Chez les étudiants

Beaucoup d’étudiants aussi pensent que les relations que la France entretient avec ses colonies vont continuer comme avant. La Drôme étudiante, un journal qui paraît de 1944 à 1947 et qui ouvre aussi ses colonnes aux établissements scolaires, publie en décembre 1945 un article qui rend hommage à la colonisation. Elle permet à la France de conserver sa place dans le monde et de proposer un avenir aux jeunes. Un sondage national auprès de jeunes bacheliers, montre que ces positions ne sont pas isolées. Il fait apparaître que 85% d’entre eux sont fiers de l’œuvre accomplie par la France dans ses colonies. Par contre peu souhaitent y faire carrière, l’Outre-Mer ne fait plus rêver.

L’UNEF ( Union nationale des étudiants de France ) défend en gros ces positions. Ce syndicat étudiant crée en 1907, s’est surtout consacré, après 1945, à améliorer les conditions matérielles des étudiants. La Charte de Grenoble élaborée lors du congrès national de 1946, pose en principe que l’étudiant est un jeune travailleur donc qu’il a des droits sociaux que l’UNEF entend bien défendre ( Bourses, Sécurité Sociale…). En même temps, elle affirme l’apolitisme du syndicat mais un apolitisme qui n’est pas total puisqu’il comporte le devoir de préserver la liberté contre toute forme d’oppression. Elle met aussi en avant des préoccupations internationales puisqu’elle proclame son attachement à la paix ( l’UNEF compte parmi ses dirigeants, de jeunes résistants qui reprennent leurs études ). C’est la raison pour laquelle, le syndicat étudiant s’investira beaucoup dans la mise en place de l’Union internationale des étudiants, qui constituerait un rempart contre la guerre. Mais très vite, c’est l’échec. Le déclenchement de la guerre froide et la mainmise du mouvement communiste sur l’Union internationale des étudiants entraîne, en 1950, le retrait de l’UNEF, malgré les efforts d’une minorité pour maintenir au moins quelques contacts. Les préoccupations internationales s’arrêtent là. Sur les questions coloniales, seuls les étudiants proches du parti communiste et de ses mouvements de jeunesse s’opposent à la politique du gouvernement et entretiennent des relations avec les associations des étudiants d’Outre-Mer dont les adhérents sont peu nombreux et les dirigeants souvent communistes. La majorité des étudiants semble se sentir peu concernée par ce problème où questions coloniales et relations est-ouest s’emmêlent, bloquant les quelques dirigeants de l’UNEF qui souhaiteraient aller plus loin et poser vraiment le problème colonial. L’abstention de l’UNEF se renforce au début des années 50 par l’arrivée à la tête du syndicat de dirigeants plus « apolitiques » encore. Mais la question n’est pas évacuée totalement ( l’UNEF condamne la guerre d’Indochine dès 1948 ), ni partout. L’Université de Grenoble semble avoir eu des positions plus radicales que d’autres 43 .

Notes
43.

D. FISCHER, Histoire des étudiants en France de 1945 à nos jours , Flammarion, 2000.