§ 1er - L'implantation des services publics sur le territoire et l’aménagement des espaces

A – L’implantation des services publics

La question de l’implantation des services publics se pose avec une acuité particulière dans les zones fragilisées, qu’il s’agisse de zones rurales ou de quartiers urbains.

Le Comité interministériel d'aménagement du territoire du 28 novembre 1991 a chargé les préfets d'élaborer un schéma de services dans les départements ruraux les plus fragilisés. Ces schémas ont d'abord été développés par le C.I.A.T. du 23 juillet 1992 2128 puis ont connu la consécration législative par la loi du 4 février 1995 2129 , dont les articles 11, 12, 13 et 17 III prévoyaient des schémas sectoriels de services publics destinés à prévoir une amélioration de la répartition des services sur le territoire et assurer une égalité des conditions d'accès des populations.

La question de l’implantation des services publics dans les quartiers concernés par la politique de la ville a aussi mobilisé l’administration préfectorale. Se fondant sur une « grille » mise en place par l’Etat et destinée à mieux connaître l’offre de service public dans ces quartiers, les préfets et autorités territoriales sont chargés de constater l’existence d’un déficit de ssevice public dans les quartiers difficiles 2130 .

Monsieur Jean-François Lachaume, présentant la loi du 4 février 1995, dit qu'elle « autorise à compléter la définition de l'aménagement du territoire donnée par Claudius-Petit en 1950 et selon laquelle "c'est la recherche, dans le cadre géographique de la France, d'une meilleure répartition des hommes en fonction des ressources naturelles et des activités économiques" et l'on peut ajouter maintenant : "et de l'implantation des services publics", ces derniers étant un atout important, à défaut d'être à lui seul décisif- dans la revitalisation des zones rurales et fragiles » 2131 .

Concernant l'implantation des services publics sur le territoire, l'article 29 de la loi du 4 février 1995 prévoit que : « L'Etat établit, pour assurer l'égal accès de tous au service public, les objectifs d'aménagement du territoire et de services rendus aux usagers que doivent prendre en compte les établissements et organismes publics ainsi que les entreprises nationales placés sous sa tutelle et chargés d'un service public. Les objectifs sont fixés dans les contrats de plan de ces établissements ou organismes publics et entreprises nationales ou dans des contrats de service public conclus à cet effet ». De même, « toute décision de réorganisation ou de suppression d'un service aux usagers par les établissements, organismes et entreprises mentionnés à l'alinéa précédent doit, si elle n'est pas conforme aux objectifs fixés dans les contrats de plan ou de service public, être précédée d'une étude d'impact » 2132 .

L'étude d'impact est communiquée au représentant de l'Etat dans le département, qui dispose d'un délai de deux mois pour, après avoir sollicité l'avis d'un organe consultatif, faire part de ses observations et demander, le cas échéant, de nouvelles mesures pour compenser ou réduire les conséquences dommageables du projet. L'établissement concerné se doit alors de répondre aux observations du préfet. Si cette réponse ne satisfait pas le préfet, celui-ci saisit le ministre de tutelle de l'établissement, organisme public ou entreprise concerné, afin qu'il tranche la question 2133 . Ce mécanisme a été jugé par Madame Nathalie Merley comme semblant être « de nature à éviter les suppressions « sauvages » de services publics, à améliorer les prises de décisions qui devront désormais intervenir après qu’aient été envisagées toutes les solutions possibles » 2134

La loi du 25 juin 1999 2135 a complété l'article 29 de la loi du 4 février 1995 afin d'étendre cette procédure de l'étude d'impact, en prévoyant que : « Les établissements et organismes publics ainsi que les entreprises nationales placées sous la tutelle de l'Etat ou celles dont il est actionnaire et chargées d'un service public, et disposant d'un réseau en contact avec le public, dont la liste est fixée par le décret (…), qui n'ont pas conclu de contrat de plan, de contrat de service public ou qui ne disposent pas de cahier des charges approuvé par décret, établissent un plan au moins triennal global et intercommunal d'organisation de leurs services dans chaque département. Ce plan est approuvé par le représentant de l'Etat dans le département après examen de la commission départementale d'organisation et de modernisation des services publics. Chaque premier plan sera présenté dans un délai d'un an après la publication de la loi n° 99-533 du 25 juin 1999 précitée. Le plan est révisé selon les mêmes formes.

« Toute décision de réorganisation ou de suppression d'un service aux usagers non conforme aux objectifs fixés dans le plan global, intercommunal et pluriannuel d'organisation mentionné à l'alinéa précédent fait l'objet d'une étude d'impact »de même nature que celle prévue par la loi modifiée.

Notes
2128.

Lettre de la D.A.T.A.R., n° 139, août 1992, p. 3.

2129.

Précitée.

2130.

Réponse ministérielle de M. ROSSINOT, ministre de la Fonction publique à M. BUSSEREAU, rapporteur pour avis sur le projet de loi de finances pour 1995, n° 1530, B.A.N., 8 novembre 1994, p. 38.

2131.

LACHAUME (J.-Fr.), « La loi d'orientation pour le développement et l'aménagement du territoire du 4 février 1995 et le service public », R.F.D.A., 1995 (5), pp. 893-904, pp. 894-895.

2132.

Le texte précise les modalités de cette étude d'impact : « Les conseils municipaux des communes concernées, les conseils des groupements de communes concernés et les conseillers généraux des cantons concernés sont consultés lors de l'élaboration de l'étude d'impact. Celle-ci apprécie les conséquences de la suppression envisagée, d'une part, sur les conditions d'accès au service et, d'autre part, sur l'économie locale. Elle comprend, au minimum, une analyse de l'état du service, l'examen des modifications qu'engendrerait le projet et les mesures envisagées pour compenser toute conséquence dommageable. Elle prend en compte les possibilités offertes par le télétravail ».

2133.

Commentant cette procédure, M. J.-Fr. LACHAUME écrit qu' « on est tenté, à la fin de la procédure, de dire : "ouf" et de penser que, décidément, l'élaboration de certaines décisions administratives en matière d'urbanisme ou d'aménagement du territoire échappent de moins en moins au formalisme. Mais comment régler une matière complexe par des procédures simples, surtout lorsque s'imbriquent des considérations politiques, de rentabilité, de satisfaction de l'intérêt général, d'autonomie des entreprises publiques ? », op. cit., p. 903.

2134.

MERLEY (N.), op. cit., p. 288.

2135.

Loi n° 99-533, précitée, article 30.