8.2.3 Un cruel manque d’équipement et de structures

Le Gabon, ne dispose pas encore de structures organisées d'appui à l'innovation. Il n’existe quasiment pas d’instituts de recherche fondamentale et appliquée. Quand il en existe, ceux-ci manquent de matériels basiques du genre tubes, stérilisateurs, téléphone, photocopieur, fax, ordinateurs, microscopes. Toutes les machines appropriées pour un rendement optimal font cruellement défaut. Par ailleurs, si en ce qui est du matériel de laboratoires et des canaux de communication pour un partage effectif de l'information dans les services et institutions de réelles carences se font jour, quelques progrès s'observent cependant dans certains secteurs.

Des progrès sont par exemple observés dans le secteur bancaire (nous l’avons vu p. 262) notamment avec l'informatisation des services. Il en est de même pour les sites Internet d'information : internetgabon.com, gabonflash, etc. Toutefois, ces avancées dépendent encore largement de la coopération internationale et d'instituts partenaires tels que le Centre de coopération Internationale.

Eu égard à ce constat d’une pénurie en moyens d’équipements, une réelle implication de l'État est à souhaiter. L'État est à solliciter dans la mise en place d’une véritable politique de promotion des intelligences par la mise en oeuvre de conditions optimales pour la recherche.

Doter le Gabon de structures (Instituts et grandes écoles de qualité) permettrait à l’État, entre autre chose, de réduire le nombre d’étudiants boursiers envoyés à l'étranger pour compenser son manque ainsi que l'insuffisance des structures dont il dispose. Disposer de structures au niveau local permettrait aussi dans une certaine mesure, de donner l’opportunité aux étudiants gabonais n’ayant pas les moyens de financer leurs études à l’étranger de le faire surplace.

Nous savons par expérience que les sociétés multinationales ont toutes – indépendamment de leurs stratégies commerciales, économique ou financière, de leur recherche de performance et de rentabilité – le souci d’acquérir des technologies de procédé innovantes ou complémentaires. Les États ne sont pas en reste quand ils s’associent pour conduire une politique de «coopération technologique». Mais le principal obstacle à la pénétration des nouvelles technologies au Gabon est le manque de moyens. À cela pourrait s'ajouter comme nous venons de le voir un manque de structures consécutif une absence de politique volontariste.

Pour le cas du réseau Internet, le principal problème est celui d’avoir accès à une largeur de bande internationale suffisante pour pouvoir mener des activités interactives. Certaines connexions internationales à l’Internet mondial utilisent encore des circuits analogiques à 9,6 kbit/s, débits qui sont souvent portés à 14 kbit/s ou même 24 kbits/s. Hormis la République sud-africaine, rares sont les pays qui disposaient, il y a encore peu, de circuits internationaux de plus de 64 kbit/s, encore que les connexions à 128 kbit/s commencent à se généraliser 417 .

Tableau n° 24 : Récapitulatif du débit de la bande passante dans quelques pays d’Afrique septembre 2002
Bénin  2 Mbps
Burkina Faso 1 Mbps
Côte d’Ivoire  8 Mbps
Gabon 20 giga bits, sat-3/wasc
Guinée  1,5 Mbps
Mali  1 Mbps
Sénégal  79 Mbps
Togo  1 Mbps

Source : www.osiris.sn/article 279.html

En définitive, l'Afrique subsaharienne comme le reste du continent a besoin de l'accompagnement auquel s'emploient nombre d'organismes internationaux, publics ou privés, quant aux nécessaires apports financiers qui concourent souvent au transfert des savoir-faire.

Ce chapitre suggère l'idée que tout transfert de technologie est d'abord un partage. Soulignant bien cette expression pour traduire une réunion de compétences diverses requises au montage et à la maîtrise d'un investissement créateur d'activité et de richesse.

C'est sans doute conscient de cela que Sylain Spinelli, vice-président d'Ingénieurs sans frontières affirme418 : la mutualisation des savoir-faire et des compétences est la forme la plus avancée et aboutie des transferts de technologie.

