Les associations

L’importance de la vie associative est un fait marquant de notre époque. A partir des années 70 surtout, le développement du Tiers Mondisme a provoqué une véritable explosion des associations humanitaires 141 . Très vite elles ont cherché à entrer dans les écoles. Ces contacts ont été de plus en plus un élément important, voire essentiel, de leurs activités et ont joué un grand rôle dans la pénétration de l’Afrique à l’école. Un tissu associatif dense est généralement considéré comme un élément favorisant l’éducation au développement.

Le Comité français contre la faim (CFCF) est sans doute la structure qui, la première, a orienté son action en direction des écoles 142 . Il travaillait en étroite relation avec l’Inspection académique. Les archives retrouvées pour la période de 1960 à 1990, montrent la collaboration établie avec les écoles, surtout dans les années 60 et 70. A l’occasion notamment de la campagne mondiale contre la faim, il fournissait de la documentation, proposait aux établissements de participer à des actions dans un PED, dont il conservait la maîtrise, recrutait des élèves pour les quêtes sur la voie publique.

Plus tard, d’autres associations consacrent une partie ou la totalité de leurs efforts à l’Ecole, mais dans un esprit différent. « Peuples Solidaires » a toujours considéré que l’Education au développement devait être une priorité et a mis sur pied, dès sa création en 1983, une commission intitulée «  animation en milieu scolaire ». Elle est souvent intervenue dans les écoles, avec des expériences originales, comme la classe de développement 143 . Cette ONG a contribué aussi à l’évolution de la réflexion sur les relations nord-sud et elle a souvent été un catalyseur, en apportant une aide matérielle au montage de projets, en mettant en relation des partenaires et en créant des réseaux de solidarité, qui peuvent inclure des écoles. « Terre des hommes » créée par des enseignants s’est toujours intéressée aussi à l’Ecole. Les enseignants y restent très nombreux actuellement ( 50% des membres à Chambéry en 2002 ) 144 .

D’autres se sont spécialisées dans le « créneau école ». C’est le cas de « Ecole et Tiers Monde ». Composée d’enseignants et de parents d’élèves, cette association a réfléchi aux moyens de faire entrer le Tiers Monde dans les écoles. Elle a étudié aussi les manuels et en a dénoncé les insuffisances et les erreurs d’analyse. Un exemple régional est celui d’ « Afriqu’impact ». Cette association née au début des années 90, dans le quartier de la Villeneuve à Grenoble, s’est donnée pour mission d’aider les écoles primaires et collèges qui souhaitent s’investir dans l’éducation au développement. Les deux principaux volets de son activité sont la sensibilisation aux réalités africaines et la création et l’accompagnement de « Clubs Afrique ». Elle collecte et crée des outils pédagogiques et intervient dans les écoles. Par contre, elle ne s’occupe pas du pilotage des actions en Afrique, en partie pour des raisons de principe : tout projet de développement doit être initié, géré, évalué par des groupes du Sud, ce n’est donc pas une finalité indispensable pour une école. D’autres associations se spécialisent dans l’information et la production de documents pédagogiques. C’est le cas d’Orcades, à Poitiers, qui a une audience nationale.

Le CCFD ( Comité catholique contre la faim et pour le développement ) a un rôle un peu particulier. Il est souvent le partenaire privilégié des établissements catholiques et des aumôneries à qui il fournit de l’information et la possibilité d’entrer en contact avec les PED et de soutenir des micro-réalisations. Dans beaucoup de départements, le CCFD possède des permanents responsables des contacts avec les écoles. Mais son étiquette catholique a limité son influence dans l’enseignement public. Le principe de laïcité et la peur de susciter des réactions ont fait préférer parfois la collaboration avec des associations plus neutres sur le plan confessionnel. En outre ses prises de position souvent audacieuses sur les relations Nord-Sud lui ont valu quelques difficultés avec certains évêques et aussi fermé parfois les portes de l’enseignement catholique. Il y aurait beaucoup d’autres associations humanitaires à citer, ayant l’expérience d’une collaboration avec les écoles.

Des associations culturelles aussi ont contribué à l’éducation au développement en faisant connaître « les cultures d’ici et d’ailleurs ». C’est le cas de l’AMCC à Chambéry 145 qui a fait de gros efforts en direction de l’Ecole ou des « Amis de Présence africaine ». Il est tentant aussi pour un établissement scolaire de chercher des contacts avec des associations de ressortissants des PED. Dans les villes universitaires comme Grenoble, il y a des groupes d’étudiants africains par exemple. Mais souvent, ces étudiants ne peuvent pas contribuer, d’une manière très positive à une sensibilisation à leurs cultures et aux difficultés des PED. Une étude d’un économiste africain, E.Amougou 146 , mentionnent des parcours universitaires souvent médiocres, liés à la crise de l’enseignement en Afrique et à des conditions matérielles difficiles. Le décalage entre ce qu’ils vivent ici et chez eux ne leur permet pas toujours de faire preuve de la distance nécessaire pour témoigner. En outre leurs associations ne présentent pas toujours les garanties indispensables de sérieux et de neutralité. Certaines sont des annexes des ambassades ou l’émanation de groupes religieux dont les objectifs sont plus la propagande que l’information.

Depuis la fin des années 90, on observe un effort pour structurer le milieu de la solidarité internationale, à l’échelle d’une région au moins. Les associations ont donc tendance à se regrouper en réseaux parce qu’elles prennent conscience des inconvénients d’un trop grand émiettement. « Terre des hommes » dans ses objectifs pour 1999, a inscrit « le travail en partenariat avec d’autres associations ». «  Savoie Solidaire » 147 a été sollicitée en 1999 pour fédérer les associations du département. Un cycle de formation sur trois ans a été élaboré. Il est destiné aux militants des ONG locales et au milieu scolaire . Les écoles peuvent très bien faire partie de ces réseaux. « Resacoop » qui sert de lien entre les associations de la région Rhône-Alpes, a organisé à Lyon, une session sur le partenariat avec le Burkina Faso. Les lycées ont été invités au même titre que les associations. Il essaie actuellement de mettre sur pied un réseau plus vaste qui regroupera dans toute la région Rhône-Alpes, avec les associations, des centres de recherche et de formation, des universités, des collectivités territoriales. Ces réseaux peuvent aussi avoir une dimension internationale. Le « RED Nord/Sud » a été crée en 1993 à Bruxelles. Il regroupe une quinzaine d’ONG et des mouvements pédagogiques ce qui montre l’intérêt que « la galaxie solidarité » accorde à l’Ecole.

Notes
141.

Cf. Tableau des associations humanitaires en Savoie : Annexe 3 .

142.

Cf 1° partie, D. «  La mise en place d’une politique de coopération ».

143.

Cf. Etude de cas n° 3  «  Une classe de développement en Isère » ( 3° partie A)

144.

Entretiens avec des militantes de « Terre des Hommes-Savoie ».

145.

L’A.M.C.C. ( Association pour une maison de la culture à Chambéry ) a été crée en 1964. Elle a longtemps milité pour la création d’une maison de la culture qu’elle a obtenue en 1987. Elle propose chaque année un programme de manifestations culturelles qui inclut les cultures extra-européennes.

146.

E.AMOUGOU , Etudiants d’Afrique Noire en France : une jeunesse sacrifiée,  L’Harmattan 1997.

147.

« Savoie Solidaire » pilote les actions du Conseil Général.