B ) DES ENSEIGNANTS ET DES ETUDIANTS INTERPELLES PAR LA DECOLONISATION (1945-1962 )

S’il existe une sorte de consensus sur la nécessité de laisser l’Ecole à l’abri des crises que traverse notre histoire, les enseignants et les étudiants sont aussi des citoyens. Un grand nombre d’entre eux ont estimé, qu’à titre personnel, ils avaient des positions à prendre face aux évènements qui se déroulaient dans l’Union Française.

Cette étude s’appuie sur deux types de sources. Des témoignages oraux d’abord, qui émanent de retraités, qui ont vécu ces évènements quand ils étaient étudiants ou jeunes enseignants 41 . Ces témoignages présentent beaucoup de points communs : l’importance de la décolonisation et surtout de la guerre d’Algérie dans les choix politiques de leur jeunesse et leur unanimité sur la nécessité de laisser les colonies s’émanciper. Mais peut-on en conclure pour autant que les historiens-géographes avaient choisi massivement leur camp à cette époque ? Il faut tenir compte aussi du fait que les réponses à cette enquête ont été peu nombreuses, que seuls ceux qui ont quelque chose à dire sur leurs activités peuvent être tentés de répondre et que d’autres ont pu oublier ou n’avoir pas envie de parler de positions que le recul du temps a condamnées.

Les archives départementales de Grenoble fournissent aussi un assez grand nombre de renseignements sur les mouvements qui traversent l’Université. Il s’agit de quelques archives des différentes facultés et du Rectorat, de coupures de presse ( souvent extraites du quotidien, Le Dauphiné Libéré ), de tracts mais surtout de lettres de l’administration préfectorale et de rapports des Renseignements Généraux. Les réunions publiques étaient surveillées et donnaient lieu à des comptes-rendus détaillés. Les syndicats, des associations de parents d’élèves et leurs responsables faisaient l’objet d’enquêtes, surtout quand des enseignants siégeaient nombreux dans leurs instances représentatives, ainsi que les groupes d’étudiants étrangers. On essayait d’infiltrer les organismes où il y avait un soupçon d’influence du parti communiste ou des partisans de la décolonisation particulièrement actifs. Ces renseignements sont surtout nombreux pour le début des années 60 et pour l’Université de Grenoble. En revanche, les activités politiques

dans les établissements scolaires ont laissé peu de traces. Dans les autres départements, où il n’y a pas réellement d’universités, les archives sont beaucoup moins riches et plus ponctuelles. C’est le cas de la Savoie où les informations sont très éparses. Les syndicats enseignants peuvent aussi être une source d’information : les archives sont généralement pauvres mais il reste la presse. Chaque département a conservé des bulletins syndicaux, mais les séries sont le plus souvent incomplètes. Le bulletin départemental des instituteurs de Savoie est une exception, il permettra donc une étude continue sur près de 20 ans. Le syndicat étudiant, l’AGEG a laissé peu d’archives.

Notes
41.

Enquête auprès des enseignants d’histoire-géographie de l’APHG de l’académie de Grenoble.