2.2. L’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle

L’augmentation locale d’activité synaptique entraîne des augmentations locales de consommation d’oxygène. A cet instant alors, la concentration veineuse locale en désoxy-hémoglobine, par rapport à celle d’oxyhémoglobine, augmente (Figure 6, gauche). Il s’ensuit un afflux local de sang chargé en oxygène, soit corrélativement une diminution relative de la concentration en désoxy-hémoglobine (Figure 6, droite). Cette variation du taux de désoxy-hémoglobine/oxyhémoglobine représente l’effet BOLD (Blood oxygen level dependent) mesuré par l’IRMf. Le phénomène peut paraître paradoxal, puisque c’est l’activité synaptique consommant de l’oxygène qui entraîne une augmentation de la concentration en oxygène, plutôt que sa baisse.

Figure 6. Schématisation de l’effet BOLD (adaptée de Raichle, 1994).

Le signal IRM est basé sur les propriétés intrinsèques de l’hémoglobine et la désoxy-hémoglobine. L’hémoglobine contient un atome de fer lié une molécule d’oxygène, ce qui la rend diamagnétique. La désoxy-hémoglobine par contre, ne contient plus d’atome d’oxygène, et l’atome de fer ainsi isolé la rend paramagnétique. Les composés paramagnétiques, contrairement aux composés diamagnétiques, modifient, dans leur voisinage proche, le champ magnétique. L’IMR est basée sur l’utilisation dans l’imageur d’un fort champ magnétique. Lorsque le sujet est placé dans le tunnel de l’imageur et effectue une tâche cognitive particulière, le sang afflux au niveau des aires cérébrales activées, la quantité d’oxygène augmente localement, ce qui a pour effet de diminuer les inhomogénéités locales du champ magnétique, produisant alors le signal IRM.

Cette augmentation de débit sanguin qui crée le signal IRM et suit l’activité synaptique n’est pas instantanée. Après la stimulation, la réponse hémodynamique est caractérisée par une augmentation progressive du signal jusqu’à atteindre sa valeur maximale en 6 s ; le signal diminue ensuite jusqu’à prendre une valeur inférieure à sa valeur de départ en 15 s, puis retourne à sa valeur de base en 30 secondes ().

Figure 7. Représentation de la réponse hémodynamique au cours du temps.

Le signal hémodynamique mesuré par l’IRMf est la concentration sanguine en désoxy-hémoglobine. Par conséquent, ce signal, contrairement à celui mesuré en TEP, représente un traceur endogène et non invasif. Il reflète directement le processus physiologique et non pas la dispersion d’un traceur dans la circulation.

La qualité des images d’acquisition (résolutions spatiale et temporelle) en IRMf dépend de la séquence d’acquisition employée. La plus connue est la séquence EPI (Echo Planar Imaging) qui communique très rapidement les gradients de champs magnétiques et permet donc l’acquisition d’un plan du cerveau de façon très rapide. Il est fréquent maintenant de pouvoir acquérir un volume entier du cerveau en 2 s, même si l’acquisition peut durer jusqu’à 5 s. Ce temps d’acquisition du volume entier du cerveau est appelé TR (temps de répétition). La résolution temporelle de l’IRMf dépend aussi de la réponse hémodynamique, qui ne reflète l’activité synaptique locale qu’avec un délai de quelques secondes. Quant à la résolution spatiale de l’IRMf, de l’ordre de quelques millimètres (de 2 à 5), elle est fonction des paramètres choisis lors de l’acquisition des coupes fonctionnelles : ce sont principalement l’épaisseur de la coupe et la taille de l’unité d’activation (le voxel).

Il existe plusieurs sources d’artéfacts à cette technique d’imagerie. Premièrement, l’activité observée, le signal BOLD, est inférée du système veineux, contrairement à celle enregistrée en TEP qui résulte du DSC artériel. En cela, le signal BOLD n’est pas parfaitement superposable à l’architecture corticale, et une tâche d’activation, veineuse, peut apparaître à distance de la zone corticale activée. Deuxièmement (et cette source d’artéfacts existe aussi en TEP), le sujet peut bouger lors d’une acquisition fonctionnelle. En effet, les périodes d’acquisition durent plusieurs minutes pendant lesquelles il n’est pas rare que le sujet, malgré les consignes réitérées, effectue quelques mouvements de tête. D’autres sources de mouvement existent : ce sont les mouvements physiologiques dus à la respiration du sujet et à son rythme cardiaque. Troisièmement, le signal IRM, de par son principe même, est sensible aux variations de susceptibilité magnétiques (Frahm et al., 1988). Ces variations sont particulièrement importantes au niveau des interfaces tissulaires, tels que ceux existant entre le tissu cérébral et l’os ou l’air sous-jacent. Les artéfacts sont tels à ces niveaux, que l’acquisition d’un signal est soit erronée, soit impossible. Cette troisième source d’artéfacts nous concerne tout particulièrement puisque de nombreuses aires olfactives sont situées à proximité des sinus et des narines. La séquence EPI classique, subissant de tels artéfacts ne permet pas d’enregistrer l’activation cérébrale dans les aires frontales situées au dessus des orbites. Il existe plusieurs techniques pour parer à ces problèmes, dont l’utilisation de la séquence PRESTO (Liu et al., 1993), moins sensible aux artéfacts de susceptibilité magnétique que la séquence EPI classique (van Gelderen et al., 1995).

La lecture du signal fonctionnel ne peut se faire qu’en le superposant aux images anatomiques du cerveau du sujet. C’est pourquoi une séquence d’acquisition d’images fonctionnelles est toujours accompagnée d’une séquence d’acquisition d’images anatomiques. Cette séquence d’acquisition est sensiblement différente de celle précédemment décrite.