- a - La période 1970-1986 : une ville vélo

Pendant la période des guerres d'Indochine, l'urbanisation à Hanoï a été freinée. La ville avait un air très tranquille de ville de province. Plusieurs activités étaient en sommeil freinées ou transférées ailleurs en raison des bombardements. Dans les rues on entendait seulement le bruit des bicyclettes et celui du tramway par endroits. Cette caractéristique reste inchangée pendant les années 1970, même après 1975. La voiture particulière était totalement absente : les rares automobiles en circulation étaient les voitures de fonction de cadres supérieurs, de dignitaires du régime, et une ou deux voitures d'ambassade. Quelques vieux camions russes roulaient péniblement à travers des rues, crachant de la fumée (Logan, 2002). Les rares motocycles existants étaient ceux de fonctionnaires, de personnes relativement aisées, ou de celles qui avaient eu l'occasion de voyager à l'étranger.

Le mode de déplacement principal était donc la bicyclette suivie par le cyclopousse et le réseau de tramway créé en fin du 19ème siècle.

Illustration 9 : Le tramway d'Hanoï pendant les années 1970 et le cyclopousse
Illustration 9 : Le tramway d'Hanoï pendant les années 1970 et le cyclopousse

Etant donné que le Viêt-nam était isolé du monde après 1975, il n'y avait pas beaucoup d'activités économiques dans ses grandes villes comme Hanoï et Hô Chi Minh Ville. La demande de mobilité urbaine était donc assez faible car les motifs de déplacement s'étaient limités à quelles activités essentielles comme aller au travail, à l'école ou au marché. La bicyclette, alors mode de transport très répandu assurait à la fois le transport de personnes et de marchandises.

En fait, la bicyclette est devenue un moyen de déplacement très apprécié par les gens du nord et les Hanoïens depuis que les Viêt-Minh (les soldats vietnamiens) eurent assiégé et pris la vaste base française à Dien Bien Phu en 1954. Grâce à 200.000 "xe thô" (bicyclettes de charge) qui transportaient des munitions et des vivres, même des soldats blessés,32 les Viêt-Minh battirent les Français (Fitzpatrick, 1998).Il y avait d'ailleurs une fabrique de vélos à Hanoï avant 1954 qui contribue à l'entretien et la réparation de bicyclette. Les conditions topographiques et la forme urbaine étaient aussi favorable à l'usage de la bicyclette. Hanoï a une surface plate et un réseau de rues étroites, notamment dans l'Ancien Quartier (LUU, 1994)

Comme on a attaché une grande importance à l'usage de bicyclette, ce mode a fait l'objet de l'enregistrement avant 1980 (ibid). Dans les années 1950 et durant la première moitié des 1960, le nombre de bicyclettes à Hanoï s'est accru à 22% par an malgré que la taille et la population de la ville aient été petites. De 1970 à 1975, ce taux s'est réduit à 7% par an mais l'équipement en bicyclette restait important jusqu'à la fin des années 1990 comme le montre le graphique. Elle devenait un "compagnon de voyage" des Hanoïens. Le nombre de bicyclettes pour 1.000 personnes est sans cesse monté à des niveaux très comparables à ceux des villes chinoises pendant les années 1980.

La part de la bicyclette représentait plus de 65%, une part très importante dans la répartition modale. Ce mode populaire était complémenté par le transport collectif assez développé avec 5 lignes de tramway d'une longueur totale de 31,5 km et 35 lignes de bus avec une longueur totale de 496 km33 (BUI Xuan Dung, 2003). Le tramway transportait 37 millions de passagers en 1967, 20 millions de passagers en moyennependant les années 1970-1980 alors que le bus transportait de 12 à 15 millions dans les années 1970 (NGUYEN Thanh Binh & PHAN Manh Chinh, 1994). Grâce à son développement relatif, le transport collectif a pu assurer entre 25 et 30% de la demande de déplacement des Hanoïens pendant les années 1970 et la première moitié des années 1980.

Notes
32.

le volume de tonnage livré entre le 12 mars 1954, le début du siège, et la fin de la guerre à 3 mois après était estimé à 8.300 tonnes (Fitzpatrick, p. 169)

33.

les lignes de bus d'Hanoï ont été créées depuis les années 1960 avec 25 lignes intra-urbaines et 10 lignes de banlieue et un parc de 500 véhicules