le souhait de voir les secteurs investissant dans le même domaine resserrer leurs liens en vue d’atteindre les objectifs communs. En matière de Technologies de l’Information puisque c’est bien de cela qu’il s’agit dans ce travail, nous optons pour une coopération entre les différents opérateurs présents sur le marché africain. La coopération ne doit plus seulement se faire de façon verticale (entre le Nord et le Sud) qui accroît la dépendance des pays du Sud sur ceux du Nord, et conforte entre autres, le déséquilibre Nord – Sud de l’accès à l’information.

Pour pallier les difficultés d’investissement technologique qu’ils rencontrent sur le terrain en matière de téléphonie par exemple, les opérateurs de la téléphonie mobile en Afrique devraient davantage investir le marché en partageant leurs expériences.

Par un tel échange (Sud-Sud), de nouvelles opportunités de développement sont possibles. Pour asseoir notre hypothèse, nous nous appuyions sur l’exemple de Celtel 400 qui est actuellement l’opérateur le plus en vue sur le continent, et qui mène une politique de coopération entre les opérateurs. Reconnaissant que le marché africain souffre d’un cruel manque d’infrastructures de communication, cette multinationale de la téléphonie mobile a engagé une politique de partage d’infrastructure de téléphonie avec ses concurrents. Cette interconnexion entre les réseaux permet de diminuer les frais d’investissement en ce qu’elle offre une infrastructure à moindre frais, ce qui est profitable, surtout dans des pays où les investissements sont réduits comme c’est le cas au Gabon.

Celtel Gabon est un opérateur qui appartient au groupe MSI-Cellular. Avec un capital de 6 milliards de Cfa, (9.146.941.03 euros), l’exploitation du réseau de cette société privée dont le lancement avait eu lieu en juin 2000, ne comporte que 30% de capitaux privés gabonais. Les actionnaires gabonais sont : les sociétés Gabon contact, GBM et Finatel qui exercent dans le secteur de l’informatique. Bien que le Président du Conseil d’Administration (PCA) soit Gabonais, il est important de faire remarquer que l’État gabonais ne dispose d’aucune part d’action dans cette société.

En ce qui concerne la performance du réseau, grâce à son signal qui couvre 90% du territoire, Celtel Gabon dessert pratiquement l’ensemble du territoire en téléphonie mobile, soit 7 provinces sur 9 401 , soit un total de 50 villes.

Premier opérateur à avoir installé un relais de transmission « Bac Ball » entre Libreville et l’intérieur du pays, celui-ci constitue l’épine dorsale de la desserte des 250.000 abonnés 402 que compte Celtel Gabon. Dans le cadre son fonctionnement, Celtel Gabon a mis en place un système de distributeurs à l’intérieur du pays. C’est le cas de SATURNE-Mobile dans le Woleu-N’tem, de GSM Phone dans l’Ogooué Maritime, de CDI dans la province de l’Ogooué Lolo, l’Ogooué Ivindo étant lui, dépendant du distributeur du Woleu-N’tem (Saturne Mobile). Le distributeur dans la province du Moyen Ogooué quant à lui, est SAT-COM. Ces distributeurs parmi lesquels figurent Digital Net et Sat-Com à Libreville, servent de comptoirs pour la commercialisation (en gros) des produits Celtel. Ces différents comptoirs mettent en place à leur niveau des réseaux de distribution que Celtel contrôle plus ou moins.

Dans sa stratégie de coopération avec ses concurrents, Celtel Gabon travaille avec les autres opérateurs présents sur le marché gabonais. Telecel, l’un d’entre eux, pourra désormais couvrir les villes d’Oyem et de Bitam (au Nord du Gabon) grâce la possibilité qu’il a à se connecter sur les pylônes de Celtel. Pour l’achat de son matériel, Celtel sous traite avec des sociétés des pays Anglo-saxons dont la Grande Bretagne et surtout l’Afrique du sud.

Or, cette politique ne semble pas avoir de succès chez tous les opérateurs. Surtout chez certains d’entre eux qui ne recherchent que des avantages à court terme. Sachant qu’il en résulte de la multiplication des antennes relais pour couvrir les villes et les campagnes, l’interconnexion apparaît comme une solution notamment pour limiter leur prolifération. Le Congo Brazzaville est en la matière un bel exemple de réussite de la coopération Sud-Sud en matière de réseau de communication. Dans ses installations au Congo, le réseau de communication par faisceau hertzien de Celtel qui relie Brazzaville et Pointe noire est utilisé à titre locatif par les différents opérateurs présents dans ce pays.

Ayant bénéficié du savoir-faire de la société MSI qui a développé des outils pour optimiser la réalisation des réseaux, Celtel installe sur le continent les mêmes infrastructures et les mêmes matériels qu’en Europe et attend au besoin les faire bénéficier à tous les opérateurs.

Quoi qu’il en soit, le manque de coopération que l’on observe chez les opérateurs de la téléphonie mobile au Gabon n’est pas plus accru que dans les autres services de l’administration publique. Le Docteur Dravé, chef de service des urgences au Centre hospitalier de Libreville fustigeait par exemple le manque de communication entre le SAMU 403 et le service dont-il a la charge lors du crash de l’avion de Gabon express 404 .

En somme, hormis la défaillance de l’État qui se manifeste par un manque d’implication dans l’extension, le développement des réseaux et le contrôle de la tarification en ce qui est des coûts de connexion à Internet notamment, des écueils sociologiques comptent aussi parmi les obstacles liés à l’accès aux NTIC en Afrique.

Notes
399.

L’intégration peut être définie comme un mouvement d’association entre différents pays partenaires qui ne sont pas forcément voisins sur le plan géographique.

400.

Bien que société étrangère (Néerlandaise), Celtel dispose en 2003 déjà de 30% de capitaux privés gabonais.

401.

Chiffres de l’Agence de Régulation des Télécommunications (ARTEL), septembre, 2003.

402.

http://www.jeuneafrique.com/pays/gabon/gabarit_art_afp.asp?art_cle=PAN50025celtesnnoba0#

403.

Service d’Assistance Médicale et des Urgences.

404.

Le crash de l’avion de la compagnie Gabon express a eu lieu le 8 juin 2004 et a fait 18 victimes.