- a - Hanoï : suspension de l'immatriculation

En août 2003, les autorités d'Hanoï ont interdit l'immatriculation pour les nouveaux deux-roues à moteur achetés par les résidents permanents de 4 arrondissements centraux : Hoan Kiem, Hai Ba Trung, Dong Da, Ba Dinh.106 La presse se fait l’écho de nombreuses plaintes : "Il ne faut pas suspendre l'immatriculation mais augmenter la taxe de propriété, le frais d'immatriculation pour répondre aux besoins des habitants", ou "si quelqu'un a vraiment besoin d'un motocycle, il cherche à l'acquérir de tout moyen."

Une enquête d’opinion auprès de 2540 personnes montre les réserves de la population à l’égard de cette mesure

Tableau 14 : L'acceptation de la suspension d'immatriculation de nouveaux deux-roues à moteur à Hanoï
Réponses %
Oui 12,1
Non 48,9
Oui après 3 mois 3,3
Oui lorsque le TC se développe bien 35,7
Total 100%
Source : www.vnexpress.net du 12/02/2004

Malgré une part importante de réponses négatives, le Comité Populaire d'Hanoï applique la mesure.

Le premier bilan est encourageant. En réponse au Conseil Populaire d'Hanoï, quelques mois après la première suspension, le directeur du Service de la Police d'Hanoï affirmait que le nouveau règlement avait contribué à la baisse, bien que même modeste, du parc de deux-roues motorisé à Hanoï. Pendant 3 premiers mois après l'entrée en vigueur du nouveau règlement (de septembre en décembre 2003), le nombre de motocycles nouvellement enregistrés a diminué d'environ 15.000 véhicules, soit de 40% par rapport à la même période de 2002. La circulation s'est améliorée avec la baisse du nombre de points de congestion et de la durée des encombrements; de plus nombre d'accidents de la route a diminué aussi proportionnellement à la baisse d'immatriculations.107

Cependant à la question "est-ce que la mesure de la suspension des immatriculations est réussie après 6 mois ?", un responsable a répondu qu'il est trop tôt de dire car tout ne fait que commencer et un chemin reste à parcourir. Dans les autres arrondissements et districts où le nouveau règlement n'est pas appliqué, le nombre d'immatriculations a augmenté. Par exemple, en fin 2004 soit 15 mois après l'application du nouveau règlement, on a constaté une augmentation de 88,8% à Thanh Tri (avec 12.786 nouveaux motocycles); 67,6% à Tây Hô (13.528 motocycles); 66,8% à Câu Giây (14.047 motocycles). Les citadins de 4 arrondissements centraux cherchent à contourner le règlement, soit en trouvant une connaissance dans les autres districts pour porter le nom de ce dernier sur la carte grise, soit achetant à un inconnu "le droit à l'immatriculation" au prix de 1,5 à 2 millions de VND.

Face au contournement de la mesure, le directeur du TUPWS et le directeur du Service de la Police ont conjointement proposé au Conseil Populaire l'extension de la suspension d'immatriculation dans les 5 autres districts intra-muros de la ville : Thanh Xuân, Tây Hô, Câu Giây, Long Biên, Hoàng Mai en 2004. Cette proposition a été retenue par le Conseil Populaire et puis le Comité Populaire a pris une décision d'appliquer la suspension dans les trois arrondissements Thanh Xuân, Tây Hô, Câu Giây à partir du 1/1/2005. En 2008 la non-immatriculation sera appliquée dans les deux autres arrondissements Hoang Mai et Long Biên.

Et pour empêcher les Hanoïens de contourner le nouveau règlement en faisant l'immatriculation hors la province d'Hanoï, les deux directeurs ont même proposé l'interdiction de la circulation des motocycles non immatriculés à Hanoï à partir de 2005. Ces motocycles doivent s'arrêter au 3ème périphérique et les usagers en doivent prendre le transport en commun. Face à cette proposition touchant leur vie, une grande partie des résidents non permanents se sont fait entendre leur mécontentement dans la presse.

