La prise en compte des transports non motorisés et de la complémentarité modale

Avec le boom de deux-roues à moteur pendant les années 90, l'usage de la bicyclette a commencé à diminuer mais il n’est pas négligeable avec 37% et 13% pour Hanoï et Hô Chi Minh Ville respectivement dans la répartition modale selon les récentes enquête ménages. Les habitants en général ne considèrent pas la bicyclette comme un mode dépassé ou donnant une mauvaise image. Dans l'enquête ménage Hanoï de 2001, 40% des ménages enquêtés sont équipés à la fois de deux-roues à moteur et de vélos.

Même si la place de la bicyclette dans la politique de transports urbain ne soit pas encore bien définie, l’usage du vélo n’est pas restreint ou brimé comme en Chine. Par ailleurs les pouvoirs publics municipaux commencent à prendre en compte les piétons afin de rendre plus aisée la marche à pied.

Dan le nouveau contexte de l'augmentation du prix de carburants, de renouveau du transport collectif urbain et de restriction de la motorisation en deux-roues et éventuellement en voitures particulières, la bicyclette semble retrouver de l’importance dans les déplacements. Une partie de la population à Hanoi et Hô Chi Minh Ville a de plus en plus recours à la bicyclette ou à la bicyclette électrique avec le renchérissement de l’usage exclusif du deux roues à moteur.

Dans ce nouveau contexte, la politique des transports urbains devrait nécessairement prendre aussi en compte les transports non motorisés ou non polluants au sens plus large (bicyclette, bicyclette et scooter électriques) afin de parvenir à un système de transport urbain plus respectueux de l'environnement. Une politique de transport durable doit être une politique de transport "modérée", prenant en compte une "juste" intermodalité où chaque mode apporte le meilleur de lui-même pour contribuer à une mobilité acceptable, politiquement, socialement et économiquement.

La bicyclette, mais également le taxi-moto dont on a vu l’importance, devraient être pris en compte avec les autres modes de transport dans une optique de complémentarité modale. Concrètement cela signifie que plusieurs modes puissent être utilisés pour certains déplacements et que le passage de l’un à l’autre soit facilité par des mesures ou des aménagements tels que les parcs-relais.

Les formes d'urbanisation diffuse des villes vietnamiennes rendent plus difficile la desserte par les transports collectifs des périphéries de plus en plus lointaines et moins dense, et favorisent le recours au transport individuel motorisé. Ces effets pervers pourraient être atténués par une meilleure complémentarité entre le transport collectif, le transport semi-collectif (taxi, taxi-moto) et les transports privés (vélo, deux-roues et voiture).

Les Département des Transports et des Travaux Publics de Hanoi et d’Hô Chi Minh Ville ont développé la création de lignes de bus reliant le centre ville et sa périphérie. Déjà on voit apparaître les premiers parcs relais dans le centre à Hô Chi Minh Ville. A Hanoi, la création de parcs relais en périphérie est désormais envisagée. A terme, il sera nécessaire de mettre en place un grand nombre de parcs relais le long des lignes de bus et à leurs terminaux, et de réserver des emplacements de stationnement de deux-roues à proximité de arrêts des transports collectifs.

Si la pratique des habitants observée déjà à Hanoï et à Hô Chi Minh Ville consistant à combiner le deux-roues et le transport collectif dans leur mobilité quotidienne est davantage encouragée par une politique volontariste de transport urbain, il est réaliste d'envisager un scénario d'évolution dans lequel le transport individuel conserverait leur place dans la mobilité quotidienne, en étroite complémentarité avec les transports collectifs par autobus ou de grande capacité : on s'orienterait alors vers un modèle spécifiquement vietnamien compte-tenu des formes urbaines et du processus d'urbanisation au Vietnam.

Dans cette thèse, nous avons montré l’émergence progressive d’une politique de transports urbains au Viêt-nam. L'intervention publique, et la permanence de l'acteur public et du poids de l'Etat dans la société est une particularité vietnamienne. Même dans le contexte de transition vers le marché, le rôle des pouvoirs publics ne tend pas à être minimisé. Ainsi, les problèmes posés pendant la dernière décennie par la prépondérance de l'usage de deux-roues à moteur reflètent un choix de développement en faveur de la croissance économique et au détriment du développement durable. Il ne s'agit pas de la minimisation de l'intervention publique mais des priorités que les pouvoirs publics donnent volontairement à la croissance économique sur le développement du transport public et la restriction du transport privé.

A partir du moment où les pouvoirs publics ont pris conscience des coûts environnementaux et sociaux des transports motorisés en ville (pollution, congestion, accidents), ils ont commencé à intervenir afin de ramener à l'équilibre le bon fonctionnement du système de transports urbains. Il n'est pas utopique de penser que le Viêt-nam, comme il l'a montré dans d'autres domaines, saurait faire émerger un "modèle" ou des modèles propres à chaque ville, intégrant les impératifs de la modernité et les pratiques de mobilité inhérentes à la culture des habitants et à leur mode de vie. Cela suppose non seulement une politique de transport intégrant ces dimensions mais aussi des formes d’urbanisation et d’aménagement des centres villes en cohérence avec une politique de transport "durable".

Au terme de cette thèse, il est évident que tout n’a pu être abordé. Nous suggérons quelques orientations de recherche pour l’avenir. La première concerne la mobilité des populations pauvres et à faible revenus, la seconde l’activité des taxi-moto.