A) L'autorité de la chose jugée

Selon l'article 1351 du Code civil, l'autorité de la chose jugée est relative et elle suppose la réunion de trois identités d'objet, de cause et de parties. Les annulations pour excès de pouvoir ont, en effet, un caractère absolu en raison du caractère objectif de ce contentieux. L'annulation qui est rétroactive, intervient à l'égard de tous, c'est-à-dire que l'acte est retiré de l'ordonnance­ment juridique et considéré comme n'étant jamais intervenu,

La solution est différente au plein contentieux dès lors que, comme il est de principe, l'autorité de la chose jugée n'est que relative. L'exception de chose jugée reste alors possible pour autant qu'une partie à l'instance s'en prévale dans les conditions du droit commun, c'est-à-dire dans le délai du recours contentieux ou après l'expiration de ce délai, et alors dans le cadre d'une cause juridique déjà ouverte en temps utile. Au demeurant, cette exception de chose jugée est, en réalité, une simple exception d'illégalité tout simplement parce que l'autorité qui s'attache à la chose jugée constitue un élément de la légalité que ne saurait régulièrement méconnaître ni l'administration active ni la juridiction administrative.

L'incidence de cette distinction est d'ailleurs immédiate sur la renonciation à la chose jugée qui est sans effet dans le contentieux de l'excès de pouvoir alors qu'elle est opposable à son auteur dans le plein contentieux.

On notera néanmoins que le contentieux administratif a mis en place une procédure rarement utilisée qui permet théoriquement de pourvoir à l'exécution par les ministres de la décision de justice administrative revêtue de l'autorité absolue ou relative de la chose jugée « Lorsqu'une juridiction administrative a annulé pour excès de pouvoir un acte administratif ou, dans un litige de pleine juridiction a rejeté tout ou partie des conclusions présentées en défense par une collectivité publique, les ministres intéres­sés ont la faculté de demander au conseil d'État d'éclairer l'Administration sur les modalités d'exécution de la décision de justice ».

Il s'agit là d'une procédure, située en dehors de l'astreinte et centrée sur le Conseil d'État en formation administrative et, plus précisément, sur la section du rapport et des études qui révèle à la fois la prééminence du Conseil d'État dans le contentieux administratif et la confusion, au sein de la Haute Assemblée, entre la juridiction et la consultation pour l'action.

Cependant, si, eu égard à leur caractère provisoire, les décisions du juge des référés n'ont pas, au principal, l'autorité de la chose jugée, elles sont néanmoins exécutoires et obligatoires.

Par exemple lorsque le juge des référés a prononcé la suspension d'une décision et qu'il n'a pas été mis fin à cette suspension, l'administration ne saurait légalement reprendre une même décision sans qu'il ait été remédié au vice que le juge des référés avait pris en considération pour prononcer la suspension 865

Notes
865.

C.E., sect., 5 novembre 2003, Association convention vie et nature pour une écologie radicale et Association pour la protection des animaux sauvages, req., n° 259339, 253706 et 259751, inédit.