Conclusion du chapitre 2

Si à la fin des années 80, les bicyclettes sont encore majoritaires dans la circulation notamment à Hanoï, avec la libéralisation économique et l'élévation du niveau de vie, la motorisation de la population avec l'achat de deux roues à moteur se développe rapidement alors que le transport collectif continue de perdre du terrain.

La crise des transports collectifs est déjà apparue avant la nouvelle politique du Doi Moi. Après l'introduction de cette politique d'ouverture, des entreprises publiques de bus ont continué à perdre de la clientèle, des lignes ont été supprimées et le parc de bus s’est réduit considérablement. Plusieurs facteurs ont contribué à cette dégradation des transports collectifs : crise de productivité interne, difficultés d'approvisionnement en matériel et en pièces détachées provenant d'Europe de l'Est, concurrence des deux roues à moteur. La dégradation du service de transports collectifs s'est poursuivie avec la réduction puis la suppression des subventions par les autorités dans les deux villes au début des années 90.

Dans ce contexte de recul du transport collectif, il est normal que les modes individuels, notamment le deux-roues motorisé se développent pour répondre aux besoins divers de déplacement. La nouvelle politique d'ouverture progressive vers l'économie de marché, lancée en 1986, a conforté la motorisation en deux roues à moteur, entraînant la libéralisation des importations de véhicules et favorisant le développement de l'industrie du motocycle dans le pays. Ce phénomène a été observé dans tout son ampleur d'abord à Hô Chi Minh Ville dont le revenu par tête est nettement plus élevé, puis à Hanoï qui semble combler le retard sur la métropole du sud en termes de consommation et d'image de modernité.

Les systèmes de déplacements urbains au Vietnam reposent de plus en plus sur les modes individuels, notamment deux-roues motorisés. Le parc du deux roues à moteur s'accroît de manière spectaculaire dans les deux villes pendant une seule décennie pour atteindre un taux 300 motocycles par 1000 habitants en 2002. La répartition modale dans le système de transport urbain est par conséquent déséquilibrée avec la prédominance du motocycle : 55% et 77,8% pour Hanoï et Hô Chi Minh Ville respectivement. Ce qui rend les deux métropoles vietnamiennes très spécifiques : un taux d'équipement élevé et aussi un taux de déplacement élevé mais en motocycle.

Dans un premier temps, la motorisation rapide en motocycle semble donner de la satisfaction à tous les usagers mais jusqu'à un certain temps il apparaît des dysfonctionnements entraînés par l'évolution de la motorisation individuelle mal maîtrisée. Le coût des nuisances liées à l'usage massif du motocycle n'est pas encore officiellement calculé mais des données disponibles attribuent une grande responsabilité du deux-roues à moteur à l'accroissement des accidents et de leur gravité et à la multiplication des encombrements dans les districts urbains et péri-urbains.

Au tournant du siècle, les pouvoirs publics prennent conscience de l'ampleur de l'impact de la rapide motorisation deux roues sur le système urbain. Une politique interventionniste commence à se dessiner afin d’éviter les dysfonctionnements causés par le déséquilibre des modes de transport urbain. Nous reviendrons sur l'action des pouvoirs publics en vue d'un système de transport urbain plus durable dans les chapitres suivants.