La réflexion et la recherche urbaine sur le développement durable des mobilités depuis une décennie environ, a placé l'intégration du transport et de la forme urbaine au cœur de la planification des politiques de transport. Cette relation entre le transport ou la mobilité et la forme urbaine fait l'objet de beaucoup d'études et recherches [(Newman & Kenworthy (1989) et (1992), Breheny (1995), Farthing et al. (1996), Banister et al. (1997), Cervero et Kokelman (1997), Kitamura et al. (1997), Barter (1999), Kenworthy et Laube (1999)]. Ici, nous nous limitons à la recherche de Barter qui a porté sur les villes asiatiques.
La typologie des villes de Barter s'appuie principalement sur le lien entre la forme urbaine, l'utilisation des sols et le transport. L'idée de base est que chaque mode de transport est mieux adapté à un modèle d'usage des sols particulier. Certes, l'usage d'un mode de transport dépend aussi d'autres facteurs comme le revenu, l'offre d'infrastructures à différents modes, les préférences culturelles, les facteurs politiques et le contexte fiscal, etc. La densité et la forme urbaine ne déterminent totalement pas le système de transport d'une ville mais elles tendent nettement à fixer les limites possibles de l'usage de différents modes.
La densité de la population influence le taux de déplacements motorisés de deux manières.
Premièrement, avec une population donnée, il y a une corrélation étroite entre la densité moyenne de la population dans des zones construites, la distribution spatiale des destinations et origines des déplacements et la longueur, le nombre de trajets journaliers (Kenworthy et al, 1999). Plus la densité est élevée, moins les distances parcourues entre les endroits de différentes activités sont importantes et plus le nombre de personnes est grand qui peuvent facilement satisfaire plusieurs motifs de déplacement tels qu'aller au travail, à l'école ou faire des achats en un seul trajet. Deuxièmement, plus la densité est élevée, plus il est facile de fournir des services de transport publics fréquents et accessibles et ainsi réduire la demande pour les transports privés individuels. "L'étalement" des villes tend à accroître la longueur de déplacement et la demande pour les transports privés motorisés.
Inversement, le système de transport urbain a une influence sur la forme urbaine. Il aura un effet profond sur une ville et sur la manière dont celle-ci se développe. Les infrastructures de transport peuvent fournir accès à des nouvelles zones. Le mode de transport (transport privé, transport public, marche à pied, cyclisme, etc.) favorisé par les investissements a un impact sur la forme de croissance de la ville. La croissance urbaine se produit où il y a des investissements dans le transport. Autrement dit, le transport influe sur l'emplacement de nouvelles zones commerciales et résidentielles.
Il y a donc une influence réciproque entre la forme urbaine et les systèmes de transport.
Lorsque les équipements de transport sont créés en réponse à la dynamique du tissu urbain ils deviennent alors comme un facteur causal qui influence l'évolution des villes (Smucki, 2003), un changement de densité urbaine ou d'usage du sol par exemple. En revanche, une fois établies, la densité urbaine ou l'usage du sol déterminent pour une grande part la demande de mobilité (Offner, 1992; Masuura et Numada, 1992). Cette corrélation s'applique très bien au contexte des villes asiatiques.
En partant de ce concept de base sur le lien entre la forme urbaine et le transport, Barter (1999) définit plusieurs types de villes : la ville piétonne, la ville de modes de transports non motorisés, la ville orientée vers le transport public, la ville motocycle, la ville automobile, etc. On reprendra ici seulement une ville de l’Asie du Sud-Est pour chacun des types à titre d’illustration.
| Ville | Densité (personnes/ha) |
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Mode privé motorisé | Mode public | |||||
| Bangkok | 110 | 293 | 283 | 53% | 47% | ||||
| Jakarta | 145 | 291 | 189 | 54% | 46% | ||||
| Kuala Lumpur | 58 | 170 | 300 | 91% | 9% | ||||
| Manille | 158 | 8 | 85 | 25% | 75% | ||||
| Source : UITP (2001)8
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Nous utilisons la source de l'UITP (2001) pour la répartition modale et Barter (1999), Gakenheimer (2003), PADECO (2000), DA Rini (2003) pour le taux de motorisation.