La politique de stationnement en ville influe énormément sur l'usage du transport individuel car presque tout déplacement en ville en mode de transport individuel implique des stationnements. Cela est aussi correct dans le cas du deux-roues à moteur. Pour réduire les externalités liés à l'usage du motocycle et développer le transport collectif, on ne peut s'abstenir de la tarification du stationnement. Selon RATP (1999), l'attractivité pour les utilisateurs du transport collectif par rapport au transport individuel dépend à la fois :
Comme on l'a abordé dans le chapitre 2, le motocycle est plus attractif que le transport collectif par autobus à Hanoï et à Hô Chi Minh Ville parce que la réglementation concernant le stationnement pour le 2RM n'existait pas ou plutôt elle existait mais n'était pas strictement appliquée.
En l'absence de zones réservées, les automobiles sont garées le long des rues, ce qui en limite l'usage pour les autres utilisateurs. Les rues centrales font l'objet d'une occupation de plus en plus continue, en espace et en temps. Une réglementation municipale impose l'inscription au permis de construire d'un certain quota de places de stationnement, pour les grosses opérations, hôtelières ou de bureaux dans le centre. Mais cette formule, encore marginale, ne suffit pas à assurer les stationnements de tout le parc.
Quant aux motocycles, ils sont garés librement sur les trottoirs. C'est là le problème clé de stationnement au Viêt-nam où les riverains considèrent le trottoir comme un prolongement de leur domicile ou de leur lieu de travail (Godard et al., 1993). L'appropriation privée de l'espace public est considéré comme normal jusqu'à ce que les autorités n'interviennent pas sauf qu'il y ait des disputes. On trouve ce type de parkings très régulièrement en ville, ce qui rend facile l'usage du motocycle. Les gérants sont censés avoir des licences des comités populaires de districts locaux fixant les limites de l'emprise sur la voie publique : le plus souvent, ces limites sont violées.
Désormais, le stationnement sur la chaussée et le trottoir à Hanoï et Hô Chi Minh Ville ne sera plus facile.
A Hô Chi Minh Ville les autorités ont senti la pression de l'usage répandu de motocycle sur l'espace rare de la ville. Il est normal qu'elles abordent la question délicate de la restriction. Le Journal Saigon Libéré est le porte-parole de la négociation et la sensibilisation des habitants.
A partir du 1er mars 2005 on distribue 100.000 plans de stationnement au centre ville (tout le premier arrondissement) pour informer et sensibiliser les habitants du quartier aux rues interdites ou autorisées au stationnement. Aussi toutes les sanctions sont précisées.
Concrètement, une amende de 60.000 VND (3 euros) pour un stationnement de motocycle sur le trottoir, 20.000 VND pour le vélo et les autres modes non motorisés, 120.000 VND pour l'automobile. Notamment, si le stationnement hors règle entraîne un encombrement, une amende d'un million VND sera infligée. Selon le plan de stationnement, pour l'automobile il y a 52 rues interdites au stationnement; 56 rues autorisées au stationnement gratuit sur chaussée; 21 rues autorisées au stationnement payant sur chaussée et 7 rues autorisées au stationnement payant sur trottoir. Pour le motocycle, 17 rues dont le trottoir est interdit au stationnement et au commerce, 18 rues dont le trottoir est autorisé au stationnement payant et 22 rues dont le trottoir est autorisé au stationnement gratuit.130
Le changement d'habitude est souvent synonyme de l'acceptation de la réduction des avantages habituels que présente l'usage du motocycle mais les usagers du motocycle ne sont pas prêts à accepter les ennuis liés à la nouvelle politique de stationnement.
Plusieurs habitants à HCMV soutiennent que la réglementation du stationnement en centre ville n'est pas raisonnable. Ils donnent beaucoup d'exemples."Le nombre de parkings n'est pas suffisant, ce qui fait que plusieurs utilisateurs des modes individuels ne peuvent pas trouver de place de parking. Un autre exemple, c'est que sur l'avenue Nguyen Hue où se trouvent quelques centaines de magasins et bureaux mais seulement 5 emplacements sont autorisés comme parkings. Il manque aussi beaucoup de places de stationnement sur l'avenue Le Loi. Il n'y a que 3 parkings de motocycle dont deux sont toujours complets et parfois débordent sur le trottoir." 131
Devant la porte ouest du marché Ben Thanh, les chaussées de même que les trottoirs sont utilisées comme parkings. Un gérant de parking a dit qu'il n'y a pas assez de place de stationnement pendant des heures de pointes pour faire des achats. Les parkings des tours de bureaux ont des places mais celles-ci sont réservées aux voitures. Certains gérants de parkings dans les tours de bureaux n'acceptent pas les motocycles des employés qui travaillent même dans ces bâtiments. Ces derniers doivent mettre leurs motocycles dans des parkings plus loin et prennent le taxi moto pour aller au bureau.132
Ceci montre bien que la demande de stationnement est beaucoup plus importante que l'offre lorsqu'on ne peut plus garer le motocycle librement n'importe où comme on pouvait auparavant.
