A l’Université de Grenoble ( et son annexe de Chambéry ), comme dans les différentes écoles supérieures et dans les Ecoles Normales, la présence de l’Afrique et du Tiers Monde en général, est très limitée.
Cela est visible d’abord dans les programmes de cours proposés. Les enseignants d’Histoire-Géographie de l’Académie, qui ont fréquenté l’Université de Grenoble dans ces années là ont été contactés au cours de l’enquête menée par l’intermédiaire de l’APHG-Grenoble 38 . Les réponses sont unanimes : l’Afrique, sa culture, son histoire et ses problèmes n’ont pas été vraiment pris en compte par l’Université. Quelques programmes de cours ( les affiches qui étaient placardées sur les panneaux universitaires ) ont été retrouvés dans les archives mais ils ne font pas une part importante à l’Afrique, ni à l’interculturel en général, pas plus que les sujets d’examen ( par exemple, les sujets de la dissertation de propédeutique retrouvés pour la période 1961-69 ).
Cela est visible aussi dans la faible importance des relations que l’Université entretenait avec l’ Afrique, bien qu’elle fasse partie de l’Union Française. Les archives des « Amis de l’Université de Grenoble » fournissent un témoignage intéressant 39 . Elles concernent la période 1957-65. Cette association a été créée, par des industriels de la région de Grenoble. Elle sera longtemps présidée par P.L. Merlin de la société Merlin-Gerin. Son but , dans le cadre des relations Université-Industrie, est de subventionner l’Université, notamment pour les logements étudiants, d’aider financièrement des recherches et des activités faisant connaître l’industrie alpine à l’étranger. Elle donne des bourses pour des missions économiques d’étudiants à l’étranger, des prix pour les meilleurs travaux de recherche, des subventions pour réaliser des films valorisant l’industrie grenobloise. Les contacts avec le continent africain sont particulièrement limités : des subventions pour quelques travaux de recherche, et une enquête faite par un étudiant sur les marchés d’Afrique Noire intéressant les entreprises de transformation des métaux. Nous n’avons trouvé aucune trace de relations entre l’enseignement supérieur dans l’Académie de Grenoble et l’enseignement supérieur en Afrique ( qui est d’ailleurs peu développé à l’époque ). Le CUIG, comité destiné à aider les étudiants étrangers à s’intégrer, est né en 1951 et se limite le plus souvent à une fonction d’accueil et à l’organisation de cours de vacances pour les étrangers inscrits à l’Université.
Par contre, l’Université s’est préoccupée de formation. Une licence de la France d’Outre-Mer a été créée à Grenoble, en 1949, pour former des cadres destinés à travailler dans l’Union Française. Nous possédons les lettres qui ont été échangées avec le Ministère à cette occasion 40 . Ce projet avait fait naître un conflit entre la faculté des Lettres qui voulait le garder et la faculté de droit qui estimait que ce cycle de formation lui revenait puisqu’il concernait de futurs administrateurs. Un extrait de cette correspondance est révélatrice des dispositions d’esprit de cette époque :
‘« L’Assemblée de la faculté des Lettres (…) profondément convaincue des devoirs du peuple français envers la population des territoires d’Outre-Mer et soucieuse des intérêts de l’Union Française, approuve la création d’une licence d’étude de la France d’Outre-Mer (…) Elle demande donc à Monsieur le Ministre, de créer un enseignement d’histoire de la colonisation et d’attacher à l’institut de géographie, un spécialiste de la géographie coloniale qui pourrait, en même temps, assumer l’enseignement de l’ethnologie». ’Le nom de M. Richard-Mollard, agrégé de Géographie, directeur adjoint de l’Institut français de Dakar, et ancien élève de la faculté de Grenoble, est proposé pour ce poste. En 1961-62, une formation destinée à 45 fonctionnaires algériens est organisée sur six mois. Compte-tenu des évènements politiques, l’expérience ne sera pas renouvelée.
Cf. Introduction : Les sources.
Archives départementales de l’Isère et de la Haute Savoie ( « Les amis de l’Université de Grenoble » demandent des subventions au Conseil Général de Haute Savoie ) .
Archives départementales de l’Isère.