3.1.1. Les désordres périphériques et neuropathologiques

Un facteur à l’origine de la détérioration des fonctions olfactives chez le sujet sain est le vieillissement de l’individu. Le déclin des performances olfactives avec l’âge peut être non seulement associé à des altérations centrales, mais aussi à des processus dégénératifs de l’épithélium et du bulbe olfactifs (Trojanowski et al., 1991; Yousem et al., 1998; Kovacs, 2004). Il se traduit par une baisse des performances de détection et d’identification des odeurs (de Jong et al., 1999; Lehrner et al., 1999). Chez le sujet âgé, des modifications des patterns cérébraux d’activation sont observées à l’aide des techniques d’imagerie cérébrale (Yousem et al., 1999; Suzuki et al., 2001; Kareken et al., 2003). Cela suggère que le vieillissement normal entraîne un fonctionnement perturbé des aires olfactives par rapport au sujet plus jeune, et/ou que de nouvelles stratégies de réponse sont mises en place.

Chez le sujet sain, la fonction olfactive peut être perturbée par l’inflammation et/ou l’obstruction des voies nasales (polype, sinusite, rhinite, …), laquelle empêche simplement les molécules odorantes d’atteindre la muqueuse olfactive. L’inspiration accidentelle ou régulière de substances chimiques volatiles peut par ailleurs entraîner une atteinte des neurorécepteurs, qui ne peut être compensée par leur capacité naturelle de régénération (Chapitre 1 - Section ). Il est ainsi montré que la fumée du tabac entraîne une diminution des performances olfactives. Le temps mis pour recouvrer des performances normales est fonction de la durée pendant laquelle le sujet a fumé et de la quantité de tabac fumé par an (Frye et al., 1990).

La perte de la fonction olfactive peut aussi résulter d’un traumatisme crânien (Costanzo & Becker, 1986; Costanzo & Zasler, 1992), notamment lors d’un accident de voiture. Quand le choc est violent, il peut s’ensuivre un déplacement du cerveau dans la boîte crânienne, d’arrière en avant, puis sous l’effet du recul, d’avant en arrière. Le bulbe olfactif est solidaire du cerveau par les méninges, et suit ses déplacements. Par contre, les nerfs olfactifs qui transitent par les pores de la lame criblée ne peuvent être déplacés et sont cisaillés. Si tous les nerfs olfactifs sont sectionnés, la perte de la fonction olfactive est totale. Seuls subsistent alors les perceptions trigéminales.

Les fonctions olfactives sont détériorées dans un grand nombre de maladies neurologiques telles que l’épilepsie, la maladie d’Alzheimer, la maladie de Parkinson et la maladie de Huntington, et les maladies neuropsychiatriques telles que la schizophrénie et la dépression (Carroll et al., 1993; Doty, 1994; Lehrner et al., 1997; Martzke et al., 1997; Mesholam et al., 1998; Hamilton et al., 1999; Kohler et al., 2001; Pause et al., 2001; Royet et al., 2001a; Hudry et al., 2002; Hawkes, 2003; Hudry et al., 2003; Kovacs, 2004). Les découvertes relatives à ces derniers travaux ne seront pas détaillées parce que trop nombreuses et trop hétérogènes pour être informatives par rapport aux objectifs de la thèse. Les troubles cognitifs et perceptifs chez ces patients sont également si variés que l’interprétation des données sur le dysfonctionnement olfactif en est obscurcie. Une exception à cette règle est toutefois l’étude des patients épileptiques cérébrolésés dans la mesure où l’exérèse d’une aire cérébrale peut être unilatérale, peu étendue, et être ainsi à l’origine d’un dysfonctionnement plus spécifique.