III.6. Discussion et conclusion

Nous avons essayé de montrer comment les élèves utilisent un hyperfilm et comment ils le mettent en relation avec une tâche. C’est en soit un travail rarement réalisé en raison de la difficulté de construire problématique et méthodologie de recherche (Tricot, 1993b).

Lors de la recherche d’informations dans les hyperfilms, les élèves évaluent, sélectionnent ou traitent les informations (Rouet & Tricot, 1998) d’un film ou d’un lien par rapport au contenu de la question. Cela nécessite que se construisent des relations entre la tâche et l’hyperfilm. Nous avons constaté que les élèves réalisent certaines actions dans le lieu de tâche et dans celui d’hyperfilm pour atteindre leurs buts (répondre à une question). Ainsi, la planification et la réalisation de la tâche par les élèves apparaît-elle, par leurs actions, dans ces deux lieux. Chaque action prend sens dans un contexte (Kuutti, 1997 ; Spasser, 1999) qui permet de comprendre pourquoi les élèves la réalisent. Par exemple, pour répondre la question « pourquoi les acides sont corrosifs », les élèves cliquent sur un bouton contenant le mot « corrosif ».

Les actions « chercher un film prescrit » et « regarder un film prescrit » réalisées par les élèves peuvent être interprétées par le niveau conventionnel de l’action (Thévenot, 1998). En revanche, les actions « chercher un film non prescrit » et « regarder un film non prescrit » réalisées par les élèves peuvent être interprétées par le niveau téléologique de Thévenot. Le problème de désorientation lors de la navigation (Conklin, 1987 ; Foss, 1988) dans les hyperfilms peut être relatif au niveau familier de Thévenot parce que l’opération « cliquer sur le bouton » devient quelques fois une routine. Cette routine produit ainsi des opérations inconscientes. Prendre une décision concernant un bouton à cliquer ou un film à visionner doit être supporté par la compréhension de l’activité. L’absence d’un bon contrôle de l’activité amène les élèves à se perdre dans l’hyperfilm. Nous avons constaté dans notre travail que le problème de désorientation lors de la navigation était relatif au temps d’adaptation des élèves au système hyperfilm (temps de connaître la structure et la logique du système). Cette adaptation peut être influencée par la familiarisation avec le système et/ou par les connaissances des élèves sur le système (Tricot, 1993b). Les passages rapides entre les pages de l’hyperfilm étaient liés à l’adaptation des élèves au système hyperfilm et à son l’apprentissage. En revanche, les passages lents étaient liés à la longueur de la discussion sur le contenu d’un film ou le choix d’un lien pour accéder à un autre film. Nous avons constaté que les films reconstruits incitaient plus les élèves à rester dans une même page de « film » pour discuter de la compréhension du système chimique présent dans le film.

Notre étude a montré que les élèves construisent leur activité à partir de nombreux allers et retours entre la tâche et l’hyperfilm, conduisant parfois à voir un film plusieurs fois. C’est l’occasion de construire des connaissances (voir le chapitre V). La non-mémorisation de certaines idées trouvées dans le film visionné (voir le chapitre IV), la production d’une nouvelle question pour comprendre le système chimique présent dans le film visionné, la sélection par les élèves des informations verbales et/ou visuelles d’un film visionné pour les utiliser dans leur réponse et d’autres facteurs sont responsables des allers et retours entre la tâche et l’hyperfilm.