Il s’agit là de l’innovation la plus originale de la loi du 30 juin 2000. Conformément à l’article L. 521-2 du Code de justice administrative: « saisi d’une demande en ce sens justifiée par l’urgence, le juge des référés peut ordonner toute mesure nécessaire à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public aurait porté, dans l’exercice d’un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ». Le juge dispose d’un pouvoir d’injonction, à l’égard de l’administration, alors même que le juge du fond n’aurait pas encore dit le droit.
L’article L. 511-1 du Code de justice administrative énonce que « le juge des référés statue par des mesures qui présentent un caractère provisoire. Il n’est pas saisi du principal et se prononce dans les meilleurs délais ».
Cette disposition rappelle l’état du droit existant ; le juge des référés peut se prononcer sans craindre d’être contredit ultérieurement par le juge du fond. Le jugement se prononçant sur une demande de suspension d’un acte administratif n’est jamais revêtu au principal de l’autorité de la chose jugée. Les mesures ordonnées ont un caractère provisoire ; il n’appartient pas au juge des référés, par exemple, de prononcer l’annulation d’un acte, une telle mesure ayant alors un caractère définitif. Le juge peut, en outre, modifier ou mettre fin à tout moment aux mesures qu’il a ordonnées, à condition que la demande, qui lui en est faite, soit justifiée par un élément nouveau.
Il convient de souligner que la recevabilité de la demande de suspension est conditionnée par l’existence d’une requête au fond qui doit être elle-même recevable.
Les procédures d’urgence octroient au juge un large pouvoir d’injonction qui oblige souvent le juge à préjudicier au principal même s’il n’en est pas saisi, notamment dans le cas de suspension de décisions de rejet 914 . Cette nécessité de préjudicier au principal est la conséquence directe de l’efficacité de la mesure d’urgence prononcée.
Mais l’urgence n’est pas une des conditions d’octroi d’une mesure en référé pour toutes les procédures de référé. Ainsi, le juge administratif des référés peut-il prononcer des mesures en référé-instruction, en référé-provision et référé-constatation sans rechercher si l’urgence justifie de telles mesures.
Dans le cadre du référé liberté, un délai de quarante-huit heures est imposé au juge à compter de sa saisine 915 . Dans les autres cas, la pratique des tribunaux administratifs fait apparaître que ces délais n’excèdent pas quelques semaines.
L’article R. 742-6 du Code de justice administrative n’exige pas que les ordonnances rendues par le juge des référés soient prononcées en audience publique 916 . Les dispositions de cet article du Code de justice administrative sont d’application immédiate à tous les contentieux en cours 917 .
L’urgence devient un critère déterminant des procédures de référé-suspension, de référé-conservatoire et de référé-liberté (I).
En cas d’urgence et dans l’hypothèse d’une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale, le principe du contradictoire peut subir des infléchissements conséquents (II).
J.-L. PISSALOUX, Quelques réflexions dubitatives sur les nouvelles procédures du référé administratif, Dr. Adm. 2001, n°10, p.4 à 10.
Article L. 521-1 du Code de justice administrative.
C.E., 15 juin 2001, syndicat intercommunal d’adduction d’eau potable de Saint-Martin-de-Ré, req. n° 228856, à publier.
Sur l’application ratione temporis de la loi n° 2000-597 du 30 juin 2000 , C.A.A., Lyon, 30 janvier 2001, Fédération professionnelle indépendante de la police, AJDA 2001, p. 904, note J. BERTHOUD et C.A.A., Douai, 4 janvier 2002, commune de Provile, AJDA 2002, p. 254, note O. YEZNIKIAN.