Chapitre 3 : Discussion générale

1. Considérations méthodologiques

1.1. Les techniques d’IRMf et de TEP sont-elles adaptées à l’étude des processus cognitifs olfactifs ?

Les techniques d’imagerie cérébrale fonctionnelles, contrairement aux approches neuropsychologiques, permettent la visualisation directe des réseaux neuronaux participant à des processus cognitifs chez le sujet sain. L’avantage des techniques d’IRMf et de TEP, par rapport aux techniques électromagnétiques, est également de permettre l’observation de l’activité des aires profondes du cerveau, dont font partie la plupart des aires olfactives. Ces deux techniques d’imagerie cérébrale sont complémentaires et n’ont pas les mêmes avantages ou inconvénients.

L’avantage incontesté de l’IRMf est, dans sa version événementielle, sa meilleure résolution temporelle par rapport à la TEP. Ainsi, au lieu d’étudier les activités cognitives moyennées sans distinction pendant une période de temps définie, l’IRMf événementielle permet d’étudier au sein de cette même période de temps différents processus cognitifs, et de pouvoir les analyser séparément selon la réponse fournie par le sujet. Cette technique nous a ainsi permis d’étudier séparément les réponses neuronales associées au jugement d’une odeur familière de celles associées au jugement d’une odeur non familière (Etude 3), et de fonder les analyses fonctionnelles non pas sur la sélection a priori des odorants, mais sur le jugement que le sujet en fait pendant l’expérience, ce qui est beaucoup plus réaliste. L’IRMf événementielle permet donc d’étudier des mécanismes cognitifs plus spécifiques.

L’IRMf, comparée à la TEP, a également une meilleure résolution spatiale (dans nos études, les résolutions spatiales sont de 8*8*10 mm et 6*6*7 mm, pour les Etudes 2 et 3 d’IRMf, et de 12*12*12 mm pour les Etudes 1 et 4 de TEP). Elle permet donc de mieux localiser les régions cérébrales activées. Par exemple, le cortex piriforme est faiblement étendu et le distinguer de l’amygdale, qui lui est adjacente, n’est pas évident. La meilleure résolution spatiale de l’IRMf permet de mieux situer une activation dans ce cortex.

L’IRMf possède cependant un désavantage majeur quand on la compare avec la TEP : Elle est particulièrement sensible aux artéfacts de susceptibilité magnétique dans les zones orbitofrontales, lesquelles sont cruciales en olfaction. Les artéfacts peuvent être atténués en recourant à différentes méthodes. Dans l’Etude 2, nous avons utilisé la séquence PRESTO conçue spécialement à cette fin. Nous observons alors que le signal dans les zones orbitales est complet en z = -10, mais s’atténue pour disparaître totalement dans les régions plus profondes (z = -20), sachant que les aires orbitales ont leur limites inférieures en z = -30 (Figure 25). Lors de l’Etude 3 d’IRMf, nous employons une séquence EPI qui enregistre moins de signal dans les zones orbitales. Cette séquence n’acquiert la totalité du signal dans les zones orbitales que jusqu’à la coupe située en z = -2, mais n’acquiert plus du tout de signal au-delà de z = -15. Nos études TEP (1 et 4) montrent cependant que des traitements cognitifs olfactifs peuvent engager les aires orbitales localisées très ventralement (z = -24). Par conséquent, en dépit de ses meilleures résolutions temporelle et spatiale, l’IRMf ne restitue qu’une partie des processus cérébraux engagés lors des tâches cognitives olfactives, alors que la TEP, bien que plus limitée dans ses précisions temporelle et spatiale, peut les restituer dans leur totalité.

Figure 25. Signal moyen enregistré sur les groupes de sujets lors des séquences d’acquisition EPI en IRMf (Etude 3), PRESTO en IRMf (Etude 2) et de TEP (Etude 1). Ce signal est représenté sur des coupes horizontales, situées à différentes hauteurs dans le cerveau (z = -2, z = -10, z = -20).