Un bilan parfois décevant

Nous n’avons pas de chiffres pour le nombre de classes ou d’établissements ayant entretenu une correspondance avec des élèves d’un pays africain mais ces correspondances semblent en diminution ces dernières années. Elles s’arrêtent souvent et par lassitude des partenaires.

Une explication tient aux difficultés matérielles des écoles africaines : manque d’outils pour réaliser des dossiers ( papier, appareils de photos…), acheminement coûteux du courrier, absence de projecteurs ou de magnétoscope pour regarder les documents envoyés par les jeunes français…La plupart des établissements, ici, qui veulent correspondre, sont obligés de fournir de l’argent et du matériel.

Il existe aussi des décalages multiples entre correspondants français et correspondants africains. En Afrique Noire, les jeunes qui jusqu’à ces dernières années, étaient souvent scolarisés plus tard, au même niveau de classes, sont plus âgés dans l’ensemble. Même s’il est utilisé couramment dans les écoles, le français ( ou l’anglais ) n’est pas la langue maternelle des enfants, au sud du Sahara. Dans la partie nord de l’Afrique, l’enseignement est en arabe. Cela peut ouvrir la porte à des difficultés de compréhension. Les différences des situations économiques et sociales et des mentalités sont aussi un obstacle. Certains traits des civilisations africaines et certaines pratiques déroutent les élèves français. En outre, même s’ils souhaitent présenter un tableau objectif de leur société urbanisée avec ses points positifs et négatifs, la description qu’ils en font, en donne le plus souvent une vision idyllique aux jeunes africains et risque de les conforter dans l’idée d’un modèle à copier. Certains élèves africains ont même honte de leur culture et en parlent le moins possible dans la correspondance.

Les relations peuvent aller aussi au delà de la correspondance : il est assez fréquent qu’elles débouchent sur l’équipement de l’école africaine en matériel pédagogique ou fournitures scolaires. Mais cela pose alors le problème de l’égalité des partenaires. L’aide matérielle fausse les rapports. Quand l’un donne et l’autre reçoit, la correspondance ne s’inscrit plus dans un véritable échange. C’est la raison pour laquelle des enseignants excluent cette évolution. Le risque de dérapage est encore plus grand dans le cas d’une correspondance individuelle. Certains élèves africains écrivent à leurs correspondants essentiellement pour demander des « cadeaux ». Au mieux, ils suscitent la compassion et au pire, ils donnent une image dévalorisante des sociétés africaines, ce qui va à l’encontre des objectifs recherchés.