Conclusions et perspectives

Cette thèse apporte des éléments nouveaux dans l’établissement d’une cartographie des aires cérébrales sous-jacentes aux processus mnésiques olfactifs. Elle montre les intérêts complémentaires des techniques de TEP et d’IRMf pour l’étude des bases neuronales olfactives. L’ensemble des études de cette thèse montre une dissociation des bases neuronales de la mémoire à court terme et de la mémoire à long terme olfactive. Bien que nous montrions l’existence d’activations spécifiques à la modalité sensorielle olfactive dans la mémoire à court terme (Etude 1) et dans la mémoire à long terme (Etude 3), cette thèse avance de nombreuses preuves en faveur de l’hypothèse du caractère plurimodal d’une partie des processus mnésiques. La totalité du réseau neuronal supposé plurimodal, qu’il appartienne à la mémoire à court terme ou à la mémoire à long terme, est latéralisée dans l’hémisphère cérébral gauche.

Suite à ces résultats et aux discussions que nos études ont amenées, de nombreuses questions attendent encore des réponses.

Premièrement, il serait important de pouvoir répondre à une question posée de façon lors de nos travaux. Dans nos études 2 et 4, ainsi que dans les études précédentes menées par notre équipe (Royet et al., 1999; Royet et al., 2001b), les contrastes effectués lors de l’analyse des données fonctionnelles opposent une condition olfactive pendant laquelle le sujet est stimulé à chacune de ses inspirations à une condition de détection d’odeurs pendant laquelle le sujet est en moyenne stimulé une inspiration sur deux. Nous comparons donc une condition où le sujet est stimulé avec N odorants à une condition où le sujet est stimulé avec N/2 odorants. De façon à rejeter l’hypothèse que les activations cérébrales que nous observons sont liées à cette différence de nombre d’odeurs senties pour un temps donné, nous souhaiterions identifier les aires cérébrales impliquées dans des processus cognitifs olfactifs dont la réponse est corrélée avec le nombre d’odeurs senties par unité de temps.

Deuxièmement, il est établi que la mémoire de reconnaissance engage deux processus différents : le sentiment de familiarité et le souvenir (Mandler, 1980)(Chapitre 1- Section ). Nos Etudes 2, 3 et 4 abordent toutes les trois le jugement de la familiarité des odeurs. Nous avons émis l’hypothèse dans nos études, que le sujet ait pu faire un peu plus que le jugement de familiarité que nous lui demandions de faire. Cet accès à l’identification de l’item et aux souvenirs qui lui sont associés semble engager, dans d’autres modalités sensorielles, des réseaux neuronaux distincts de ceux du sentiment de familiarité (Wheeler & Buckner, 2004; Yonelinas et al., 2005). Une étude examinant distinctement les processus de familiarité et de souvenir permettrait d’identifier les bases neuronales impliquées dans chacun de ces processus.

Troisièmement, en envisageant l’ensemble des résultats présentés en Introduction (Chapitre 1 - Section ), ainsi que l’ensemble des quatre études présentées dans cette thèse, il apparaît que les réseaux neuronaux activés lors de divers processus cognitifs olfactifs impliquent des aires cérébrales communes, telles que le cortex piriforme, l’amygdale, le cortex orbitofrontal, le gyrus frontal inférieur, le gyrus cingulaire et l’insula. Etant donné que des aires cérébrales sont activées dans différents processus cognitifs, comment leur attribuer une fonction propre ? La question que nous devrions nous poser n’est peut-être pas « Quelles aires sont activées lors de telle tâche ? », mais plutôt « Comment ces aires sont-elles connectées fonctionnellement entre-elles pendant telle tâche ? ». Avec l’avancée des nouvelles techniques computationnelles, telles que la modélisation causale dynamique (Dynamical causal modelling) il est maintenant possible d’identifier les interactions existant entre les différentes aires cérébrales d’un même réseau pendant une tâche spécifique (Friston et al., 2003). Cette technique permet de compléter l’approche cartographique que nous avons employée dans cette thèse en identifiant les relations dynamiques existant entre les aires d’un réseau. Dans notre projet post-doctoral, nous tenterons d’identifier la nature des connexions neuronales existant entre chacune de ces régions couramment observées dans des études de neuroimagerie en olfaction humaine. Nous tenterons aussi de caractériser l’évolution de ces connexions en fonction de différents contextes : la tâche olfactive effectuée par le sujet (jugement de l’intensité, de la familiarité …), l’attente du sujet (stimulation attendue / aucune attente), et le substrat neuronal sous-jacent (normal / pathologique).