Les collectivités locales

A partir de la fin des années 80 surtout, apparaît une autre forme de coopération avec le Tiers Monde, la « coopération décentralisée » : un certain nombre de collectivités locales, municipalités, conseils généraux, régionaux, établissent des relations durables avec des collectivités locales ou des associations du Sud. Les PED sont naturellement loin d’être une préoccupation primordiale pour beaucoup d’élus. Dans un certain nombre de villes, des militants se plaignent qu’au bout de 10 ans de coopération avec un P.E.D., certains élus ne savent encore pas très bien ce que la ville y fait. Mais d’après les témoignages recueillis, ils font confiance à leurs collègues plus motivés : l’adoption d’un projet de coopération ne pose pas, en général, de problèmes majeurs et toutes les décisions qui sont prises à son sujet sont généralement votées à l’unanimité.

Des municipalités avaient déjà été en contact avec les problèmes du Tiers Monde, en accordant une aide d’urgence pour faire face à une catastrophe naturelle par exemple ou en subventionnant les associations humanitaires implantées dans la commune. Mais dans le deuxième cas, il s’agissait plus d’un geste à l’égard de leurs administrés que d’une réelle prise de conscience. Certaines d’entre elles, sur l’initiative d’un ou deux élus, ont été plus loin et ont mené, avec une région ou une ville du Tiers Monde, « une action permanente face à des besoins permanents » 148 . Les petites collectivités ont tendance à se regrouper sous l’égide d’une ONG. Les plus importantes, qui ont des moyens techniques et financiers plus solides fondent leurs propres associations et mettent directement ces moyens à la disposition des PED avec lesquels elles collaborent. C’est, par exemple, le cas, pour la Savoie, du Conseil général avec « Savoie Solidaire » qui agit depuis 1988 au Sénégal, à Haïti et en Roumanie et de la municipalité de Chambéry avec « Chambéry-Ouahigouya », au Burkina Faso, depuis 1990. Beaucoup d’agglomérations de l’Académie ont des projets de coopération ( Grenoble, Echirolles, St Jean de Maurienne entre autres ). Elles ont souvent d’ailleurs devancé la législation. Ce n’est que depuis les lois de décentralisation, au début des années 80, que les collectivités locales ont le droit d’engager des dépenses qui ne concernent pas directement l’intérêt de la commune.

Outre la gestion de relations nord-sud et de projets de développement, ces associations se sont donné pour mission de mobiliser la société civile. Le milieu scolaire en fait partie. Les échanges scolaires sont souvent une des premières initiatives dans le cadre de « jumelages ». Une collaboration, généralement très fructueuse pour les écoles, peut s’installer. La ville de Grenoble entretient des liens avec Constantine depuis 1982. Un jumelage officiel a été instauré en 1999 : l’Ecole en est partie prenante avec un cyberjumelage entre établissements scolaires et une coopération universitaire (Université P.Mendès-France ). L’association « Chambéry Ouahigouya » qui pilote l’action de la municipalité, a montré à de multiples reprises l’intérêt qu’elle portait à la formation et à la mobilisation du milieu scolaire. Elle a mis en place, dès sa création, une commission « Education » qui organise ce partenariat et elle a su associer les écoles en laissant aux jeunes une place spécifique dans des activités qui concernaient aussi les adultes. Elle leur a ainsi permis de se valoriser. Un autre moyen de mobiliser les scolaires est la création par le Conseil général d’un « Conseil général de jeunes ». En Savoie, il a été crée en 1988. Il était composé d’élèves de collèges, élus en 4° et siégeant deux ans. De 1989 à 1995, il fonctionnait par commissions. Une commission Tiers Monde avait pour objectifs de faire de l’information et de soutenir des projets de développement avec l’appui financier du département. Depuis 1995, le système des commissions, trop lourd à gérer, a disparu . Actuellement, dès qu’ils sont élus ( pour un an ), les représentants des jeunes se donnent un choix de questions à étudier mais pour les années qui viennent, les relations nord-sud n’en font pas partie : un an est une période trop courte pour lancer une action lointaine. La solidarité internationale reste néanmoins un objectif important de la politique du Conseil Général : « donner aux jeunes savoyards la possibilité de s’ouvrir aux pays en voie de développement ou en reconstruction, en s’impliquant dans des actions concrètes de solidarité … » 149 . Plus récemment, pour marquer l’entrée dans le nouveau millénaire, il a lancé une opération très importante : « Un cœur gros comme le monde ». 37 sur 38 cantons savoyards ont, chacun, pris en charge une action dans un pays du Sud. Dans chaque canton, les écoles sont associées au projet 150 . Des initiatives sont prises aussi à l’échelon régional. Ces dernières années, des voyages d’études, payés par la Région, ont été proposés à quelques élèves accompagnés de professeurs-animateurs. Le « permis de réussir » a été crée en 1991 pour soutenir des projets périscolaires initiés par les établissements rhônalpins. Les projets de solidarité peuvent entrer dans ce cadre.

Notes
148.

Compte-rendu d’une séance du Conseil Général de Savoie.

149.

Délibération du Conseil Général de Savoie ( juin 1997 )

150.

Cf. 3° partie A. : Etude de cas n° 6.