En guise de conclusion, si nous envisageons une nécessaire coopération technologique entre les pays du Nord et ceux du Sud, c’est parce que, nous l’avons vu par ailleurs, les pays du Sud sont confrontés à d’énormes problèmes technologiques. Les principaux obstacles au développement des technologies de l’information et des communications en Afrique peuvent être énumérés en ces termes :

L’infrastructure des télécommunications est extrêmement limitée (moins d’une ligne téléphonique pour 100 habitants, coût élevé de l’accès aux lignes téléphoniques locales). Les taux de pénétration informatique et d’alphabétisation sont encore plus faibles.

On le voit, les difficultés de l’infrastructure de télécommunications en Afrique sont nombreuses. Les dévaluations successives de la monnaie, la corruption dans les organisations, les tensions sociales mais aussi la mauvaise qualité des infrastructures de télécommunications ne militent pas, loin s'en faut, au développement technologique (téléphonie et télécommunications) du continent.

Dans un contexte économique de forte concurrence, mais surtout dans un monde où les investissements doivent nécessairement être rentables, ces facteurs négatifs précités contribuent sans nul doute à la fébrilité du paysage technologique africain et concourent vraisemblablement à creuser l’écart entre les pays africains et certains petits draguons d’Asie du Sud Est 419 qui affichent une nette avance. Depuis la deuxième guerre mondiale, les rapports Nord/Sud se sont démarqués par des innombrables tentatives de programmes et de projets d’aide au développement socio-économiques.

Depuis les premières tentatives pour subvenir aux besoins fondamentaux des pays nouvellement indépendants, jusqu’aux périodes bien connues du Dialogue Nord/Sud, du Transfert des technologies et de l’actuel Nouvel Ordre Économique Mondial, l’Afrique n’a cessé de bénéficier d’aides internationales pour activer son rapprochement du niveau de développement que connaissent les autres parties du monde en développement comme l’Amérique du Sud et les pays d’Asie du Sud-Est.

Dans le courant de ces programmes souvent inachevés, une infrastructure de télécommunications a été largement déployée pour répondre à des besoins certains de programmes de développement dans les secteurs de l’éducation ou de la santé. Programmes conduits par les agences intergouvernementales onusiennes 420 ou tout simplement pour des objectifs commerciaux des grandes firmes internationales d’exploitation du pétrole. Certains pays ont connu un développement disproportionné des réseaux de communication par rapport aux autres pays d’Afrique sub-saharienne.

Schématiquement 421 , aux pays riches revient le - «soft», la conception des puces et des logiciels ou des programmes audiovisuels, l'enregistrement des marques et des brevets; aux pays pauvres le - «hard» production sous licence des ordinateurs et des téléviseurs, ingénierie de sous-traitance, etc. La promesse de développement des marchés locaux et de transfert des technologies n'a pas été tenue : les entreprises détentrices de brevets craignent de nourrir les concurrents. Mais parmi les technologies, le téléphone mobile porte tous les espoirs et le nombre de portables est en hausse constante. La progression est édifiante : deux millions en 1998, trente millions en fin 2001 et cent millions prévus à l’horizon 2005 422 . Nous sommes donc tous branchés.

Notes
417.

Depuis août 2002, le Gabon est relié au reste du monde par câble sous-marin. Cette connexion lui donne droit à une bande passante d'une haute capacité. Plus rapide et moins cher que le satellite, le câble sous-marin devrait pouvoir assurer 5,8 millions d'appels téléphoniques et couvrir 65% de communications internationales. http://ww.afrik.com/article4793.html

418.

Marchés Tropicaux, Hors série, numéro de septembre. 1999, p. 32.

419.

Par l’usage des TIC, les pays nouvellement industrialisés (cas des petits Draguons d’Asie du Sud Est) voient leurs économies prospérer. Dans la mesure où ils partagent leur tissu économique avec tous les pays du monde. Et, la production ainsi que le développement de la téléphonie mobile ne sont pas en contradiction avec cette dynamique.

420.

Entre 60 et 70 milliards de dollar par an sont injectés dans les pays en voie de développement dont 10% par les agences des NU.

421.

Voir sur ce point l'Atlas du Monde diplomatique, Hors série, janvier 2003, p.10

422.

L’Afrique : 2001, l’Odyssée des télécommunications. In http://www.int-evry.fr/ostic/2001/afrque_space.htm.