4° L’AFRIQUE DANS L’ENSEIGNEMENT SECONDAIRE : DES CONTENUS DIVERS

Des objectifs en évolution

Dans les établissements scolaires, les objectifs assignés à la sensibilisation au Tiers Monde ont évolué depuis les années 60, parallèlement à l’évolution des positions des spécialistes, des associations et du Ministère sur ces problèmes. Mais la diversité reste très grande.

Dans les années 70, la sensibilisation au Tiers Monde consistait surtout en une étude du sous-développement. Elle s’appuyait sur la sensibilité des élèves, sur leur compassion face aux réalités qu’ils découvraient. C’était l’époque de la lutte contre la faim. Des enseignants 192 se rappellent avoir véhiculé la formule du CFCF : « 2 hommes sur 3 ont faim dans le monde » et montré la nécessité de faire quelque chose. Cet aspect caritatif reste encore caractéristique de beaucoup d’initiatives. En 1975, le lancement de la campagne annuelle contre la faim est révélateur : le B.O.E.N.conseille « d’organiser une causerie consacrée aux problèmes de l’alimentation et de l’agriculture dans les pays en voie de développement et aux buts généreux de cette grande œuvre de solidarité ». Récemment un Inspecteur a cautionné l’expédition de denrées alimentaires, déconnectée d’une véritable éducation au développement, en disant « c’est mieux que rien ». Cet appel à la générosité est peut-être, en effet, une étape incontournable dans la prise de conscience, surtout quand on a à faire à des enfants ou des adolescents. Beaucoup d’enseignants ont fait aussi le même cheminement. Mais pour beaucoup d’entre eux, l’éducation au développement ne doit pas s’arrêter là. « L’aspect caritatif a l’inconvénient d’épuiser rapidement le potentiel de compassion, de banaliser l’inacceptable ». Dans les années 70 déjà, certains enseignants, défendaient des théories plus radicales et dénonçaient la responsabilité des pays riches dans les mécanismes du sous-développement  ( on parlait alors de « pillage » du Tiers Monde ).

Les analyses ont évolué au cours des années. la sensibilisation au Tiers Monde a dépassé la simple étude des manifestations du sous-développement et l’assistanat qui en découlait et évolué vers des analyses plus approfondies. Des objectifs nouveaux se sont imposés peu à peu, au niveau du Ministère, dans les manuels et apparemment dans les établissements  :

Une plus grande exigence dans les analyses économiques, au moins pour ce qui concerne les grands élèves, pour comprendre les causes des inégalités ( faire reculer le déterminisme géographique ), admettre que l’organisation économique mondiale est en cause, que notre modèle de développement ne convient pas forcément aux autres et que les pays du Sud doivent avoir une place dans les rapports mondiaux.

Une initiation à d’autres cultures pour que les élèves n’aient pas l’impression d’être les dépositaires de la Civilisation. On aborde de plus en plus souvent les problèmes par l’étude des cultures.

Des changements de comportement face à l’autre : même si l’Afrique donne souvent une image navrante d’elle-même ( sur le plan politique en particulier ), il faut éviter de la présenter uniquement comme une suite de problèmes mais créer le désir de se connaître, montrer que les Africains ne sont pas totalement démunis, qu’ils ont aussi des techniques, des idées et pour beaucoup, la volonté de s’en sortir, évoluer progressivement vers cette notion de « citoyen du monde » qui est devenu un des objectifs de l’éducation.

Pour certains, une réflexion sur le développement de nos propres sociétés, inséparable de celui des autres pays du monde et « une redécouverte de notre environnement proche par un détour lointain ». 

Notes
192.

Sources : Enquête de 1999 auprès des enseignants de l’APHG et entretiens personnels.