Les actions de formation à la compréhension internationale dans l’Académie de Grenoble, a partir de 1980.

Nous n’avons trouvé aucune trace de ce qui s’est fait au CPR, à l’ENNA ( pour les professeurs du technique ). Notre étude va donc surtout porter sur les Ecoles Normales d’instituteurs devenues IUFM ( Instituts universitaires de formation des maîtres ) et plus particulièrement l’IUFM de Grenoble et sur la MAFPEN ( Mission académique de formation pour l’éducation nationale ).

L’éducation au développement pénètre timidement dans la formation. Mais sa place n’a jamais été très importante. La formation ne suit donc pas la volonté ministérielle et les déclarations d’intention et reste très en deçà des besoins.

Pour la formation initiale, le « Sud » continue à occuper une place faible dans le concours de l’Agrégation. En 1991 par exemple, en histoire contemporaine, 73 sujets de leçons ont été proposés à l’oral, pour l’épreuve de « hors-programme », 2 portaient sur l’Afrique. La recherche sur l’histoire africaine a fait des progrès considérables, des publications d’un grand intérêt paraissent et cependant elles n’ont pas de retombées sur la formation des Maîtres, alors que les civilisations africaines ont été au programme du Secondaire à certaines époques et qu’elles étaient rarement traitées parce que les enseignants se sentaient démunis. La situation n’a guère évolué. Le professeur Liauzu juge l’agrégation comme un concours de plus en plus sélectif et déconnecté des problèmes actuels. En huit ans, autour de l’an 2000, sur 2000 interrogations orales « hors-programme », 7 concernaient la guerre d’Indochine et la guerre d’Algérie et 1, l’immigration.

Quand il se fait quelque chose, c’est souvent lié aux individualités, à la motivation d’un formateur ou d’une équipe mais cela ne s’inscrit pas dans une stratégie générale, avec des étapes et des objectifs bien identifiés. Par exemple, au Centre de formation des PEGC, à Grenoble, dans les années 80, un enseignant-formateur a beaucoup travaillé avec ses étudiants sur des regroupements de textes pour l’Ecole primaire. Parmi les thèmes privilégiés : l’immigration, la vie des hommes dans les différentes régions du monde…Ces textes étaient issus des œuvres de grands auteurs, de reportages, d’interviews, d’articles de revues. A l’E.N d’instituteurs de Chambéry, devenue IUFM en 1991, une enseignante particulièrement motivée et militant à titre personnel dans une ONG, a tenté d’introduire l’éducation au développement dans le plan de formation. A la fin des années 80, elle a élaboré des dossiers à l’intention des élèves-maîtres. Ils contiennent quelques articles de fond, qui peuvent servir de base à une réflexion lors des séances communes, et une masse de renseignements pratiques pour tous les stagiaires qui souhaiteraient engager leur classe dans l’Education au développement ( bibliographies, adresses, jeux pédagogiques, moyens audiovisuels…). A la fin des années 90, dans le cadre de l’élaboration d’un plan de formation sur 4 ans ( 1996-2000 ), un module a concerné partiellement l’éducation au développement : trois axes possibles ont été proposés, l’environnement, la santé, le développement. L’année suivante, le développement n’apparaît plus. En 2000-01, deux stagiaires proposent un partenariat nord-sud , dans le cadre du « projet personnel en équipe » inclus dans la formation des professeurs des écoles. Il s’agit de fournir du matériel scolaire et des vêtements à l’Ecole Chantal Mauduit au Népal. Cette action se fait en collaboration avec l’association du même nom, créée en souvenir d’une jeune alpiniste savoyarde décédée récemment, lors d’une expédition. Le projet était double : mobiliser des classes et convoyer le matériel sur place. Même si ce projet a constitué un enrichissement certain pour les deux initiatrices, il n’était pas accompagné, d’une véritable éducation au développement. Avec la collecte de vêtements et de matériel scolaire, c’est l’aspect caritatif qui domine. Dans le même IUFM, en 2001, un groupe de 3 stagiaires a réalisé sur place un documentaire vidéo sur la vie d’un enfant-élève au Burkina Faso, ce qui a été l’occasion d’aborder l’habitat, la nourriture, l’école et les loisirs. Ce document est à la disposition des écoles savoyardes par l’intermédiaire du CDDP. Mais ces quelques exemples ne doivent pas faire naître des illusions. Il existe parfois une marge importante entre des exercices d’école et une prise de conscience réelle de la part du futur enseignant. Des formateurs regrettent le manque d’audace de certains stagiaires, capable de bâtir un projet mais ayant des réticences quand il faut passer à l’application. Quelques informations sur l’I.U.F.M. de Privas vont dans le même sens. .Les problèmes de développement ne sont pas actuellement au programme du cursus de formation. Pour leur stage, les futurs professeurs des écoles peuvent présenter un projet international, plusieurs sont allés en Afrique Noire dans ce cadre, mais ce sont les échanges avec l’Europe qui dominent.

Pour la formation continueet dans l’enseignement secondaire, quelques statistiques, pour l’année 1983-84, permettent de faire des constatations analogues.

TABLEAU N° 25 : Les stages dans l’Académie de Grenoble

Une demande trop faible en ce qui concerne le Tiers Monde n’a pas permis de programmer un stage sur « le sous-développement ». Donc l’Education au développement ne fait pas l’objet d’une volonté systématique d’introduire une nouvelle dimension, un nouvel état d’esprit dans le système éducatif. Vingt ans après, la situation ne s’est pas améliorée. Le site internet de l’éducation nationale, en 2004, propose des actions de formation à l’International pour des enseignants du second degré. Il s’agit de séjours de perfectionnement linguistique et d’échanges, poste pour poste, d’enseignants : aucun ne concerne les pays du Sud. Depuis quelques années, en outre, la formation continue paraît en voie de disparition à cause de coupes drastiques dans le budget. Certains formateurs les évaluent à 40 % en moins. L’éducation au développement est particulièrement touchée puisqu’elle n’a jamais été considérée comme une priorité.