Les pendulaires (ceux qui viennent à motocycle ailleurs pour travailler dans le centre ville) se plaignent que les panneaux d'interdiction au stationnement se trouvent partout mais il n'y a pas de renseignements sur des parkings. C'est normal parce qu'ils trouvaient très facilement des places de parking. Un pendulaire de bureau dans le tour City Bank s'est plaint : "je dois toujours arriver dès 7 heures du matin, 20 minutes à l'avance pour pouvoir trouver une place de stationnement." Un autre pendulaire a dit qu'il doit arriver de bonne heure pour pouvoir trouver une place de stationnement à quelques pas du bureau, sinon il lui faut 10 minutes pour marcher au bureau.
De toute évidence, les utilisateurs du motocycle ne s'habituent pas à mettre leur motocycle loin et marcher à leur destination. Il est très pénible pour eux de marcher à pied pendant 10 minutes. Désormais ils doivent oublier certains avantages du motocycle s'ils veulent aller au centre ville.
La politique du stationnement à Hô Chi Minh Ville semble cohérente avec le découragement de l'usage de l'automobile lorsque les autorités n'investissent pas dans la construction de parking et laissent l'offre de parking à l'initiative privée. Or, jusqu'à maintenant aucun opérateur privé s'y intéresse. Une grande somme d'investissement et un long délai de récupération du capital investi (20-30 ans) sont les facteurs décourageant des investisseurs. Selon leur évaluation, un parking souterrain ayant la capacité de 1.000 véhicules coûte environ 200 milliards de VND sans parler du coût foncier. Le coût d'opportunité de la terre consommée est très élevé par rapport aux recettes de parking.
En moyenne, une place de stationnement coûte 200 millions VND (égal à 10.000 euros au taux de décembre 2004). Cela explique pourquoi depuis l'an 2000 il y a plusieurs projets de parkings souterrains en centre ville mais aucun projet n'a abouti à une réalisation.133Avec seulement 3.500 places de stationnement pour l'automobile (dans des parkings et sur chaussée) par rapport à plus de 5.800 demandes par jour,134les districts centraux d'Hô Chi Minh Ville ne peuvent pas répondre à la demande actuelle et future de stationnement.
Le directeur commercial de la Compagnie Mishubishi a lui-même renoncé à acheter une voiture pour des problèmes de stationnement près de son domicile et reconnaît :
‘"Il n'y a pas de grand parking public pour les voitures à Hô Chi Minh Ville maintenant, mais aucune des maisons voisines n'ont de place disponible pour assurer une prestation de service parking." ’Personne n'ose construire un parking au-dessous de sa maison juste pour garer sa voiture si elle n'a pas d'autres affaires qui y sont liées par exemple l'hôtellerie. Un espace en ville pour le parking privé est moins rentable que d'utiliser cet espace pour d'autres buts commerciaux.
A Hanoï, des mesures d’interdiction de stationnement sur les trottoirs sont déjà entrées en application dans les rues très commerçantes du centre ville depuis juillet 2003.135Pourtant, les autorités ne semblent pas favoriser l'augmentation de l'offre de parking. D'une part, les terrains disponibles pour la construction de parkings sont rares, d'autre part les autorités veulent protéger le patrimoine architectural et urbain.
‘"Comme l'Etat a décidé de conserver l'ancien quartier, la circulation y est limitée. La construction des parkings n'est autorisée qu'aux districts péricentraux et périphériques. L'offre de parkings ne doit pas encourager l'usage des modes individuels au centre ville."136 ’Depuis 2003, une condition est posée pour l'immatriculation d'une voiture particulière à Hanoï. C'est un contrat annuel de location d'une place de parking ou des justificatives qui prouvent que le possesseur a un parking disponible.
Tuoi Tre, "A partir du 1er mars : sanctionner le stationnement illégal en centre ville d'HCMV", www.tuoitre.com.vn du 24/02/2005
"le stationnement du motocycle est interdit sur 17 rues en centre ville : tous les parkings sont surchargés", www.sggp.org.vn du 10/03/2005
Ibid.
Viet Hoa "les investisseurs ne sont pas intéressés par la construction des parkings sous-sol", www.vnexpress.net du 28/04/2005
Tran Duy, "Hô Chi Minh Ville met à essai le stationnement sur chaussée" www.vnn.vn du 15/04/2004
selon la Décision 3626/QD-UB en date du 1er juillet 2003
Déclaration du Vice directeur du Département de l’Urbanisme et de l’Architecture d'Hanoï au journal télévisé de VTV 3 le 4 mars 2005