a) LES conditions d’application

Le Code de justice administrative a déterminé les cas dans lesquels le rejet pouvait intervenir mais a aussi fixé un moment au-delà duquel la mesure ne peut plus être prononcée.

Le législateur a légitimé la procédure de rejet simplifiée afin d’éviter le risque d’engorgement des juridictions lié notamment à la présentation de requêtes en série 747 .

L’article L. 522-3 du Code de justice administrative prévoit quatre conditions de mise en œuvre de la procédure de tri des requêtes.

La première tient à l’incompétence manifeste de la juridiction administrative, qui résulte de ce que les mesures attaquées relèvent de la compétence du juge judiciaire. Il s’agit pour le chef de juridiction de rejeter les requêtes fondées sur l’incompétence matérielle de la juridiction administrative 748 .

L’irrecevabilité manifeste est le deuxième cas où l’usage de la procédure simplifiée peut être envisagé. Il peut s’agir par exemple d’une erreur dans la saisine d’un juge au sein même de la juridiction administrative, telle le juge des référés au lieu et place du tribunal administratif 749 ou lorsque la mesure demandée auprès du juge excède manifestement sa compétence 750 .

En troisième lieu, alors que la demande est manifestement mal fondée qu’elle peut être rejetée dans le cadre de la procédure simplifiée. Cette cause d’application de la procédure se rapporte plus précisément au fait que l’une des conditions exigées n’est pas remplie, pour exemple le cas dans lequel le requérant n’invoque la violation d’aucun texte à l’appui de sa demande 751 . Il peut s’agir aussi de l’hypothèse où l’acte attaqué ne porte pas atteinte à une liberté fondamentale 752 , ou que cette atteinte n’est ni illégale 753 ou sans gravité 754 et de même, encore si le requérant ne fait état d’aucun moyen propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaqué 755 .

Enfin, la demande peut être rejetée lorsqu’elle ne présente pas un caractère d’urgence 756 .

On constate à travers ces exemples empruntés à la récente construction jurisprudentielle, le renforcement 757 du pouvoir souverain d’appréciation du président, juge des référés 758 .

Cependant, le Conseil d’Etat a mis fin à une controverse relative à l’utilisation par le président, juge des référés, de la procédure de rejet.

Par une première décision, la Haute juridiction avait tout d’abord admis que le président pouvait malgré l’engagement d’une procédure contradictoire, rendre une ordonnance de rejet en raison des motifs invoqués plus haut 759 . Cette jurisprudence présentait le risque de méconnaître les exigences mêmes du principe du contradictoire à l’égard du requérant 760 .

Mettant fin à cette contradiction manifeste, le Conseil d’Etat est revenu sur la décision Breucq précitée.

Désormais, lorsque le chef de juridiction a entamé une procédure contradictoire, les dispositions de l’article L. 522-3 du Code de justice administrative deviennent inapplicables.

Le juge des référés se trouve face à une alternative stricte. Soit il rejette la requête au titre de la procédure simplifiée sans communication au défendeur, soit il engage la procédure contradictoire renonçant à faire usage des dispositions de l’article L. 522-3 précitées 761 . Dans cette seconde hypothèse, la tenue d’une audience publique interdit de la même manière au président l’utilisation a fortiori de la procédure de rejet simplifiée pour d’évidente raison de respect du contradictoire de la procédure administrative contentieuse 762 .

Notes
747.

A.N., rapport n° 2002, 8 décembre 1999, p. 57 ainsi que Sénat, rapport n° 380, p. 68.

748.

C.E., réf., 22 mai 2001, Debbasch, req. n° 233865, inédit.

749.

C.E., réf., 10 juillet 2001, Le Nestour, req. n° 235557, inédit.

750.

C.E., réf., 22 février 2001, Moret, req. n° 230408, inédit.

751.

C.E., réf., 6 février 2001, Teulade, req., n° 229844, inédit.

752.

C.E., réf., 15 février 2001, Perrier, req., n° 230318, inédit.

753.

T.A., Nice, réf., 27 mars 2002, Syndicat des copropriétaires du 54 bd Jean Jaurès, req., n° 02-1358, inédit.

754.

T.A., Marseille, réf., 20 mars 2002, Orosco, req., n° 02-1369, inédit.

755.

C.E., réf., 21 mai 2002, Rousseau, req., n° 247008, à mentionner.

756.

C.E., réf., 11 janvier 2001, Pause, req., n° 228877, inédit.

757.

P. CASSIA, Le contrôle de cassation opéré par le Conseil d’Etat sur les référés administratifs, DA, octobre 2001, chr. 19.

758.

C.E., réf., 26 janvier 2001, Gunes, req., n° 229594, inédit.

759.

C.E., 16 février 2001, Breucq, RFDA 2001, p. 670, concl. D. CHAUVAUX ainsi que C.E., 8 mars 2002, Région Languedoc-Roussillon, req., n° 238198, à mentionner.

760.

C.E., 3 juin 2002, Belikian, CTI août-septembre 2002, n° 187, obs. Th. CELERIER ; 29 juillet 2002, Domah, req. n° 242293 et 19 février 2003, Pinel, req. n° 251269, inédit.

761.

C.E., sect., 26 février 2003, Société Les belles demeures du Cap-Ferrat, AJDA 2003, p. 498-500 ; JCP, éd. G., II, 10094, note J. DUVAL et V. GUINOT et 23 avril 2003, Commune de Roquebrune Cap-Martin, req., n° 251946, à mentionner.

762.

C.E., 8 octobre 2001, Sanches Cardoso, req. n° 233638, à mentionner et 7 février 2003, Union départementale des PME du Maine-et-Loire, req., n° 248382, inédit.