Parmi les 53 courriers du lecteur envoyés à VnExpress108 en février 2004, seulement deux en sont d'accord sur l'interdiction à la circulation des deux roues à moteur avec immatriculation provinciale. Cela s'explique par le fait que les deux-roues à moteur provenant des provinces voisines jouent un rôle important dans le transport de marchandises. Certains avis même demandent l'enlèvement de l'interdiction d'immatriculation des deux roues motorisés pour les citadins des 4 arrondissements centraux car cela va à l'encontre des intérêts de la plupart des habitants. La proposition d'interdire les motocycles non immatriculés à Hanoï a provoqué de nombreuses oppositions de la population et fini par être rejetée par le Conseil Populaire.109

Tirant les enseignements de ces défaillances, le Service de la Police propose d'étendre la restriction des immatriculations aux autres arrondissements extra-muros et districts ruraux, mais les membres du Conseil Populaire sont de nouveau réticents devant l’impopularité d’une telle mesure. Le directeur du Service a essayé de les persuader avec des chiffres. "Depuis septembre 2003 à décembre 2004, sur toute la ville 127.685 nouveaux motocycles sont immatriculés. Il a prévu qu'après 5 ans, le nombre de nouveaux motocycles atteindra 504.000, en plus de 1.550.000 motocycles du parc existant".D'après lui, s'il n'y a pas de restriction dans les autres districts alors que des infrastructures sont insuffisantes, la circulation en ville sera très difficile.

‘"A l'heure actuelle, la plupart des fonctionnaires doivent sortir de leur maison 30 minutes plus tôt pour éviter des embouteillages. Si la motorisation n'est pas freinée, on doit partir au travail même à 1 heure ou 2 heures d'avance. Il faut se placer dans une situation où on ne peut plus se déplacer en ville avec ce rythme de motorisation en deux-roues motorisés, pas tourner autour de la question du droit à l'immatriculation. Les habitants doivent penser à l'intérêt collectif et acceptent les mesures restrictives des modes de transport individuel. Si on demande le développement des infrastructures et des modes lourds comme une condition préalable, c'est trop tard".’

Donc, on voit une forte volonté politique des autorités d'Hanoï en vue d’améliorer le système de transport urbain mais le changement des comportements de mobilité ne se fera que progressivement. Déjà la progression spectaculaire de la fréquentation du réseau de bus, même si on partait d’un niveau très bas, est encourageante. Sans doute le renchérissement du prix des carburants sera une incitation de plus à prendre les transports collectifs pour certains déplacements, surtout si une réelle alternative aux deux roues se présente.

Les autorités d'Hanoï sont bien conscientes qu'il faut toujours améliorer la qualité du transport public avec la mise en place de plusieurs systèmes complémentaires comme le bus, le bus en site propre, le tramway, mais qu'il faudra à plus ou moins long terme aussi prendre des mesures restrictives encore plus draconiennes. Par exemple il est envisagé d'exiger du futur propriétaire d’une voiture la disposition d'un emplacement de parking dans ou près de sa maison. Cela annonce d’autres mesures plus contraignantes pour restreindre l’usage de la voiture en ville.

Notes
106.

Selon la décision 98/2003/QD-UB du Comité Populaire d'Hanoï

107.

"Qu'a obtenu Hanoï après 6 mois de suspension d'immatriculation de deux-roues motorisé?" www.vnn.vn du 09/02/2004

108.

www.vnexpress.net du 24/02/2004

109.

On a recensé une cinquantaine de courriers de lecteur, notamment dans le Journal électronique www.vnexpress.net , exprimant leur désaccord sur la mesure. Ils ont dit que la loi n'interdit pas le droit de circuler dans une ville, quelle que soit l'immatriculation d'origine du véhicule.