Section 6.4 Le "pricing" : perspective d'application des taxes et redevances sur la propriété et/ou l’usage des deux roues à moteur

Hanoï et Hô Chi Minh Ville ont été confrontées à des nuisances de transport liées à la forte motorisation en moto des ménages et individus. La dominance du motocycle dans la répartition modale dans les deux villes s'explique surtout par l'absence d'instruments économiques qui doivent être pris en compte pour corriger le coût de transport. Le coût d'usage de transport individuel en moto est généralement faible au Viêt-nam. Le coût de carburant, malgré majoré d'une taxe de route à raison de 500 VND le litre, reste faible au regard des comparaisons internationales.

Des coûts inhérents comme ceux de lavage ou de réparation sont aussi faibles étant donné que le motocycle ne fait pas l'objet de contrôle technique une fois sorti de l'usine. Outre ceux-ci, les utilisateurs de moto ne paient plus rien. Aucune recette n'est perçue pour l'entretien des routes existantes sans parler des coûts colossaux pour la construction ou l'élargissement de nouvelles routes qui sont normalement utilisées gratuitement par les usagers de transport privé, notamment ceux de deux roues motorisés.

En théorie, pour réduire la congestion et d'autres externalités du transport, il faut internaliser les coûts externes de transport, c.-à-d. les usagers d'un mode de transport doivent payer tous les coûts engendrés par leur usage, y compris les coûts qu'ils ne paient normalement pas comme le coût d'utilisation de l'infrastructrue, le coût de la congestion, etc. La tarification de l’utilisation de l’infrastructure routière est donc à la base d’une stratégie conduisant à la fois à une affectation efficace des ressources et à un mode de financement soutenable. En principe, le prix payé par les utilisateurs de véhicules empruntant une voirie urbaine encombrée devrait être au moins égal au coût marginal à long terme de cette utilisation, compte tenu notamment de la congestion, de l’usure des routes et de l’impact sur l’environnement. Dans la pratique, on utilise divers mécanismes de recouvrement direct et indirect.

L’instrument le plus souvent utilisé - la taxation des carburants - tient correctement compte des effets sur le réchauffement de la planète, mais c’est un piètre moyen de tarifer l’impact sur la congestion et sur l’entretien des routes. Néanmoins, en l’absence de recouvrement direct, il devrait être structuré, de même que les droits d’immatriculation, de manière à prendre en compte ces impacts. La taxation des différents carburants devrait être structurée de manière à refléter leur contribution relative à la pollution de l’air, là encore en liaison avec la structure des droits d’immatriculation.

Les droits de stationnement ne sont pas non plus la solution idéale pour tarifer l’impact sur l’encombrement, mais ils devraient au moins couvrir intégralement le coût d’opportunité des terrains affectés au stationnement. Lorsque la politique de stationnement est le seul moyen disponible pour tarifer la congestion, les mesures de contrôle doivent porter sur tous les types de stationnement (y compris l’espace mis par les employeurs à la disposition de leurs salariés) (Roth, G.J., 1965) et devraient être conçues de manière à exercer un effet limitatif équivalent à celui de prix économiques. Le prélèvement de péages sur certains tronçons et la tarification au cordon vont dans la bonne direction, mais la solution à long terme réside dans l’imposition plus systématique de redevances d’encombrement. (Banque Mondiale, 2000)

De toute évidence, il n’est pas facile d’augmenter les prix ou les taxes, en particulier pour des biens traditionnellement considérés comme gratuits. Lorsque le Venezuela a tenté de relever le prix des carburants à la fin des années 80, les réactions ont été très violentes (op.cit.). Au Viêt-nam la situation est semblable. Les habitants sont très sensibles à l'augmentation de n'importe quelle marchandise, notamment des marchandises considérées comme la composante d'entrée importante d'autres marchandises ou services. Mais dans un pays communiste où le pouvoir politique est traditionnellement forte, les réactions des habitants s'expriment de manière pacifique, normalement dans la presse écrite.

En tout cas, la restriction d'usage des modes individuels motorisés est inévitable. Elle est la clé qui permet à des villes comme Singapour et Hongkong d'avoir un bon système de transport public et une réduction de congestion urbaine. La question maintenant n'est plus "faut-il appliquer ou non les mesures économiques?" mais plutôt les pouvoirs publics ont-ils une volonté politique assez forte pour appliquer ces mesures. Tout d'abord, il est utile de sonder l'acceptation des mesures de restriction du motocycle par les habitants et les experts vietnamiens.